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Traité de la Vraie Dévotion à la Sainte Vierge Marie
«PREPARATION AU REGNE DE JESUS-CHRIST»]
De Saint Louis-Marie Grignion de Monfort
II. «EN QUOI CONSISTE LA DEVOTION A MARIE»
[D. LA PARFAITE PRATIQUE DE DEVOTION A MARIE]
[4.] LES EFFETS MERVEILLEUX QUE CETTE DEVOTION PRODUIT DANS UNE AME QUI Y EST FIDELE
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[Connaissance et mépris de soi-même]
[Participation à la foi de Marie]
[Grâce du pur amour]
[Grande confiance en Dieu et en Marie]
[Communication de l’âme et de l’esprit de Marie]
[Transformation des âmes en Marie à l’image de Jésus-Christ]
[La plus grande gloire de Jésus-Christ]
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Mon cher frère, soyez persuadé que si vous vous rendez
fidèle aux pratiques intérieures, que je vous marquerai ci-
après: [226-256, 257-265]
[Connaissance et mépris de soi-même]
1 Par la lumière que le Saint-Esprit vous donnera par
Marie, sa chère Epouse, vous connaîtrez votre mauvais fonds,
votre corruption et votre incapacité à tout bien, si Dieu n’en
est le principe comme auteur de la nature ou de la grâce, et,
en suite de cette connaissance, vous vous mépriserez, vous ne
penserez à vous qu’avec horreur. Vous vous regarderez comme un
limaçon qui gâte tout de sa bave, ou comme un crapaud qui
empoisonne tout de son venin, ou comme un serpent malicieux
qui ne cherche qu’à tromper. Enfin l’humble Marie vous fera
part de sa profonde humilité, qui fera que vous vous
mépriserez, vous ne mépriserez personne et vous aimerez le
mépris.
[Participation à la foi de Marie]
214. 2 La Sainte Vierge vous donnera part à sa foi, qui a été
plus grande sur la terre que la foi de tous les patriarches,
les prophètes, les apôtres et tous les saints. Présentement
qu’elle est régnante dans les cieux, elle n’a plus cette foi,
parce qu’elle voit clairement toutes choses en Dieu, par la
lumière de la gloire; mais cependant, avec l’agrément du Très-
Haut, elle ne l’a pas perdue en entrant dans la gloire; elle
l’a gardée pour la garder dans l’Eglise militante à ses plus
fidèles seviteurs et servantes. Plus donc vous gagnerez la
bienveillance de cette auguste Princesse et Vierge fidèle,
plus vous aurez de pure foi dans toute votre conduite: une foi
pure, qui fera que vous ne vous soucierez guère du sensible et
de l’extraordinaire; une foi vive et animée par la charité,
qui fera que vous ne ferez vos actions que par le motif du pur
amour; une foi ferme et inébranlable comme un rocher, qui fera
que vous demeurerez ferme et constant au milieu des orages et
des tourmentes; une foi agissante et perçante, qui, comme un
mystérieux passe-partout, vous donnera entrée dans les
mystères de Jésus-Christ, dans les fins dernières de l’homme
et dans le coeur de Dieu même; une foi courageuse, qui vous
fera entreprendre et venir à bout de grandes choses pour Dieu
et le salut des âmes, sans hésiter; enfin, une foi qui sera
votre flambeau enflammé, votre vie divine, votre trésor caché
de la divine Sagesse, et votre arme toute-puissante dont vous
vous servirez pour éclairer ceux qui sont dans les ténèbres et
l’ombre de la mort, pour embraser ceux qui sont tièdes et qui
ont besoin de l’or embrasé de la charité, pour donner vie à
ceux qui sont morts par le péché, pour toucher et renverser,
par vos paroles douces et puissantes, les coeurs de marbre et
les cèdres du Liban, et enfin pour résister au diable et à
tous les ennemis du salut.
[Grâce du pur amour]
215. 3 Cette Mère de la belle dilection ôtera de votre coeur
tout scrupule et toute crainte servile déréglée: elle
l’ouvrira et l’élargira pour courir dans les commandements de
son Fils, avec la sainte liberté des enfants de Dieu, et pour
y introduire le pur amour, dont elle a le trésor; en sorte que
vous ne vous conduirez plus, tant que vous avez fait, par
crainte à l’égard de Dieu charité, mais par le pur amour. Vous
le regarderez comme votre bon Père, auquel vous tâcherez de
plaire incesamment, avec qui vous converserez confidemment,
comme un enfant avec son bon père. Si vous venez, par malheur,
à l’offenser, vous vous en humilierez aussitôt devant lui,
vous lui en demanderez pardon humblement, vous lui tendrez la
main simplement et vous vous en relèverez amoureusement, sans
trouble ni inquiétude, et continuerez à marcher vers lui sans
découragement.
[Grande confiance en Dieu et en Marie]
216. 4 La Sainte Vierge vous remplira d’une grande confiance
en Dieu et en elle-même: 1 parce que vous n’approcherez plus
de Jésus-Christ par vous-même, mais toujours par cette bonne
Mère; 2 parce que, lui ayant donné tous vos mérites, grâces
et satisfactions, pour en disposer à sa volonté, elle vous
communiquera ses vertus et elle vous revêtira de ses mérites,
en sorte que vous pourrez dire à Dieu avec confiance: Voici
Marie votre servante: qu’il me soit fait selon votre parole:
Ecce ancilla Domini, fiat mihi secundum verbum tuum; 3 parce
que, vous étant donné à elle tout entier, corps et âme, elle
qui est libérale avec les libéraux et plus libérale que les
libéraux mêmes, se donnera à vous par retour d’une manière
merveilleuse, mais véritalble; en sorte que vous pourrez lui
dire hardiment: Tuus sum ego, salvum me fac: Je suis à vous,
Sainte Vierge, sauvez-moi; ou comme j’ai déjà dit, avec le
Disciple bien-aimé: Accepi te in mea: Je vous ai prise, sainte
Mère, pour tous mes biens. Vous pourrez encore dire, avec
saint Bonaventure: Ecce Domina salvatrix mea, fiducialiter
agam, et non timebo, quia fortitudo mea, et laus mea in Domino
es tu…; et en un autre endroit: Tuus totus ego sum, et omnia
mea tua sunt, o Virgo gloriosa, super omnia benedicta; ponam
te ut signaculum super cor meum, quia fortis est ut mors
dilectio tua (S. Bon. In psal. min. B.V.) Ma chère Maîtresse
et salvatrice, j’agirai avec confiance et je ne craindrai
point, parce que vous êtes ma force et ma louange dans le
Seigneur… Je suis tout vôtre, et tout ce que j’ai vous
appartient; ô glorieuse Vierge, bénite par-dessus toutes
choses créées, que je vous mette comme un cachet sur mon
coeur, parce que votre dilection est forte comme la mort! Vous
pourriez dire à Dieu dans les sentiments du Prophète: Domine,
non est exaltatum cor meum, neque elati sunt oculi mei; neque
ambulavi in magnis, neque in mirabilibus super me; si non
humiliter sentiebam, sed exaltavi animam; sicut ablactatus
super matre sua, ita retributio in anima mea: Seigneur, ni mon
coeur, ni mes yeux n’ont aucun sujet de s’élever et de
s’enorgueillir, ni de rechercher les choses grandes et
merveilleuses; et, avec cela, je ne suis pas encore humble,
mais j’ai relevé et encouragé mon âme par la confiance; je
suis comme un enfant sevré des plaisirs de la terre et appuyé
sur le sein de ma mère; et c’est sur ce sein qu’on me comble
de biens. 4 Ce qui augmentera encore votre confiance en elle,
c’est que, lui ayant donné en dépôt tout ce que vous avez de
bon pour le donner ou le garder, vous aurez moins de confiance
en vous et beaucoup plus en elle, qui est votre trésor. Oh!
quelle confiance et quelle consolation pour une âme qui peut
dire que le trésor de Dieu, où il a mis tout ce qu’il a de
plus précieux, est le sien aussi! Ipsa est thesaurus Domini:
Elle est, dit un saint, le trésor du Seigneur.
[Communication de l’âme et de l’esprit de Marie]
217. 5 L’âme de la Sainte Vierge se communiquera à vous pour
glorifier le Seigneur; son esprit entrera en la place du vôtre
pour se réjouir en Dieu, son salutaire, pourvu que vous vous
rendiez fidèle aux pratiques de cette dévotion. Sit in
singulis anima Mariae ut magnificet Dominum; sit in singulis
spiritus Mariae ut exultet in Deo (S. Amb): Que l’âme de Marie
soit en chacun pour y glorifier le Seigneur; que l’eprit de
Marie soit en chacun, pour s’y réjouir en Dieu. Ah! quand
viendra cet heureux temps, dit un saint homme de nos jours qui
était tout perdu en Marie, ah! quand viendra cet heureux temps
où la divine Marie sera établie maîtresse et souveraine dans
les coeurs, pour les soumettre pleinement à l’empire de son
grand et unique Jésus. Quand est-ce que les âmes respireront
autant Marie que les corps respirent l’air? Pour lors, des
choses merveilleuses arriveront dans ces bas lieux, où le
Saint-Esprit, trouvant sa chère Epouse comme reproduite dans
les âmes, y surviendra abondamment et les remplira de ses
dons, et particulièrement du don de sa sagesse, pour opérer
des merveilles de grâces. Mon cher frère, quand viendra ce
temps heureux et ce siècle de Marie, où plusieurs âmes
choisies et obtenues du Très-Haut par Marie, se perdant elles-
mêmes dans l’abîme de son intérieur, deviendront des copies
vivantes de Marie, pour aimer et glorifier Jésus-Christ? Ce
temps ne viendra que quand on connaîtra et on pratiquera la
dévotion que j’enseigne: Ut adveniat regnum tuum, adveniat
regnum Mariae.
[Transformation des âmes en Marie à l’image de Jésus-Christ]
218. 6 Si Marie, qui est l’arbre de vie, est bien cultivée en
votre âme par la fidélité aux pratiques de cette dévotion,
elle portera son fruit en son temps; et ce fruit n’est autre
que Jésus-Christ. Je vois tant de dévots et dévotes qui
cherchent Jésus-Christ, les uns par une voie et une pratique,
les autres par l’autre; et souvent après qu’ils ont beaucoup
travaillé pendant la nuit, ils peuvent dire: Per totam noctem
laborantes, nihil cepimus: Quoique nous ayons travaillé
pendant toute la nuit, nous n’avons rien pris. Et on peut leur
dire: Laborastis multum, et intulistis parum: Vous avez
beaucoup travaillé, et vous avez peu gagné. Jésus-Christ est
encore bien faible chez vous. Mais par la voie immaculée de
Marie et cette pratique divine que j’enseigne, on travaille
pendant le jour, on travaille dans un lieu saint, on travaille
peu. Il n’y a point de nuit en Marie, puisqu’il n’y a point eu
de péché ni même la moindre ombre. Marie est un lieu saint, et
le Saint des saints, où les saints sont formés et moulés.
219. Remarquez, s’il vous plait, que je dis que les saints
sont moulés en Marie. Il y a une grande différence entre faire
une figure en relief, à coups de marteau et de ciseau, et
faire une figure en la jetant en moule: les sculpteurs et
statuaires travaillent beaucoup à faire les figures dans la
première manière, et il leur faut beaucoup de temps; mais à
les faire dans la seconnde manière, ils travaillent peu et les
font en fort peu de temps. Saint Augustin appelle la Sainte
Vierge forma Dei: le moule de Dieu: Si formam Dei te appellem,
digna existis: le moule propre à former et mouler des dieux.
Celui qui est jeté dans ce moule divin est bientôt formé en
Jésus-Christ, et Jésus-Christ en lui: à peu de frais et en peu
de temps, il deviendra dieu, puisqu’il est jeté dans le même
moule qui a formé un Dieu.
220. Il me semble que je puis fort bien comparer des
directeurs et personnes dévotes qui veulent former Jésus-
Christ en soi ou dans les autres par d’autres pratiques que
celle-ci, à des sculpteurs qui, mettant leur confiance dans
leur savoir-faire, leurs industries et leur art, donnent une
infinité de coups de marteau et de ciseau à une pierre dure,
ou une pièce de bois mal polie, pour en faire l’image de
Jésus-Christ; et quelquefois ils ne réussissent pas à exprimer
Jésus-Christ au naturel, soit faute de connaissance et
d’expérience de la personne de Jésus-Christ, soit à cause de
quelque coup mal donné, qui a gâté l’ouvrage. Mais, pour ceux
qui embrassent ce secret de la grâce que je leur présente, je
les compare avec raison à des fondeurs et mouleurs qui, ayant
trouvé le beau moule de Marie, où Jésus-Christ a été
naturellement et divinement formé, sans se fier à leur propre
industrie, mais uniquement à la bonté du moule, se jettent et
se perdent en Marie pour devenir le portrait au naturel de
Jésus-Christ.
221. O la belle et véritable comparaison! Mais qui la
comprendra? Je désire que ce soit vous, mon cher frère. Mais
souvenez-vous qu’on ne jette en moule que ce qui est fondu et
liquide: c’est-à-dire qu’il faut détruire et fondre en vous le
vieil Adam, pour devenir le nouveau en Marie.
[La plus grande gloire de Jésus-Christ]
222. 7 Par cette pratique, bien fidèlement observée, vous
donnerez à Jésus-Christ plus de gloire en un mois de temps que
par aucune autre, quoique plus difficile, en plusieurs années.
– Voici les raisons de ce que j’avance:
1 Parce que, faisant vos actions par la Sainte Vierge,
comme cette pratique enseigne, vous quittez vos propres
intentions et opérations, quoique bonnes et connues, pour vous
perdre, pour ainsi dire, dans celles de la Très Sainte Vierge,
quoiqu’elles vous soient inconnues; et, par là, vous entrez en
participation de la sublimité de ses intentions, qui ont été
si pures, qu’elle a plus donné de gloire à Dieu par la moindre
de ses actions, par exemple en filant sa quenouille, en
faisant un point d’aiguille, qu’un saint Laurent sur son gril,
par son cruel martyre, et même que tous les saints par leurs
actions les plus héroïques: ce qui fait que, pendant son
séjour ici-bas, elle a acquis un comble si ineffable de grâces
et de mérites, qu’on compterait plutôt les étoiles du
firmament, les gouttes d’eau de la mer et les sables du
rivage, que ses mérites et ses grâces, et qu’elle a donné plus
de gloire à Dieu que tous les anges et les saints ne lui ont
donné ni ne lui en donneront. O prodige de Marie! vous n’êtes
capable que de faire des prodiges de grâces dans les âmes qui
veulent bien se perdre en vous.
223. 2 Parce qu’une âme, par cette pratique, ne comptant pour
rien tout ce qu’elle pense ou fait d’elle-même, et ne mettant
son appui et sa complaisance que dans les dispositions de
Marie, pour approcher de Jésus-Christ, et même pour lui
parler, elle pratique beaucoup plus l’humilité que les âmes
qui agissent par elles-mêmes, et qui ont un appui et une
complaisance imperceptible dans leurs dispositions; et, par
conséquent, elle glorifie plus hautement Dieu, qui n’est
parfaitement glorifié que par les humbles et les petits de
coeur.
224. 3 Parce que la Sainte Vierge, voulant bien, par une
grande charité, recevoir en ses mains virginales le présent de
nos actions, elle leur donne une beauté et un éclat admirable;
elle les offre elle-même à Jésus-Christ, et sans difficulté,
que Notre-Seigneur en est plus glorifié que si nous les
offrions par nos mains criminelles. [146-149]
225. 4 Enfin, parce que vous ne pensez jamais à Marie, que
Marie, en votre place, ne pense à Dieu; vous ne louez ni
n’honorez jamais Marie, que Marie avec vous ne loue et
n’honore Dieu. Marie est toute relative à Dieu, et je
l’appellerais fort bien la relation de Dieu, qui n’est que par
rapport à Dieu, ou l’écho de Dieu, qui ne dit et ne répète que
Dieu. Si vous dites Marie, elle dit Dieu. Sainte Elisabeth
loua Marie et l’appela bienheureuse de ce qu’elle avait cru;
Marie, l’écho fidèle de Dieu, entonna: Magnificat anima mea
Dominum: Mon âme glorifie le Seigneur. Ce que Marie a fait en
cette occasion, elle le fait tous les jours; quand on la loue,
on l’aime, on l’honore ou on lui donne, Dieu est loué, Dieu
est aimé, Dieu est honoré, on donne à Dieu par Marie et en
Marie.