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Les Gloires de Marie
Saint Alphonse-Marie de Liguori
(1ère partie : commentaire du Salve Regina)
CHAPITRE VI : Montrez donc que vous êtes notre avocate
MARIE, NOTRE AVOCATE
I Marie est une Avocate assez puissante pour nous sauver tous
L’autorité des mères sur leurs fils est si grande, qu’elles ne peuvent jamais devenir leurs sujettes, alors même qu’ils seraient rois et disposeraient d’un pouvoir absolu sur toutes les personnes vivant dans leurs états. Aujourd’hui que Jésus-Christ est assis dans les cieux, son humanité sainte y tient la première place à la droite du Père, en vertu de son union hypostatique avec la personne du Verbe ; même en tant qu’homme, il a le souverain domaine de tout le créé, sans en excepter Marie ; tel est l’enseignement de saint Thomas ;
néanmoins, il reste toujours vrai que notre Rédempteur fut un certain temps soumis à l’autorité de Marie. L’Évangile atteste en effet que, pendant sa vie mortelle, Jésus voulut bien s’abaisser jusque-là : Il leur était soumis, dit saint Luc. Saint Ambroise avance mêne
qu’ayant daigné prendre Marie pour sa Mère, Jésus-Christ était vraiment tenu, à ce titre, de lui obéir. En parlant des autres élus,
remarque Richard, on dit qu’ils sont avec Dieu ; de Marie seule on peut dire qu’elle eut le double bonheur de se tenir soumise à la
volonté de Dieu, et de voir Dieu se soumettre à la sienne. Des autres vierges, ajoute-t-il, il est écrit qu’elles suivent l’Agneau partout où
il va ; mais de la Vierge Marie on peut dire qu’ici-bas le divin Agneau la suivait partout docilement.
Si donc il est vrai que dans le ciel Marie ne peut plus commander à son Fils , il est vrai aussi que ses prières sont les prières d’une
Mère, et, comme telles, bien propres à obtenir tout ce qu’elles réclament. " C’est là le grand privilège de Marie, dit saint Bonaventure,
elle peut tout auprès de Dieu ". Pourquoi ? Précisément pour la raison que nous venons d’indiquer, et que nous développerons ci-après,
savoir, que les prières de Marie, sont les prières d’une Mère.
Tel est aussi le motif sur lequel se fonde saint Pierre Damien pour parler à la bienheureuse Vierge en ces termes : " Toute puissance
vous a été donnée au ciel et sur la terre ; rien ne vous est impossible, vous pouvez même rendre aux désespérés l’espérance de la
béatitude ". Voici en effet ce que le saint ajoute : " Vous approchez de cet Autel ; de notre réconciliation, plutôt en commandant qu’en
suppliant, comme maîtresse plutôt que comme servante ". Cet autel au pied duquel les pécheurs trouvent miséricorde et pardon, c’est
Jésus-Christ. Quand Marie sollicite de lui quelque grâce en notre faveur, ses prières ont tant de poids auprès de lui, ce divin Fils se
montre si empressé de complaire à sa Mère, qu’il semble, non pas exaucer les humbles voeux d’une sujette, mais accomplir les ordres
d’une Reine. Ainsi, Jésus se plaît-il à honorer cette Mère chérie qui l’a tant honoré lui-même ici-bas : il lui accorde sans délai tout ce
qu’elle demande ou désire. Tout cela est confirmé par ces belles paroles de saint Germain : " O Marie, vous êtes toute-puissante pour
sauver les pécheurs ; vos prières n’ont pas besoin d’être appuyées par qui que ce soit auprès de Dieu, parce que vous êtes la Mère de
la Vie véritable. "
Saint Bernardin de Sienne ne craint pas de dire que tout est soumis à l’empire de Marie, et que Dieu même lui obéit, ce qui signifie
proprement dit que le Seigneur exauce ses prières comme s’il éxécutait ses ordres. " O Vierge Sainte, s’écrie à son tour saint Anselme,
Dieu vous a placée si haut dans sa faveur que vous pouvez obtenir à vos dévots serviteurs toutes les grâces possibles ; – car votre
protection est toute-puissante, assure Côme de Jérusalem. " " Oui, Marie est toute-puissante, reprend Richard de Saint-Laurent,
puisque, suivant toutes les lois, la Reine doit partager toutes les prérogatives du Roi ; et comme le Roi du ciel peut tout, il a
communiqué son omnipotence à sa Mère. " De là saint Antonin conclut que Dieu a placé l’Église entière non seulement sous les
auspices, mais encore sous le pouvoir de Marie.
Ainsi, la Mère devant avoir le même pouvoir que son Fils, le pouvoir sans bornes de Jésus-Christ a dû rendre Marie toute-puissante ;
mais il reste toujours vrai que le Fils est tout-puissant par nature, et la Mère seulement par grâce. Or, cela se vérifie en la manière que
nous avons indiquée plus haut : le Fils ne refuse à la Mère absolument rien de ce qu’elle lui demande. Sainte Brigitte en fut assurée par
révélation ; elle entendit Jésus qui disait à Marie : " Ma Mère, vous savez combien je vous aime ; demandez-moi donc tout ce qu’il vous
plaît ; je ne saurais manquer de faire droit à une requête quelconque de votre part :. Et il lui déclara l’admirable motif de cette promesse
: " Quand vous étiez sur la terre, jamais vous ne vous êtes refusée à faire quoi que ce fût pour mon amour ; il est donc juste que moi,
maintenant assis dans le ciel, je ne me refuse jamais à faire ce dont vous me priez ". Quand donc nous donnons à Marie le titre de
toute-puissante, il faut l’entendre dans le sens possible à une créature, laquelle n’est point capable d’une perfection divine ; Marie est
toute-puissante en ce sens que, par le moyen de la prière, elle obtient tout ce qu’elle veut.
C’est donc avec raison , ô notre grande Avocate, que saint Bernard vous dit : " Vous n’avec qu’à vouloir, et tout se fera ", si vous
voulez élever à une haute sainteté le pécheur le plus désespéré, il ne tient qu’à vous. – Saint Anselme vous parle de même : " Dites que
vous voulez notre salut, et nous serons infailliblement sauvés ". Et le bienheureux Albert le Grand en conclut qu’on doit vous prier de
vouloir, puisque tout ce que vous voulez, se fait nécessairement.
Encouragé par la pensée de cette souveraine puissance de Marie, saint Pierre Damien implorait sa pitié en ces termes : " Que votre
bonté et le pouvoir dont vous disposez, vous engagent à nous secourir : plus vous êtes puissante, plus vous devez être
miséricordieuse. " Oui, ô Marie, oui, ô notre Avocate, votre coeur si tendre est incapable de voir les malheureux sans compatir à leur
maux ; et votre crédit auprès de Dieu est assez grand pour sauver toute âme dont vous prenez la défense ; ah ! ne dédaignez pas de
plaider la cause des misérables que vous voyez à vos pieds, et qui mettent en vous toutes leurs espérances. Si nos prières ne vous
touchent point, suivez au moins l’impulsion de votre bon coeur, faites usage de cette toute-puissance dont le Seigneur vous a revêtue,
afin qu’étant plus à même de nous faire du bien, vous en soyez plus miséricordieuse et mieux disposée à nous secourir. – Or, il en est
bien ainsi, car, au témoignage de saint Bernard, Marie est immensément riche en puissance et en miséricorde, à sa puissante charité
répond la tendre compassion qui la porte à nous venir en aide, et elle ne cesse de nous le prouver par les effets.
Dès le même temps que Marie vivait sur la terre, son unique pensée, après la gloire de Dieu, était de secourir les malheureux. Elle
jouissait dès lors du privilège de faire agréer et exaucer toutes ses requêtes ; nous le savons par ce qui se passa aux noces de Cana en
Galilée. Le vin étant venu à manquer, la sainte Vierge fut touchée de l’affliction et de la confusion de ses hôtes, et elle pria son divin
Fils de les consoler par un miracle Le vin manque, lui dit-elle. Jésus lui répondit : " Femme, que vous importe à vous et que m’importe
à moi si le vin manque ? il ne me convient pas de faire aucun miracle maintenant ; le temps n’en est pas encore venu ; " ce temps sera
celui de ma prédication lorsque je devrai confirmer ma doctrine par des prodiges. Par cette réponse, Notre-Seigneur semblait opposer
un refus à la prière de sa Mère ; et pourtant, remarquons-le bien, Marie agit et parle tout comme si la grâce sollicitée lui eût été
accordée. Elle dit aux gens de la maison de faire ce que son Fils ordonnerait, leur promettant qu’ils seraient consolés. Et, en effet, pour
complaire à sa Mère, Jésus fit emplir d’eau de grandes urnes, et puis changea cette eau en un excellent vin.
Mais, direz-vous, si le temps fixé pour les miracles était celui de la prédication, comment ce premier miracle a-t-il pu se faire alors,
contrairement au décret divin ? Il est vrai qu’à parler d’une manière générale, le temps des miracles n’était pas encore arrivé ; mais, de
toute éternité, Dieu avait arrêté, par un autre décret général, que jamais aucune supplique de Marie ne serait rejetée. La glorieuse Vierge
connaissait bien son privilège, aussi ne tint-elle nul compte du refus apparent de son Fils, mais elle fît comme si la grâce lui eût été
accordée. Ainsi l’a entendu saint Jean Chrysostôme. Sur ces paroles : Femme, que vous importe à vous, et que m’importe à moi?, il
remarque que, nonobstant une réponse si peu encourageante, Jésus ne laissai pas, pour honorer sa Mère, d’obtempérer à sa demande.
Cette explication est ainsi confirmée par saint Thomas : " Par ces mots : Mon heure n’est pas encore venue, le Seigneur voulut
témoigner qu’il eût refusé alors le miracle si tout autre le lui eût demandé ; mais parce que la solliciteuse était sa Mère, il le fit ". Tel est
aussi, selon Barrada, le sentiment de saint Cyrille, de saint Jérôme et de Jansenius de Gand.
En résumé, nulle créature ne saurait faire descendre sur nous, pauvres pécheurs, les divines miséricordes à l’égal de cette douce
Avocate, que Dieu se plaît à honorer, non seulement comme sa Servante chérie, mais encore comme sa véritable Mère. C’est là ce que
Guillaume de Paris disait à Marie elle-même : Il suffit à Marie de parler pour voir tous ses désirs accomplis par son Fils. Le Seigneur
dit à l’Épouse des Cantiques, laquelle est une figure de Marie : Vous qui habitez dans les jardins, nos amis écoutent ; faites-moi
entendre votre voix. – Ces amis, ce sont les saints ; lorsqu’ils sollicitent quelque grâce au profit de leurs clients, ils attendent que leur
Reine la demande à Dieu et l’obtienne ; car, nous l’avons démontré au Chapitre V, aucune grâce n’est accordée sans l’intervention de
Marie. Or, à quelle condition Marie obtient-elle les grâces ? à la seule condition de faire retnetir sa voix aux oreilles de Jésus, comme
lui-même l’y invite : Faites-moi entendre votre voix ; dès qu’elle parle, son Fils l’exauce. A propos du susdit passage des cantiques,
l’abbé Guillaume fait parler ainsi Jésus à Marie : " O vous qui habitez les jardins célestes, intercédez avec confiance pour qui il vous
plaira ; car je ne puis oublier que je suis votre Fils, au point d’avoir la pensée de refuser quelque chose à ma Mère ". " Pour l’obtenir,
ajoute un autre auteur, elle n’a qu’à prononcer un mot ; pour elle, être entendue de son Fils, c’est être exaucée ". Selon l’abbé Geoffroi,
quoique Marie obtienne, elle aussi, en priant, elle prie néanmoins avec une certaine autorité de Mère d’où nous devons tenir pour
indubitable qu’aucune de ses requêtes en notre faveur ne reste jamais sans effet.
Selon le récit de Valère Maxime, lorsque Coriolan tenait Rome assiégée, les prières de ses concitoyens et de ses amis ne purent le
décider à se retirer ; mais, lorsque sa mère Véturie se présenta devant lui, il lui fut impossible de résister, et il leva le siège sans aucun
retard. Or, les prières de la sainte Vierge sont bien plus efficaces que celles de Véturie, puisqu’elles s’adressent à un Fils bien plus
reconnaissant et plus affectionné envers sa Mère. D’après le Père Justin de Miéchovie, un seul soupir de Marie a plus de valeur auprès
de Dieu que les suffrages réunis de tous les saints. Et c’est mot pout mot ce que, contraint par l’ordre de saint Dominique, le démon
lui-même avoua un jour par la bouche d’un possédé.
A son tour, saint Antonin parle ainsi : " Pour Jésus, la prière de la bienheureuse Vierge est une sorte de commandement, comme étant
celle de sa Mère, et partant il ne saurait point ne l’exaucer. " Dans la même pensée, saint Germain tient à Marie elle-même ce langage
qui doit encourager les pécheurs à implorer la protection d’une si puissante avocate : " O Marie, cotre crédit auprès de Dieu est celui
d’une mère auprès de son Fils, et il n’est pas de si grand pécheur à qui vous n’obteniez le pardon. Que pourrait en effet vous refuser un
Dieu qui se plaît à contenter tous les désirs de sa vraie et immaculée Mère ?" Les saints du ciel ne pensent pas autrement. Sainte
Brigitte les entendit un jour qui disaient à la Vierge : " O notre Reine bénie, qu’y-a-t-il qui dépasse votre pouvoir ? Une chose voulue par
vous, est pour ainsi dire déjà faite ". C’est ce qu’exprime heureusement un vers bien connu :
Quod Deus imperio, tu prece, Virgo potes !
" Que le Seigneur commande, ou que ta voie le prie,
tout s’accomplit de même, ô puissante Marie ! "
Eh quoi ! s’écrie saint Augustin, c’est-ce pas chose digne de la bonté du Seigneur d’honorer ainsi sa Mère ? N’a-t-il pas déclaré qu’il
était venu en ce monde, non pour abroger, mais pour accomplir la loi, qui nous ordonne entre autres choses d’honorer nos parents ?
Selon saint Georges, archevêque de Nicomédie, une des fins que Jésus-Christ se propose en exauçant toutes les prières de sa Mère,
c’est d’acquitter en quelque sorte la dette qu’il a contractée envers Celle dont il a reçu l’être humain. Le martyr saint Méthode s’écriait
dans le même sens : " Réjouissez-vous, ô Marie, vous avez pour débiteur un Fils qui donne à tous et ne reçoit rien de personne. Nous
autres, nous sommes tous redevables à Dieu de tout ce que nous avons, puisque tout vient de lui ; mais Dieu lui-même vous est
redevable à vous, depuis qu’il a daigné prendre de vous la chair humaine. "
Sur quoi saint Augustin reprend : " Marie ayant mérité de donner au Verbe divin ce corps qui nous a servi de rançon et qui nous a
délivrés de la mort éternelle par son immolation, elle peut, mieux que tous les autres saints, nous aider dans l’affaire de notre salut. "
On lit également dans les oeuvres de saint Théophile, patriarche d’Alexandrie et contemporain de saint Jérôme : " Le Fils aime à être
prié par sa Mère, parce qu’il veut accorder par amour pour elle tout ce qu’il accorde de grâces, et reconnaître ainsi le service qu’elle lui
a rendu en le revêtant de la chair humaine ". Enfin, dans sa liturgie, l’Église grecque parle ainsi à la Vierge : " Vous pouvez nous sauver
tous, ô Marie, puisque vous êtes la Mère de Dieu ; l’autorité d’une Mère auprès de son fils donne à vos prières une valeur sans bornes.
Au souvenir de l’immense bienfait que le Seigneur accorda aux hommes quand il leur donna Marie pour avocate, saint Bonaventure lui
adresse à elle-même ces paroles qui nous serviront de conclusion : " O immense, ô adorable bonté de notre Dieu, qui a daigné donner à
des malheureux, à des criminels, une avocate telle que vous, ô notre Reine, qui pouvez, par votre intercession, leur obtenir tout ce qu’il
vous plaît ! O ineffable clémence de notre Dieu, qui, ne voulant pas que nous ayons trop à redouter la sentence qu’il doit prononcer
dans notre cause, nous a destiné pour avocate sa propre Mère et la Maîtresse de la grâce !"
EXEMPLE
Le père Razzi, camaldule, rapporte l’histoire d’un jeune homme, qui, par suite de la mort de son père, avait été envoyé par sa mère à la
cour d’un prince. En lui faisant ses adieux, sa mère, qui était fort dévote à Marie, lui avait fait promettre de réciter chaque jour un Ave
Maria avec cette invocation : " Vierge bénie, assistez-moi à l’heure de ma mort ! " Arrivé à la cour, le jeune homme se livra bientôt au
vice avec un emportement qui obligean le prince de le congédier. Privé ainsi de tout moyen d’existence et ne sachant que devenir,
l’infortuné se mit à courir les grands chemins, et à rançonner et parfois assassiner les voyageurs, sans toutefois renoncer à sa coutume
de se recommander selon le conseil de sa mère, à la très sainte Vierge. Il finit par être arrêté et condamné à mort. La veille du jour
marqué pour son supplice, il pleurait amèrement dans sa prison, en pensant à son déshonneur, à la douleur de sa mère, à la mort qu’il
devait subir.
Voyant son extrême abattement, et voulant en profiter, tout à coup le démon lui apparaît sous la forme d’un beau jeune homme, et lui
romet de l’arracher à la mort et de le tirer de sa prison, sous certaines conditions qu’il lui fera connaître. Le condamné se montrer prêt
à tout. Jetant alors le masque : " Je suis le démon, dit le fantôme au jeune homme ; je suis venu pour t’aider ; mais d’abord il faut que
tu renies Jésus-Christ et les saints sacrements. " Le malheureux y consentit. – " Maintenant, ajoute le malin esprit, il faut encore renier
la Vierge Marie et renoncer à sa protection. – Oh ! pour cela, réplique le jeune homme, je ne le ferai jamais ". Et aussitôt, s’adressant à
Marie, il répète la prière qu’il a apprise de sa mère : " Vierge bénie, assistez-moi à l’heure de ma mort " ! A ces mots, le démon
disparut,
Mais le jeune homme demeura excessivement affligé du crime énorme qu’il avait commis en reniant Jésus-Christ. Il eut cependant
recours à la sainte Vierge, et elle lui obtint une grande douleur de tous ses péchés, qu’il confessa avec de vifs sentiments de contrition
et en versant un torrent de larmes. Comme il se rendait au lieu du supplice, il rencontra en chemin une statue de Marie, et il la salua en
récitant sa prière accoutumée : " Vierge bénie, assistez-moi à l’heure de ma mort " Il vit alors, et tous les assistants purent voir que la
statue inclinait la tête comme pour lui rendre le salut. Vivement ému, il demanda qu’on lui permît de baiser les pieds de la statue, par un
nouveau prodige, celle-ci étendit le bras, saisit le condamné par la main, et le retint avec tant de force qu’il fut impossible de l’arracher
de là. A cette vue, tous les spectateurs de crier : " Grâce ! grâce ! " et la grâce fut accordée. Revenu ensuite dans son pays, ce jeune
homme y mena une vie exemplaire, et se montra toujours dévoué à la bienheureuse Vierge, qui l’avait délivré de la mort temporelle et
de la mort éternelle.
PRIÈRE
Auguste Mère de Dieu, je vous dirai avec saint Bernard : " Votre divin Fils vous écoute, et il est disposé à vous accorder tout ce que
vous lui demanderez ; parlez donc, ô Marie, notre avocate, parlez pour nous, misérables que nous sommes ". Daignez ne pas l’oublier
: ce n’est pas pour votre seul avantage, mais pour le nôtre aussi, que vous avez été élevée à une si haute dignité et inverstie d’une si
grande puissance. Si un Dieu a voulu se rendre votre débiteur en prenant de vous la nature humaine, ce fut afin que vous puissiez, à
votre gré, faire part aux pauvres pécheurs des trésors de la miséricorde divine.
Nous sommes vos serviteurs, nous nous sommes consacrés d’une manière spéciale à votre culte ; je parle ainsi parce que j’ai la
confiance d’être de ce nombre ; nous nous faisons gloire de vivre sous votre protection ; si vous faites du bien à tous, même à ceux
qui ne vous connaissent pas ou qui négligent de vous honorer, à ceux même qui vous outragent et vous blasphèment, combien plus ne
devons-nous pas espérer de votre bonté, qui va cherchant les malheureux pour les soulager, nous qui vous honorons, qui vous aimons,
et qui nous confions en vous ! Nous sommes de grands pécheurs ; mais Dieu vous a enrichie d’une bonté et d’une puissance bien
au-dessus de toutes nos iniquités. Vous pouvez nous sauver, vous le voulez ; et nous, de notre côté, nous voulons attendre de vous
notre salut avec d’autant plus de confiance que nous en sommes plus indignes, afin de vous glorifier davantage dans le ciel, quand
nous y entrerons par votre intercession.
O Mère de miséricorde, nous vous présentons nos âmes, autrefois belles, lavées qu’elles étaient dans le sang de Jésus-Christ, mais
qu’ensuite nous avons horriblement souillées par le péché ; nous vous les présentons, afin que vous pensiez à les purifier.
Obtenez-nous un sincère amendement ; obtenez-nous l’amour de Dieu, la persévérance, le paradis. Nous vous demandons de grandes
choses, mais, quoi ! n’êtes-vous pas assez puissante pour nous les obtenir ? dépassent-elles les bornes de l’amour dont vous êtes l’objet
de la part de Dieu ? Il vous suffit d’ouvrir la bouche et de prier votre divin Fils ; il ne vous refuse rien. Priez donc, ô Marie, priez
pour nous, priez, et vous serez certainement exaucée, et nous serons infailliblement sauvés.