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Catéchisme de lEglise Catholique
DEUXIEME PARTIE LA CELEBRATION DU MYSTERE CHRETIEN |
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PREMIERE SECTION LÉCONOMIE SACRAMENTELLE |
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CHAPITRE PREMIER LE MYSTERE PASCAL DANS LE TEMPS DE ÉGLISE |
Article 1 LA LITURGIE UVRE DE LA SAINTE TRINITE |
I. Le Père, Source et Fin de la Liturgie |
II. Luvre du Christ dans la liturgie |
III. LEsprit Saint et lÉglise dans la liturgie |
EN BREF |
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Article 2 LE MYSTERE PASCAL DANS LES SACREMENTS DE ÉGLISE |
I. Les sacrements du Christ |
II. Les sacrements de lÉglise |
III. Les sacrements de la foi |
IV. Sacrements du salut |
V. Les sacrements de la vie éternelle |
EN BREF |
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CHAPITRE DEUXIEME LA CELEBRATION SACRAMENTELLE DU MYSTERE PASCAL |
Article 1 CELEBRER LA LITURGIE DE ÉGLISE |
I. Qui célèbre ? |
II Comment célébrer |
III Quand célébrer ? |
IV. Où célébrer ? |
EN BREF |
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Article 2 DIVERSITE LITURGIQUE ET UNITE DU MYSTERE |
EN BREF |
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DEUXIÈME SECTION LES SEPT SACREMENTS DE ÉGLISE |
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CHAPITRE PREMIER LES SACREMENTS DE LINITIATION CHRETIENNE
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Article 1 LE SACREMENT DU BAPTEME |
I. Comment est appelé ce sacrement ? |
II. Le Baptême dans léconomie du salut |
III. Comment est célébré le sacrement du baptême ? |
IV. Qui peut recevoir le baptême ? |
V. Qui peut baptiser ? |
VI. La nécessité du baptême |
VII. La grâce du baptême |
EN BREF |
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Article 2 LE SACREMENT DE LA CONFIRMATION |
I. La confirmation dans léconomie du salut |
II. Les signes et le rite de la Confirmation |
III. Les effets de la Confirmation |
IV. Qui peut recevoir ce sacrement ? |
V. Le ministre de la Confirmation |
EN BREF |
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Article 3 LE SACREMENT DE LEUCHARISTIE |
I. LEucharistie source et sommet de la vie ecclésiale |
II. Comment est appelé ce sacrement ? |
III. Leucharistie dans léconomie du salut |
IV. La célébration liturgique de leucharistie |
V. Le sacrifice sacramentel : action de grâce, mémorial, présence |
VI. Le banquet pascal |
VII. Leucharistie " pignus futurae gloriae |
EN BREF |
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CHAPITRE DEUXIEME LES SACREMENTS DE GUERISON
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Article 4 Le sacrement de Pénitence et de Réconciliation |
I. Comment est appelé ce sacrement ? |
II. Pourquoi un sacrement de la réconciliation après le Baptême ? |
III. La conversion des baptisés |
IV. La pénitence intérieure |
V. Les multiples formes de la pénitence dans la vie chrétienne |
VI. Le sacrement de la pénitence et de la réconciliation |
VII. Les actes du pénitent |
VIII. Le ministre de ce sacrement |
IX. Les effets de ce sacrement |
X. Les indulgences |
XI. La célébration du sacrement de pénitence |
EN BREF |
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Article 5 LOnction des malades |
I. Ses fondements dans lEconomie du Salut |
II. Qui reçoit et qui administre ce sacrement ? |
IV. Les effets de la célébration de ce sacrement |
V. Le Viatique, dernier sacrement du chrétien |
EN BREF |
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CHAPITRE TROISIEME LES SACREMENTS DU SERVICE DE LA COMMUNION
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Article 6 LE SACREMENT DE LORDRE |
I. Pourquoi ce nom de sacrement de lordre ? |
II. Le sacrement de lOrdre dans léconomie du salut |
III. Les trois degrés du sacrement de lordre |
IV. La célébration de ce sacrement |
V. Qui peut conférer ce sacrement ? |
VI. Qui peut recevoir ce sacrement ? |
VII. Les effets du sacrement de lOrdre |
EN BREF |
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Article 7 LE SACREMENT DU MARIAGE |
I. Le Mariage dans le dessein de Dieu |
II. La célébration du mariage |
III. Le consentement matrimonial |
IV. Les effets du sacrement du Mariage |
V. Les biens et les exigences de lamour conjugal |
VI. LÉglise domestique |
EN BREF |
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CHAPITRE QUATRIEME LES AUTRES CELEBRATIONS LITURGIQUES |
Article 1 LES SACRAMENTAUX |
EN BREF |
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Article 2 LES FUNERAILLES CHRETIENNES |
I. La dernière Pâque du Chrétien |
II. La célébration des funérailles |
Deuxième Partie
La célébration du mystère chrétien
Pourquoi la Liturgie ?
1066 Dans le Symbole de la foi, lÉglise confesse le mystère de la Trinité Sainte et son " dessein bienveillant " (Ep 1, 9) sur toute la création : le Père accomplit le " mystère de sa volonté " en donnant son Fils Bien-aimé et son Esprit Saint pour le salut du monde et pour la gloire de son Nom. Tel est le Mystère du Christ (cf. Ep 3, 4), révélé et réalisé dans lhistoire selon un plan, une " disposition " sagement ordonnée que S. Paul appelle " lÉconomie du Mystère " (Ep 3, 9) et que la tradition patristique appellera " lÉconomie du Verbe incarné " ou " lÉconomie du salut ".
1067 " Cette uvre de la rédemption des hommes et de la parfaite glorification de Dieu, à quoi avaient préludé les grandes uvres divines dans le peuple de lAncien Testament, le Christ Seigneur la accomplie principalement par le mystère pascal de sa bienheureuse passion, de sa résurrection du séjour des morts et de sa glorieuse ascension ; mystère pascal par lequel en mourant il a détruit notre mort, et en ressuscitant il a restauré la vie. Car cest du côté du Christ endormi sur la croix quest né ladmirable sacrement de lÉglise tout entière " (SC 5). Cest pourquoi, dans la Liturgie, lÉglise célèbre principalement le Mystère pascal par lequel le Christ a accompli luvre de notre salut.
1068 Cest ce Mystère du Christ que lÉglise annonce et célèbre dans sa Liturgie, afin que les fidèles en vivent et en témoignent dans le monde :
En effet, la liturgie, par laquelle, surtout dans le divin sacrifice de lEucharistie, " sexerce luvre de notre rédemption ", contribue au plus haut point à ce que les fidèles, par leur vie, expriment et manifestent aux autres le Mystère du Christ et la nature authentique de la véritable Église (SC 2).
Que signifie le mot liturgie ?
1069 Le mot " Liturgie " signifie originellement " uvre publique ", " service de la part de/et en faveur du peuple ". Dans la tradition chrétienne il veut signifier que le Peuple de Dieu prend part à " luvre de Dieu " (cf. Jn 17, 4). Par la Liturgie le Christ, notre Rédempteur et Grand Prêtre, continue dans son Église, avec elle et par elle, luvre de notre rédemption :
1070 Le mot " Liturgie " dans le Nouveau Testament est employé pour désigner non seulement la célébration du culte divin (cf. Ac 13, 2 ; Lc 1, 23), mais aussi lannonce de lÉvangile (cf. Rm 15, 16 ; Ph 2, 14-17 et 2, 30) et la charité en acte (cf. Rm 15, 27 ; 2 Co 9, 12 ; Ph 2, 25). Dans toutes ces situations, il sagit du service de Dieu et des hommes. Dans la célébration liturgique, lÉglise est servante, à limage de son Seigneur, lunique " Liturge " (cf. He 8, 2 et 6), participant à son sacerdoce (culte) prophétique (annonce) et royale (service de charité) :
Cest donc à juste titre que la liturgie est considérée comme lexercice de la fonction sacerdotale de Jésus-Christ, exercice dans lequel la sanctification de lhomme est signifiée par des signes sensibles et est réalisée dune manière propre à chacun deux, dans lequel le culte public intégral est exercé par le Corps mystique de Jésus-Christ, cest-à-dire par le Chef et par ses membres. Par suite, toute célébration liturgique, en tant quuvre du Christ prêtre et de son Corps qui est lÉglise, est laction sacrée par excellence dont nulle autre action de lÉglise ne peut atteindre lefficacité au même titre et au même degré (SC 7).
La Liturgiecomme source de Vie
1071 uvre du Christ, la Liturgie est aussi une action de son Église. Elle réalise et manifeste lÉglise comme signe visible de la Communion de Dieu et des hommes par le Christ. Elle engage les fidèles dans la Vie nouvelle de la communauté. Elle implique une participation " consciente, active et fructueuse " de tous (SC 11).
1072 " La Liturgie népuise pas tout lagir ecclésial " (SC 9) : elle doit être précédée par lévangélisation, la foi et la conversion ; elle peut alors porter ses fruits dans la vie des fidèles : la Vie nouvelle selon lEsprit, lengagement dans la mission de lÉglise et le service de son Unité.
Prière et Liturgie
1073 La Liturgie est aussi participation à la prière du Christ, adressée au Père dans lEsprit Saint. En elle toute prière chrétienne trouve sa source et son terme. Par la Liturgie, lhomme intérieur est enraciné et fondé (cf. Ep 3, 16-17) dans " le grand amour dont le Père nous a aimés " (Ep 2, 4) dans son Fils Bien-aimé. Cest la même " merveille de Dieu " qui est vécu et intériorisé par toute prière, " en tout temps, dans lEsprit " (Ep 6, 18).
Catéchèse et Liturgie
1074 " La Liturgie est le sommet auquel tend laction de lÉglise, et en même temps la source doù découle toute sa vigueur " (SC 10). Elle est donc le lieu privilégié de la catéchèse du Peuple de Dieu. " La catéchèse est intrinsèquement reliée à toute laction liturgique et sacramentelle, car cest dans les Sacrements, et surtout dans lEucharistie, que le Christ Jésus agit en plénitude pour la transformation des hommes " (Jean-Paul II, CT 23).
1075 La catéchèse liturgique vise à introduire dans le Mystère du Christ (elle est " mystagogie "), en procédant du visible à linvisible, du signifiant au signifié, des " sacrements " aux " mystères ". Une telle catéchèse est du ressort des catéchismes locaux et régionaux. Le présent catéchisme, qui se veut au service de toute lÉglise, dans la diversité de ses rites et de ses cultures (cf. SC 3-4), présentera ce qui est fondamental et commun à toute lÉglise concernant la Liturgie comme mystère et comme célébration (première Section) puis les sept sacrements et les sacramentaux (deuxième Section).
Première Section
LÉCONOMIE sacramentelle
1076 Le jour de la Pentecôte, par leffusion de lEsprit Saint, lÉglise est manifestée au monde (cf. SC 6 ; LG 2). Le don de lEsprit inaugure un temps nouveau dans la " dispensation du Mystère " : le temps de lÉglise, durant lequel le Christ manifeste, rend présent et communique son uvre de salut par la Liturgie de Son Église, " jusquà ce quIl vienne " (1 Co 11, 26). Durant ce temps de lÉglise, le Christ vit et agit désormais dans Son Église et avec elle dune manière nouvelle, propre à ce temps nouveau. Il agit par les Sacrements ; cest cela que la Tradition commune de lOrient et de lOccident appelle " lÉconomie sacramentelle " ; celle-ci consiste en la communication (ou " dispensation ") des fruits du Mystère pascal du Christ dans la célébration de la liturgie " sacramentelle " de lÉglise.
Cest pourquoi il importe de mettre dabord en lumière cette " dispensation sacramentelle " (Chapitre premier). Ainsi apparaîtront plus clairement la nature et les aspects essentiels de la célébration liturgique (Chapitre deuxième).
Chapitre premier
Le mystère pascal dans le temps de ÉGLISE
Article 1
La Liturgie uvre de la Sainte Trinité
I. Le Père, Source et Fin dela Liturgie
1077 " Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux Cieux, dans le Christ. Cest ainsi quil nous a élus en lui, dès avant la fondation du monde, pour être saints et immaculés en sa présence, dans lamour, déterminant davance que nous serions pour Lui des fils adoptifs par Jésus-Christ. Tel fut le bon plaisir de sa volonté, à la louange de gloire de sa grâce, dont Il nous a gratifiés dans le Bien-aimé " (Ep 1, 3-6).
1078 Bénir est une action divine qui donne la vie et dont le Père est la source. Sa bénédiction est à la fois parole et don (bene-dictio, eu-logia). Appliquée à lhomme, ce terme signifiera ladoration et la remise à son Créateur dans laction de grâce.
1079 Du commencement jusquà la consommation des temps, toute luvre de Dieu est bénédiction. Du poème liturgique de la première création aux cantiques de la Jérusalem céleste, les auteurs inspirés annoncent le Dessein du salut comme une immense bénédiction divine.
1080 Dès le commencement, Dieu bénit les êtres vivants, spécialement lhomme et la femme. Lalliance avec Noé et avec tous les êtres animés renouvelle cette bénédiction de fécondité, malgré le péché de lhomme par lequel le sol est " maudit ". Mais cest à partir dAbraham que la bénédiction divine pénètre lhistoire des hommes, qui allait vers la mort, pour la faire remonter à la vie, à sa source : par la foi du " père des croyants " qui accueille la bénédiction est inaugurée lhistoire du salut.
1081 Les bénédictions divines se manifestent en événements étonnants et sauveurs : la naissance dIsaac, la sortie dÉgypte (Pâque et Exode), le don de la Terre promise, lélection de David, la Présence de Dieu dans le temple, lexil purificateur et le retour dun " petit Reste ". La Loi, les Prophètes et les Psaumes qui tissent la liturgie du Peuple élu, à la fois rappellent ces bénédictions divines et y répondent par les bénédictions de louange et daction de grâce.
1082 Dans la liturgie de lÉglise, la bénédiction divine est pleinement révélée et communiquée : le Père est reconnu et adoré comme la Source et la Fin de toutes les bénédictions de la création et du salut ; dans Son Verbe, incarné, mort et ressuscité pour nous, il nous comble de Ses bénédictions, et par Lui il répand en nos curs le Don qui contient tous les dons : lEsprit Saint.
1083 On comprend alors la double dimension de la Liturgie chrétienne comme réponse de foi et damour aux " bénédictions spirituelles " dont le Père nous gratifie. Dune part, lÉglise, unie à son Seigneur et " sous laction de lEsprit Saint " (Lc 10, 21), bénit le Père " pour son Don ineffable " (2 Co 9, 15) par ladoration, la louange et laction de grâces. Dautre part, et jusquà la consommation du Dessein de Dieu, lÉglise ne cesse doffrir au Père " loffrande de ses propres dons " et de limplorer denvoyer lEsprit Saint sur celle-ci, sur elle-même, sur les fidèles et sur le monde entier, afin que par la communion à la mort et à la résurrection du Christ-Prêtre et par la puissance de lEsprit, ces bénédictions divines portent des fruits de vie " à la louange de gloire de sa grâce " (Ep 1, 6).
II. Luvre du Christ dans la liturgie
Le Christ glorifié…
1084 " Assis à la droite du Père " et répandant lEsprit Saint en son Corps qui est lÉglise, le Christ agit désormais par les sacrements, institués par Lui pour communiquer sa grâce. Les sacrements sont des signes sensibles (paroles et actions), accessibles à notre humanité actuelle. Ils réalisent efficacement la grâce quils signifient en vertu de laction du Christ et par la puissance de lEsprit Saint.
1085 Dans la Liturgie de lÉglise le Christ signifie et réalise principalement son Mystère pascal. Durant sa vie terrestre, Jésus annonçait par son enseignement et anticipait par ses actes son Mystère pascal. Quand son Heure est venue (cf. Jn 13, 1 ; 17, 1), il vit lunique événement de lhistoire qui ne passe pas : Jésus meurt, est enseveli, ressuscite dentre les morts et est assis à la droite du Père " une fois pour toutes " (Rm 6, 10 ; He 7, 27 ; 9, 12). Cest un événement réel, advenu dans notre histoire, mais il est unique : tous les autres événements de lhistoire arrivent une fois, puis ils passent, engloutis dans le passé. Le Mystère pascal du Christ, par contre, ne peut pas rester seulement dans le passé, puisque par sa Mort il a détruit la mort, et que tout ce que le Christ est, et tout ce quIl a fait et souffert pour tous les hommes, participe de léternité divine et surplombe ainsi tous les temps et y est rendu présent. LÉvénement de la Croix et de la Résurrection demeure et attire tout vers la Vie.
… dès lÉglise des Apôtres …
1086 " De même que le Christ fut envoyé par le Père, ainsi lui-même envoya ses apôtres, remplis de lEsprit Saint, non seulement pour que, prêchant lÉvangile à toute créature, ils annoncent que le Fils de Dieu, par sa mort et par sa résurrection, nous a délivrés du pouvoir de Satan ainsi que de la mort, et nous a transférés dans le Royaume de son Père, mais aussi afin quils exercent cette uvre de salut quils annonçaient, par le Sacrifice et les sacrements autour desquels gravite toute la vie liturgique " (SC 6).
1087 Ainsi, le Christ ressuscité, en donnant lEsprit Saint aux Apôtres, leur confie son pouvoir de sanctification (cf. Jn 20, 21-23) : ils deviennent signes sacramentels du Christ. Par la puissance du même Esprit Saint, ils confient ce pouvoir à leurs successeurs. Cette " succession apostolique " structure toute la vie liturgique de lÉglise ; elle est elle-même sacramentelle, transmise par le sacrement de lOrdre.
… est présent dans la Liturgie terrestre …
1088 " Pour laccomplissement dune si grande uvre " la dispensation ou communication de son uvre de salut, " le Christ est toujours là auprès de son Église, surtout dans les actions liturgiques. Il est là présent dans le Sacrifice de la Messe, et dans la personne du ministre, le même offrant maintenant par le ministère des prêtres qui soffrit alors Lui-même sur la Croix et, au plus haut point, sous les espèces eucharistiques. Il est là présent par sa vertu dans les sacrements, au point que lorsque quelquun baptise, cest le Christ Lui-même qui baptise. Il est là présent dans sa parole, car cest Lui qui parle tandis quon lit dans lÉglise les Saintes Écritures. Enfin il est là présent lorsque lÉglise prie et chante les psaumes, Lui qui a promis : Là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis là, au milieu deux (Mt 18, 20) " (SC 7).
1089 " Pour laccomplissement de cette grande uvre par laquelle Dieu est parfaitement glorifié et les hommes sanctifiés, le Christ sassocie toujours lÉglise, Son Épouse bien-aimée, qui Linvoque comme son Seigneur et qui passe par Lui pour rendre son culte au Père Éternel " (SC 7).
… qui participe à la Liturgie céleste
1090 " Dans la liturgie terrestre nous participons par un avant-goût à cette liturgie céleste qui se célèbre dans la sainte cité de Jérusalem à laquelle nous tendons comme des voyageurs, où le Christ siège à la droite de Dieu, comme ministre du sanctuaire et du vrai tabernacle ; avec toute larmée de la milice céleste, nous chantons au Seigneur lhymne de gloire ; en vénérant la mémoire des saints, nous espérons partager leur société ; nous attendons comme Sauveur notre Seigneur Jésus Christ, jusquà ce que lui-même se manifeste, lui qui est notre vie, et alors nous serons manifestés avec lui dans la gloire " (SC 8 ; cf. LG 50).
III. LEsprit Saint et lÉglise dans la liturgie
1091 Dans la Liturgie lEsprit Saint est le pédagogue de la foi du Peuple de Dieu, lartisan des " chefs-duvre de Dieu " que sont les sacrements de la Nouvelle Alliance. Le désir et luvre de lEsprit au cur de lÉglise est que nous vivions de la vie du Christ ressuscité. Quand il rencontre en nous la réponse de foi quil a suscitée, il se réalise une véritable coopération. Par elle, la Liturgie devient luvre commune de lEsprit Saint et de lÉglise.
1092 Dans cette dispensation sacramentelle du mystère du Christ, lEsprit Saint agit de la même manière que dans les autres temps de lÉconomie du salut : il prépare lÉglise à rencontrer son Seigneur ; il rappelle et manifeste le Christ à la foi de lassemblée ; il rend présent et actualise le mystère du Christ par sa puissance transformante ; enfin, lEsprit de Communion unit lÉglise à la vie et à la mission du Christ.
LEsprit Saint prépare à accueillir le Christ
1093 LEsprit Saint accomplit dans lÉconomie sacramentelle les figures de lAncienne Alliance. Puisque lÉglise du Christ était " admirablement préparée dans lhistoire du peuple dIsraël et dans lAncienne Alliance " (LG 2), la Liturgie de lÉglise garde comme une partie intégrante et irremplaçable, en les faisant siens, des éléments du culte de lAncienne Alliance :
principalement la lecture de lAncien Testament ;
la prière des Psaumes ;
et surtout la mémoire des événements sauveurs et des réalités significatives qui ont trouvé leur accomplissement dans le mystère du Christ (la Promesse et lAlliance, lExode et la Pâque, le Royaume et le Temple, lExil et le Retour).
1094 Cest sur cette harmonie des deux Testaments (cf. DV 14-16) que sarticule la catéchèse pascale du Seigneur (cf. Lc 24, 13-49), puis celle des Apôtres et des Pères de lÉglise. Cette catéchèse dévoile ce qui demeurait caché sous la lettre de lAncien Testament : le mystère du Christ. Elle est appelée " typologique " parce quelle révèle la nouveauté du Christ à partir des " figures " (types) qui lannonçaient dans les faits, les paroles, et les symboles de la première Alliance. Par cette relecture dans lEsprit de Vérité à partir du Christ, les figures sont dévoilés (cf. 2 Co 3, 14-16). Ainsi, le déluge et larche de Noé préfiguraient le salut par le Baptême (cf. 1 P 3, 21), la Nuée et la traversée de la Mer Rouge également, et leau du rocher était la figure des dons spirituels du Christ (cf. 1 Co 10, 1-6) ; la manne au désert préfigurait lEucharistie, " le vrai Pain du Ciel " (Jn 6, 48).
1095 Cest pourquoi lÉglise, spécialement lors des temps de lAvent, du Carême et surtout dans la nuit de Pâques, relit et revit tous ces grands événements de lhistoire du salut dans l" aujourdhui " de sa Liturgie. Mais cela exige aussi que la catéchèse aide les fidèles à souvrir à cette intelligence " spirituelle " de lÉconomie du salut, telle que la Liturgie de lÉglise la manifeste et nous la fait vivre.
1096 Liturgie juive et liturgie chrétienne. Une meilleure connaissance de la foi et de la vie religieuse du peuple juif, telles quelles sont professées et vécues encore maintenant, peut aider à mieux comprendre certains aspects de la liturgie chrétienne. Pour les juifs et pour les chrétiens lÉcriture Sainte est une part essentielle de leurs liturgies : pour la proclamation de la Parole de Dieu, la réponse à cette Parole, la prière de louange et dintercession pour les vivants et les morts, le recours à la miséricorde divine. La liturgie de la Parole, dans sa structure propre, trouve son origine dans la prière juive. La prière des Heures et autres textes et formulaires liturgiques y ont leurs parallèles, ainsi que les formules mêmes de nos prières les plus vénérables, dont le Pater. Les prières eucharistiques sinspirent aussi de modèles de la tradition juive. Le rapport entre liturgie juive et liturgie chrétienne, mais aussi la différence de leurs contenus, sont particulièrement visibles dans les grandes fêtes de lannée liturgique, comme la Pâque. Les chrétiens et les juifs célèbrent la Pâque : Pâque de lhistoire, tendue vers lavenir chez les juifs ; Pâque accomplie dans la mort et la résurrection du Christ chez les chrétiens, bien que toujours en attente de la consommation définitive.
1097 Dans la Liturgiede la Nouvelle Alliance, toute action liturgique, spécialement la célébration de lEucharistie et des sacrements, est une rencontre entre le Christ et lÉglise. Lassemblée liturgique tient son unité de la " Communion de lEsprit Saint " qui rassemble les enfants de Dieu dans lunique Corps du Christ. Elle dépasse les affinités humaines, raciales, culturelles et sociales.
1098 LAssemblée doit se préparer à rencontrer son Seigneur, être " un peuple bien disposé ". Cette préparation des curs est luvre commune de lEsprit Saint et de lAssemblée, en particulier de ses ministres. La grâce de lEsprit Saint cherche à éveiller la foi, la conversion du cur et ladhésion à la volonté du Père. Ces dispositions sont présupposées à laccueil des autres grâces offertes dans la célébration elle-même et aux fruits de Vie nouvelle quelle est destinée à produire ensuite.
LEsprit Saint rappelle le Mystère du Christ
1099 LEsprit et lÉglise coopèrent à manifester le Christ et son uvre de salut dans la Liturgie. Principalement dans lEucharistie, et analogiquement dans les autres sacrements, la Liturgie est Mémorial du Mystère du salut. LEsprit Saint est la mémoire vivante de lÉglise (cf. Jn 14, 26).
1100 La Parolede Dieu. LEsprit Saint rappelle dabord à lassemblée liturgique le sens de lévénement du salut en donnant vie à la Parole de Dieu qui est annoncée pour être reçue et vécue :
Dans la célébration de la liturgie, la sainte Écriture a une importance extrême. Cest delle que sont tirés les textes que lon lit et que lhomélie explique, ainsi que les psaumes que lon chante ; cest sous son inspiration et dans son élan que les prières, les oraisons et les hymnes liturgiques ont jailli, et cest delle aussi que les actions et les symboles reçoivent leur signification (SC 24).
1101 Cest lEsprit Saint qui donne aux lecteurs et aux auditeurs selon les dispositions de leurs curs, lintelligence spirituelle de la Parole de Dieu. A travers les paroles, les actions et les symboles qui forment la trame dune célébration, Il met les fidèles et les ministres en relation vivante avec le Christ, Parole et Image du Père, afin quils puissent faire passer dans leur vie le sens de ce quils entendent, contemplent et font dans la célébration.
1102 " Cest la Parole du salut qui nourrit la foi dans le cur des chrétiens : cest elle qui donne naissance et croissance à la communion des chrétiens " (PO 4). Lannonce de la Parole de Dieu ne sarrête pas à un enseignement : elle appelle la réponse de foi, comme consentement et engagement, en vue de lAlliance entre Dieu et son peuple. Cest encore lEsprit Saint qui donne la grâce de la foi, la fortifie et la fait croître dans la communauté. Lassemblée liturgique est dabord Communion dans la foi.
1103 LAnamnèse. La célébration liturgique se réfère toujours aux interventions salvifiques de Dieu dans lhistoire. " LÉconomie de la révélation se fait par des actions et des paroles, étroitement liées entre elles… Les paroles proclament les uvres et font découvrir le mystère qui sy trouve contenu " (DV 2). Dans la Liturgie de la Parole lEsprit Saint " rappelle " à lAssemblée tout ce que le Christ a fait pour nous. Selon la nature des actions liturgiques et les traditions rituelles des Églises, une célébration " fait mémoire " des merveilles de Dieu dans une Anamnèse plus ou moins développée. LEsprit Saint, qui éveille ainsi la mémoire de lÉglise, suscite alors laction de grâces et la louange (Doxologie).
LEsprit Saint actualise le Mystère du Christ
1104 La Liturgie chrétienne non seulement rappelle les événements qui nous ont sauvés, elle les actualise, les rend présents. Le Mystère pascal du Christ est célébré, il nest pas répété ; ce sont les célébrations qui se répètent ; en chacune delle survient leffusion de lEsprit Saint qui actualise lunique Mystère.
1105 LÉpiclèse (" invocation-sur ") est lintercession en laquelle le prêtre supplie le Père denvoyer lEsprit Sanctificateur pour que les offrandes deviennent le corps et le sang du Christ et quen les recevant les fidèles deviennent eux-mêmes une vivante offrande à Dieu.
1106 Avec lAnamnèse, lÉpiclèse est au cur de chaque célébration sacramentelle, plus particulièrement de lEucharistie :
Tu demandes comment le pain devient Corps du Christ, et le vin … Sang du Christ ? Moi, je te dis : le Saint-Esprit fait irruption et accomplit cela qui surpasse toute parole et toute pensée… Quil te suffise dentendre que cest par le Saint-Esprit, de même que cest de la Sainte Vierge et par le Saint-Esprit que le Seigneur, par lui-même et en lui-même, assuma la chair (S. Jean Damascène, f. o. 4, 13 : PG 94, 1142A).
1107 La puissance transformante de lEsprit Saint dans la Liturgie hâte la venue du Royaume et la consommation du mystère du salut. Dans lattente et dans lespérance il nous fait réellement anticiper la communion plénière de la Trinité Sainte. Envoyé par le Père qui exauce lÉpiclèse de lÉglise, lEsprit donne la vie à ceux qui laccueillent, et constitue pour eux, dès maintenant, " les arrhes " de leur héritage (cf. Ep 1, 14 ; 2 Co 1, 22).
La communion de lEsprit Saint
1108 Le terme de la mission de lEsprit Saint dans toute action liturgique est de mettre en communion avec le Christ pour former son Corps. LEsprit Saint est comme la sève de la Vigne du Père qui porte son fruit dans les sarments (cf. Jn 15, 1-17 ; Ga 5, 22). Dans la Liturgie se réalise la coopération la plus intime de lEsprit Saint et de lÉglise. Lui, lEsprit de Communion, demeure indéfectiblement dans lÉglise, et cest pourquoi lÉglise est le grand sacrement de la Communion divine qui rassemble les enfants de Dieu dispersés. Le fruit de lEsprit dans la Liturgie est inséparablement Communion avec la Trinité Sainte et Communion fraternelle (cf. 1 Jn 1, 3-7).
1109 LÉpiclèse est aussi la prière pour le plein effet de la communion de lassemblée au mystère du Christ. " La grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, lamour de Dieu le Père et la communion du Saint-Esprit " (2 Co 13, 13) doit demeurer toujours avec nous et porter des fruits au delà de la célébration eucharistique. LÉglise prie donc le Père denvoyer lEsprit Saint pour quil fasse de la vie des fidèles une vivante offrande à Dieu par la transformation spirituelle à limage du Christ, le souci de lunité de lÉglise et la participation à sa mission par le témoignage et le service de la charité.
En bref
1110 Dans la liturgie de lÉglise Dieu le Père est béni et adoré comme la source de toutes les bénédictions de la création et du salut, dont Il nous a béni en son Fils, pour nous donner lEsprit de ladoption filiale.
1111 Luvre du Christ dans la Liturgie est sacramentelle parce que son Mystère de salut y est rendu présent par la puissance de son Esprit Saint ; parce que son Corps, qui est lÉglise, est comme le sacrement (signe et instrument) dans lequel lEsprit Saint dispense le Mystère du salut ; parce quà travers ses actions liturgiques, lÉglise pérégrinante participe déjà, en avant-goût, à la Liturgie céleste.
1112 La mission de lEsprit Saint dans la Liturgie de lÉglise est de préparer lAssemblée à rencontrer le Christ ; de rappeler et de manifester le Christ à la foi de lAssemblée ; de rendre présent et dactualiser luvre salvifique du Christ par sa puissance transformante et de faire fructifier le don de la Communion dans lÉglise.
Article 2
Le Mystère Pascal dans les Sacrements de ÉGLISE
1113 Toute la vie liturgique de lÉglise gravite autour du Sacrifice eucharistique et des sacrements (cf. SC 6). Il y a dans lÉglise sept sacrements : le Baptême, la Confirmation ou Chrismation, lEucharistie, la Pénitence, lOnction des malades, lOrdre, le Mariage (cf. DS 860 ; 1310 ; 1601). Dans cet Article, il sagit de ce qui est commun aux sept sacrements de lÉglise, du point de vue doctrinal. Ce qui leur est commun sous laspect de la célébration sera exposé au Chapitre II, et ce qui est propre à chacun deux fera lobjet de la Section II.
I. Les sacrements du Christ
1114 " Attachés à la doctrine des saintes Écritures, aux traditions apostoliques … et au sentiment unanime des Pères ", nous professons que " les sacrements de la Loi nouvelle ont tous été institués par notre Seigneur Jésus-Christ " (DS 1600-1601).
1115 Les paroles et les actions de Jésus durant sa vie cachée et son ministère publique étaient déjà salvifiques. Elles anticipaient la puissance de son mystère pascal. Elles annonçaient et préparaient ce quil allait donner à lÉglise lorsque tout serait accompli. Les mystères de la vie du Christ sont les fondements de ce que, désormais, par les ministres de son Église, le Christ dispense dans les sacrements, car " ce qui était visible en notre Sauveur est passé dans ses mystères " (S. Léon le Grand, serm. 74, 2 : PL 54, 398A).
1116 " Forces qui sortent " du Corps du Christ (cf. Lc 5, 17 ; 6, 19 ; 8, 46), toujours vivant et vivifiant, actions de lEsprit Saint à luvre dans son Corps qui est lÉglise, les sacrements sont " les chefs-duvre de Dieu " dans la nouvelle et éternelle Alliance.
II. Les sacrements de lÉglise
1117 Par lEsprit qui la conduit " dans la vérité tout entière " (Jn 16, 13), lÉglise a reconnu peu à peu ce trésor reçu du Christ et en a précisé la " dispensation ", comme elle la fait pour le canon des saintes Écritures et la doctrine de la foi, en fidèle intendante des mystères de Dieu (cf. Mt 13, 52 ; 1 Co 4, 1). Ainsi, lÉglise a discernée au cours des siècles que, parmi ses célébrations liturgiques il y en a sept qui sont, au sens propre du terme, des sacrements institués par le Seigneur
1118 Les sacrements sont " de lÉglise " en ce double sens quils sont " par elle " et " pour elle ". Ils sont " par lÉglise " car celle-ci est le sacrement de laction du Christ opérant en elle grâce à la mission de lEsprit Saint. Et ils sont " pour lÉglise ", ils sont ces " sacrements qui font lÉglise " (S. Augustin, civ. 22, 17 ; cf. S. Thomas dA., s. th. 3, 64, 2, ad 3), puisquils manifestent et communiquent aux hommes, surtout dans lEucharistie, le Mystère de la Communion du Dieu Amour, Un en trois Personnes.
1119 Formant avec le Christ-Tête " comme une unique personne mystique " (Pie XII, enc. " Mystici Corporis "), lÉglise agit dans les sacrements comme " communauté sacerdotale ", " organiquement structurée " (LG 11) : Par le Baptême et la Confirmation, le peuple sacerdotal est rendu apte à célébrer la Liturgie ; dautre part, certains fidèles, " revêtus dun Ordre sacré, sont établis au nom du Christ pour paître lÉglise par la parole et la grâce de Dieu " (LG 11).
1120 Le ministère ordonné ou sacerdoce ministériel (LG 10) est au service du sacerdoce baptismal . Il garantit que, dans les sacrements, cest bien le Christ qui agit par lEsprit Saint pour lÉglise. La mission de salut confiée par le Père à son Fils incarné est confiée aux Apôtres et par eux à leurs successeurs : ils reçoivent lEsprit de Jésus pour agir en son nom et en sa personne (cf. Jn 20, 21-23 ; Lc 24, 47 ; Mt 28, 18-20). Ainsi, le ministre ordonné est le lien sacramentel qui relie laction liturgique à ce quont dit et fait les Apôtres, et, par eux, à ce qua dit et fait le Christ, source et fondement des sacrements.
1121 Les trois sacrements du Baptême, de la Confirmation et de lOrdre confèrent, en plus de la grâce, un caractère sacramentel ou " sceau " par lequel le chrétien participe au sacerdoce du Christ et fait partie de lÉglise selon des états et des fonctions diverses. Cette configuration au Christ et à lÉglise, réalisé par lEsprit, est indélébile (Cc. Trente : DS 1609), elle demeure pour toujours dans le chrétien comme disposition positive pour la grâce, comme promesse et garantie de la protection divine et comme vocation au culte divin et au service de lÉglise. Ces sacrements ne peuvent donc jamais être réitérés.
III. Les sacrements de la foi
1122 Le Christ a envoyé ses Apôtres afin que " en son Nom, ils proclament à toutes les nations la conversion en vue de la rémission des péchés " (Lc 24, 47). " De toutes les nations faîtes des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit " (Mt 28, 19). La mission de baptiser, donc la mission sacramentelle, est impliquée dans la mission dévangéliser, parce que le sacrement est préparé par la Parole de Dieu et par la foi qui est consentement à cette Parole :
Le Peuple de Dieu est rassemblé dabord par la Parole du Dieu vivant… La proclamation de la Parole est indispensable au ministère sacramentel, puisquil sagit des sacrements de la foi et que celle-ci a besoin de la Parole pour naître et se nourrir (PO 4).
1123 " Les sacrements ont pour fin de sanctifier les hommes, dédifier le Corps du Christ, enfin de rendre le culte à Dieu ; mais, à titre de signes, ils ont aussi un rôle denseignement. Non seulement ils supposent la foi, mais encore, par les paroles et par les choses, ils la nourrissent, ils la fortifient, ils lexpriment ; cest pourquoi ils sont dits sacrements de la foi " (SC 59).
1124 La foi de lÉglise est antérieure à la foi du fidèle, qui est invité à y adhérer. Quand lÉglise célèbre les sacrements, elle confesse la foi reçue des Apôtres. De là, ladage ancien : "Lex orandi, lexcredendi " (ou : " Legemcredendi lex statuat supplicandi ", selon Prosper dAquitaine, ep. 217 : PL 45, 1031) [V siècle]). La loi de la prière est la loi de la foi, lÉglise croit comme elle prie. La Liturgie est un élément constituant de la sainte et vivante Tradition (cf. DV 8).
1125 Cest pourquoi aucun rite sacramentel ne peut être modifié ou manipulé au gré du ministre ou de la communauté. Même lautorité suprême dans lÉglise ne peut changer la liturgie à son gré, mais seulement dans lobéissance de la foi et dans le respect religieux du mystère de la liturgie.
1126 Par ailleurs, puisque les sacrements expriment et développent la Communion de foi dans lÉglise, la lexorandi est lun des critères essentiels du dialogue qui cherche à restaurer lunité des chrétiens (cf. UR 2 et 15).
IV. Sacrements du salut
1127 Célébrés dignement dans la foi, les sacrements confèrent la grâce quils signifient (cf. Cc. Trente : DS 1605 et 1606). Ils sont efficaces parce quen eux le Christ lui-même est à luvre : cest Lui qui baptise, cest Lui qui agit dans ses sacrements afin de communiquer la grâce que le sacrement signifie. Le Père exauce toujours la prière de lÉglise de son Fils qui, dans lépiclèse de chaque sacrement, exprime sa foi en la puissance de lEsprit. Comme le feu transforme en lui tout ce quil touche, lEsprit Saint transforme en Vie divine ce qui est soumis à sa puissance.
1128 Cest là le sens de laffirmation de lÉglise (cf. Cc. Trente : DS 1608) : les sacrements agissent ex opere operato (littéralement : " par le fait même que laction est accomplie "), cest-à-dire en vertu de luvre salvifique du Christ, accomplie une fois pour toutes. Il sen suit que " le sacrement nest pas réalisé par la justice de lhomme qui le donne ou le reçoit, mais par la puissance de Dieu " (S. Thomas dA., s. th. 3, 68, 8). Dès lors quun sacrement est célébré conformément à lintention de lÉglise, la puissance du Christ et de son Esprit agit en lui et par lui, indépendamment de la sainteté personnelle du ministre. Cependant, les fruits des sacrements dépendent aussi des dispositions de celui qui les reçoit.
1129 LÉglise affirme que pour les croyants les sacrements de la Nouvelle Alliance sont nécessaires au salut (cf. Cc. Trente : DS 1604). La " grâce sacramentelle " est la grâce de lEsprit Saint donnée par le Christ et propre à chaque sacrement. LEsprit guérit et transforme ceux qui le reçoivent en les conformant au Fils de Dieu. Le fruit de la vie sacramentelle, cest que lEsprit dadoption déifie(cf. 2 P 1, 4) les fidèles en les unissant vitalement au Fils unique, le Sauveur.
V. Les sacrements de la vie éternelle
1130 LÉglise célèbre le Mystère de son Seigneur " jusquà ce quil vienne " et que " Dieu soit tout en tous " (1 Co 11, 26 ; 15, 28). Dès lâge apostolique la Liturgie est attirée vers son terme par le gémissement de lEsprit dans lÉglise : " MaranaTha ! " (1 Co 16, 22). La liturgie participe ainsi au désir de Jésus : " Jai désiré dun grand désir manger cette Pâque avec vous (…) jusquà ce quelle saccomplisse dans le Royaume de Dieu " (Lc 22, 15-16). Dans les sacrements du Christ, lÉglise reçoit déjà les arrhes de son héritage, elle participe déjà à la vie éternelle, tout en " attendant la bienheureuse espérance et lavènement de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, le Christ Jésus " (Tt 2, 13). " LEsprit et lÉpouse disent : Viens ! … Viens, Seigneur Jésus ! " (Ap 22, 17. 20).
S. Thomas résume ainsi les différentes dimensions du signe sacramentel : " Le sacrement est le signe qui remémore ce qui a précédé, à savoir la passion du Christ ; qui met en évidence ce qui sopère en nous par la passion du Christ, à savoir la grâce ; qui pronostique, je veux dire qui annonce à lavance la Gloire à venir " (S. th. 3, 60, 3).
en bref
1131 Les sacrementssont des signes efficaces de la grâce, institués par le Christ et confiées à lÉglise, par lesquelles la vie divine nous est dispensée. Les rites visibles sous lesquels les sacrements sont célébrés, signifient et réalisent les grâces propres de chaque sacrement. Ils portent fruit en ceux qui les reçoivent avec les dispositions requises.
1132 LÉglise célèbre les sacrements comme communauté sacerdotale structurée par le sacerdoce baptismal et celui des ministres ordonnés.
1133 LEsprit Saint prépare aux sacrements par la Parole de Dieu et par la foi qui accueille la Parole dans les curs bien disposés. Alors, les sacrements fortifient et expriment la foi.
1134 Le fruit de la vie sacramentelle est à la fois personnel et ecclésial. Dune part ce fruit est pour tout fidèle la vie pour Dieu dans le Christ Jésus ; dautre part il est pour lÉglise croissance dans la charité et dans sa mission de témoignage.
Chapitre deuxième
La célébration sacramentelle du mystère pascal
1135 La catéchèse de la Liturgie implique dabord lintelligence de léconomie sacramentelle (chapitre premier). A cette lumière se révèle la nouveauté de sa célébration. Il sagira donc, dans ce chapitre, de la célébration des sacrements de lÉglise. On envisagera ce qui, à travers la diversité des traditions liturgiques, est commun à la célébration des sept sacrements ; ce qui est propre à chacun deux sera présenté plus loin. Cette catéchèse fondamentale des célébrations sacramentelles répondra aux questions premières que se posent les fidèles à ce sujet :
qui célèbre ?
comment célébrer ?
quand célébrer ?
où célébrer ?
Article 1
Célébrer la Liturgie de ÉGLISE
I. Qui célèbre ?
1136 La Liturgie est " action " du " Christ tout entier " ( "Christus totus "). Ceux qui dès maintenant la célèbrent au-delà des signes sont déjà dans la Liturgie céleste, là où la célébration est totalement Communion et Fête.
Les célébrants de la Liturgie céleste
1137 LApocalypse de S. Jean, lue dans la liturgie de lÉglise, nous révèle dabord " dans le ciel un trône dressé, et siégeant sur le trône, Quelquun " (Ap 4, 2) : " le Seigneur Dieu " (Is 6, 1 ; cf. Ez 1, 26-28). Puis lAgneau, " immolé et debout " (Ap 5, 6 ; cf. Jn 1, 29) : le Christ crucifié et ressuscité, lunique Grand Prêtre du véritable sanctuaire (cf. He 4, 14-15 ; 10, 19-21 ; etc.), le même " qui offre et qui est offert, qui donne et qui est donné " (Liturgie de S. Jean Chrysostome, Anaphore). Enfin, " le fleuve de Vie qui jaillit du trône de Dieu et de lAgneau " (Ap 22, 1), lun des plus beaux symboles du Saint-Esprit (cf. Jn 4, 10-14 ; Ap 21, 6).
1138 " Récapitulés " dans le Christ, participent au service de la louange de Dieu et à laccomplissement de son dessein : les Puissances célestes (cf. Ap 4-5 ; Is 6, 2-3), toute la création (les quatre Vivants), les serviteurs de lancienne et de la nouvelle Alliance (les vingt-quatre Vieillards), le nouveau Peuple de Dieu (les cent quarante-quatre mille : cf. Ap 7, 1-8 ; 14, 1), en particulier les martyrs " égorgés pour la Parole de Dieu " (Ap 6, 9-11), et la toute Sainte Mère de Dieu (la Femme : cf. Ap 12 ; lÉpouse de lAgneau : cf. Ap 21, 9), enfin " une foule immense, impossible à dénombrer, de toute nation, race, peuple et langue " (Ap 7, 9).
1139 Cest à cette Liturgie éternelle que lEsprit et lÉglise nous font participer lorsque nous célébrons le Mystère du salut dans les sacrements.
Les célébrants de la liturgie sacramentelle
1140 Cest toute la Communauté, le Corps du Christ uni à son Chef, qui célèbre. " Les actions liturgiques ne sont pas des actions privées, mais des célébrations de lÉglise, qui est le sacrement de lunité, cest-à-dire le peuple saint réuni et organisé sous lautorité des Évêques. Cest pourquoi elles appartiennent au Corps tout entier de lÉglise, elles le manifestent et elles laffectent ; mais elles atteignent chacun de ses membres, de façon diverse, selon la diversité des ordres, des fonctions et de la participation effective " (SC 26). Cest pourquoi aussi " chaque fois que les rites, selon la nature propre de chacun, comportent une célébration commune, avec fréquentation et participation active des fidèles, on soulignera que celle-ci, dans la mesure du possible, doit lemporter sur leur célébration individuelle et quasi privée " (SC 27).
1141 Lassemblée qui célèbre est la communauté des baptisés qui, " par la régénération et lonction de lEsprit Saint, sont consacrés pour être une maison spirituelle et un sacerdoce saint, pour offrir, moyennant toutes les oeuvres du chrétien, des sacrifices spirituels " (LG 10). Ce " sacerdoce commun " est celui du Christ, unique Prêtre, participé par tous ses membres (cf. LG 10 ; 34 ; PO 2) :
La Mère Église désire beaucoup que tous les fidèles soient amenés à cette participation pleine, consciente et active aux célébrations liturgiques, qui est demandée par la nature de la liturgie elle-même et qui est, en vertu de son Baptême, un droit et un devoir pour le peuple chrétien " race élue, peuple royal, nation sainte, peuple racheté " (1 P 2, 9 ; cf. 2, 4-5) (SC 14).
1142 Mais " tous les membres nont pas la même fonction " (Rm 12, 4). Certains membres sont appelés par Dieu, dans et par lÉglise, à un service spécial de la communauté. Ces serviteurs sont choisis et consacrés par le sacrement de lOrdre, par lequel lEsprit Saint les rend aptes à agir en la personne du Christ-Tête pour le service de tous les membres de lÉglise (cf. PO 2 et 15). Le ministre ordonné est comme " licône " du Christ Prêtre. Puisque cest dans lEucharistie que se manifeste pleinement le sacrement de lÉglise, cest dans la présidence de lEucharistie que le ministère de lévêque apparaît dabord, et en Communion avec lui, celui des prêtres et des diacres.
1143 En vue de servir les fonctions du sacerdoce commun des fidèles, il existe aussi dautres ministères particuliers, non consacrés par le sacrement de lOrdre, et dont la fonction est déterminée par les évêques selon les traditions liturgiques et les besoins pastoraux. " Même les servants, les lecteurs, les commentateurs et ceux qui appartiennent à la chorale sacquittent dun véritable ministère liturgique " (SC 29).
1144 Ainsi, dans la célébration des sacrements, cest toute lassemblée qui est " liturge ", chacun selon sa fonction, mais dans " lunité de lEsprit " qui agit en tous. " Dans les célébrations liturgiques, chacun, ministre ou fidèle, en sacquittant de sa fonction, fera seulement et totalement ce qui lui revient en vertu de la nature de la chose et des normes liturgiques " (SC 28).
II Comment célébrer ?
Signes et symboles
1145 Une célébration sacramentelle est tissée de signes et de symboles. Selon la pédagogie divine du salut, leur signification senracine dans luvre de la création et dans la culture humaine, se précise dans les événements de lAncienne Alliance et se révèle pleinement dans la personne et luvre du Christ.
1146 Signes du monde des hommes. Dans la vie humaine, signes et symboles occupent une place importante. Lhomme étant un être à la fois corporel et spirituel, exprime et perçoit les réalités spirituelles à travers des signes et des symboles matériels. Comme être social, lhomme a besoin de signes et de symboles pour communiquer avec autrui, par le langage, par des gestes, par des actions. Il en est de même pour sa relation à Dieu.
1147 Dieu parle à lhomme à travers la création visible. Le cosmos matériel se présente à lintelligence de lhomme pour quil y lise les traces de son Créateur (cf. Sg 13, 1 ; Rm 1, 19-20 ; Ac 14, 17). La lumière et la nuit, le vent et le feu, leau et la terre, larbre et les fruits parlent de Dieu, symbolisent à la fois sa grandeur et sa proximité.
1148 En tant que créatures, ces réalités sensibles peuvent devenir le lieu dexpression de laction de Dieu qui sanctifie les hommes, et de laction des hommes qui rendent leur culte à Dieu. Il en est de même des signes et des symboles de la vie sociale des hommes : laver et oindre, rompre le pain et partager la coupe peuvent exprimer la présence sanctifiante de Dieu et la gratitude de lhomme devant son Créateur.
1149 Les grandes religions de lhumanité témoignent, souvent de façon impressionnante, de ce sens cosmique et symbolique des rites religieux. La liturgie de lÉglise présuppose, intègre et sanctifie des éléments de la création et de la culture humaine en leur conférant la dignité de signes de la grâce, de la création nouvelle en Jésus-Christ.
1150 Signes de lAlliance. Le peuple élu reçoit de Dieu des signes et des symboles distinctifs qui marquent sa vie liturgique : ce ne sont plus seulement des célébrations de cycles cosmiques et des gestes sociaux, mais des signes de lAlliance, des symboles des hauts faits de Dieu pour son peuple. Parmi ces signes liturgiques de lAncienne Alliance on peut nommer la circoncision, lonction et la consécration des rois et des prêtres, limposition des mains, les sacrifices, et surtout la pâque. LÉglise voit en ces signes une préfiguration des sacrements de la Nouvelle Alliance.
1151 Signes assumés par le Christ. Dans sa prédication, le Seigneur Jésus se sert souvent des signes de la création pour faire connaître les mystères du Royaume de Dieu (cf. Lc 8, 10). Il accomplit ses guérisons ou souligne sa prédication avec des signes matériels ou des gestes symboliques (cf. Jn 9, 6 ; Mc 7, 33-35 ; 8, 22-25). Il donne un sens nouveau aux faits et aux signes de lAncienne Alliance, surtout à lExode et à la Pâque (cf. Lc 9, 31 ; 22, 7-20), car il est lui-même le sens de tous ces signes.
1152 Signes sacramentels. Depuis la Pentecôte, cest à travers les signes sacramentels de son Église que lEsprit Saint uvre la sanctification. Les sacrements de lÉglise nabolissent pas, mais purifient et intègrent toute la richesse des signes et des symboles du cosmos et de la vie sociale. En outre, ils accomplissent les types et les figures de lAncienne Alliance, ils signifient et réalisent le salut opéré par le Christ, et ils préfigurent et anticipent la gloire du ciel.
Paroles et actions
1153 Une célébration sacramentelle est une rencontre des enfants de Dieu avec leur Père, dans le Christ et lEsprit Saint, et cette rencontre sexprime comme un dialogue, à travers des actions et des paroles. Certes, les actions symboliques sont elles-mêmes déjà un langage, mais il faut que la Parole de Dieu et la réponse de foi accompagnent et vivifient ces actions, pour que la semence du Royaume porte son fruit dans la bonne terre. Les actions liturgiques signifient ce que la Parole de Dieu exprime : à la fois linitiative gratuite de Dieu et la réponse de foi de son peuple.
1154 La liturgie de la Parole est partie intégrante des célébrations sacramentelles. Pour nourrir la foi des fidèles, les signes de la Parole de Dieu doivent être mis en valeur : le livre de la Parole (lectionnaire ou évangéliaire), sa vénération (procession, encens, lumière), le lieu de son annonce (ambon), sa lecture audible et intelligible, lhomélie du ministres qui prolonge sa proclamation, les réponses de lassemblée (acclamations, psaumes de méditation, litanies, confession de foi, …).
1155 Indissociables en tant que signes et enseignement, la parole et laction liturgiques le sont aussi en tant que réalisant ce quils signifient. LEsprit Saint ne donne pas seulement lintelligence de la Parole de Dieu en suscitant la foi ; par les sacrements il réalise aussi les " merveilles " de Dieu annoncées par la Parole : il rend présent et communique luvre du Père accomplie par le Fils Bien-aimé.
Chant et musique
1156 " La tradition musicale de lÉglise universelle a créé un trésor dune valeur inestimable qui lemporte sur les autres arts, du fait surtout que, chant sacré lié aux paroles, il fait partie nécessaire ou intégrante de la liturgie solennelle " (SC 112). La composition et le chant des Psaumes inspirés, souvent accompagnés dinstruments de musique, sont déjà étroitement liés aux célébrations liturgiques de lAncienne Alliance. LÉglise continue et développe cette tradition : " Récitez entre vous des psaumes, des hymnes et des cantiques inspirés ; chantez et célébrez le Seigneur de tout votre cur " (Ep 5, 19 ; cf. Col 3, 16-17). " Celui qui chante prie deux fois " (cf. S. Augustin, Psal. 72, 1).
1157 Le chant et la musique remplissent leur fonction de signes dune manière dautant plus significative quils sont " en connexion plus étroite avec laction liturgique " (SC 112), selon trois critères principaux : la beauté expressive de la prière, la participation unanime de lassemblée aux moments prévus et le caractère solennel de la célébration. Ils participent ainsi à la finalité des paroles et des actions liturgiques : la gloire de Dieu et la sanctification des fidèles (cf. SC 112) :
Combien jai pleuré à entendre vos hymnes, vos cantiques, les suaves accents dont retentissait votre Église ! Quelle émotion jen recueillais ! Ils coulaient dans mon oreille, distillant la vérité dans mon cur. Un grand élan de piété me soulevait, et les larmes ruisselaient sur ma joue, mais elles me faisaient du bien (S. Augustin, conf. 9, 6, 14).
1158 Lharmonie des signes (chant, musique, paroles et actions) est ici dautant plus expressive et féconde quelle sexprime dans la richesse culturelle propre au peuple de Dieu qui célèbre (cf. SC 119). Cest pourquoi le " chant religieux populaire sera intelligemment favorisé, pour que, dans les exercices pieux et sacrés, et dans les actions liturgiques elles-mêmes ", conformément aux normes de lÉglise, " la voix des fidèles puisse se faire entendre " (SC 118). Mais, " les textes destinés au chant sacré seront conformes à la doctrine catholique et même seront tirés de préférence des Saintes Écritures et des sources liturgiques " (SC 121).
Les saintes images
1159 Limage sacrée, lIcône liturgique, représente principalement le Christ. Elle ne peut pas représenter le Dieu invisible et incompréhensible ; cest lIncarnation du Fils de Dieu qui a inauguré une nouvelle " économie " des images :
Autrefois Dieu qui na ni corps, ni figure, ne pouvait absolument pas être représenté par une image. Mais maintenant quil sest fait voir dans la chair et quil a vécu avec les hommes, je peux faire une image de ce que jai vu de Dieu … Le visage découvert, nous contemplons la gloire du Seigneur (S. Jean Damascène, imag. 1, 16 : PG 96, 1245A).
1160 Liconographie chrétienne transcrit par limage le message évangélique que lÉcriture Sainte transmet par la parole. Image et Parole séclairent mutuellement :
Pour dire brièvement notre profession de foi, nous conservons toutes les traditions de lÉglise écrites ou non écrites qui nous ont été transmises sans changement. Lune delle est la représentation picturale des images, qui saccorde avec la prédication de lhistoire évangélique, en croyant que, vraiment et non pas en apparence, le Dieu Verbe sest fait homme, ce qui est aussi utile et aussi profitable, car les choses qui séclairent mutuellement ont indubitablement une signification réciproque (Cc. Nicée II, en 787 : COD 111).
1161 Tous les signes de la célébration liturgique sont relatifs au Christ : les images sacrées de la sainte Mère de Dieu et des saint le sont aussi. Elles signifient en effet le Christ qui est glorifié en eux. Elles manifestent " la nuée de témoins " (He 12, 1) qui continuent à participer au salut du monde et auxquels nous sommes unis, surtout dans la célébration sacramentelle. A travers leurs icônes, cest lhomme " à limage de Dieu ", enfin transfiguré " à sa ressemblance " (cf. Rm 8, 29 ; 1 Jn 3, 2), qui se révèle à notre foi, et même les anges, eux aussi récapitulés dans le Christ :
Suivant la doctrine divinement inspirée de nos saints Pères et la tradition de lÉglise catholique, dont nous savons quelle est la tradition de lEsprit Saint qui habite en elle, nous définissions en toute certitude et justesse que les vénérables et saintes images, tout comme les représentations de la Croix précieuse et vivifiante, quelles soient peintes, en mosaïque ou de quelque autre matière appropriée, doivent être placées dans les saintes églises de Dieu, sur les ustensiles et vêtements sacrés, sur les murs et les tableaux, dans les maisons et dans les chemins, aussi bien limage de notre Seigneur, Dieu et Sauveur, Jésus-Christ, que celle de notre Dame, la toute pure et saint Mère de Dieu, des saints anges, de tous les saints et des justes (Cc. Nicée II : DS 600).
1162 " La beauté et la couleur des images stimulent ma prière. Cest une fête pour mes yeux, autant que le spectacle de la campagne stimule mon cur pour rendre gloire à Dieu " (S. Jean Damascène, imag. 1, 27 : PG 94, 1268AB). La contemplation des icônes saintes, unie à la méditation de la Parole de Dieu et au chant des hymnes liturgiques, entre dans lharmonie des signes de la célébration pour que le mystère célébré simprime dans la mémoire du cur et sexprime ensuite dans la vie nouvelle des fidèles.
III Quand célébrer ?
Le temps liturgique
1163 " Notre Mère la sainte Église estime quil lui appartient de célébrer luvre salvifique de son divin Époux par une commémoration sacrée, à jours fixes, tout au long de lannée. Chaque semaine, au jour quelle a appelé " Jour du Seigneur ", elle fait mémoire de la Résurrection du Seigneur, quelle célèbre encore une fois par an, en même temps que sa bienheureuse Passion, par la grande solennité de Pâques. Et elle déploie tout le Mystère du Christ pendant le cycle de lannée… Tout en célébrant ainsi les mystères de la rédemption, elle ouvre aux fidèles les richesses des vertus et des mérites de son Seigneur ; de la sorte, ces mystères sont en quelque manière rendus présents tout au long du temps, les fidèles sont mis en contact avec eux et remplis par la grâce du salut " (SC 102).
1164 Le peuple de Dieu, dès la loi mosaïque, a connu des fêtes fixes à partir de la Pâque, pour commémorer les actions étonnantes du Dieu Sauveur, lui en rendre grâces, en perpétuer le souvenir et apprendre aux nouvelles générations à y conformer leur conduite. Dans le temps de lÉglise, situé entre la Pâque du Christ, déjà accomplie une fois pour toutes, et sa consommation dans le Royaume de Dieu, la liturgie célébrée à des jours fixes est toute empreinte de la Nouveauté du Mystère du Christ.
1165 Lorsque lÉglise célèbre le mystère du Christ, il est un mot qui scande sa prière : Aujourdhui ! , en écho à la prière que lui a apprise son Seigneur (cf. Mt 6, 11) et à lappel de lEsprit Saint (cf. He 3, 7 4, 11 ; Ps 95, 7). Cet " aujourdhui " du Dieu vivant où lhomme est appelé à entrer est " lHeure " de la Pâque de Jésus qui traverse et porte toute lhistoire :
La vie sest étendue sur tous les êtres et tous sont remplis dune large lumière ; lOrient des orients envahit lunivers, et Celui qui était " avant létoile du matin " et avant les astres, immortel et immense, le grand Christ brille sur tous les êtres plus que le soleil. Cest pourquoi, pour nous qui croyons en lui, sinstaure un jour de lumière, long, éternel, qui ne séteint pas : la Pâque mystique (S. Hippolyte, pasch. 1-2).
Le Jour du Seigneur
1166 " LÉglise célèbre le mystère pascal, en vertu dune tradition apostolique qui remonte au jour même de la Résurrection du Christ, chaque huitième jour, qui est nommé à bon droit le Jour du Seigneur, ou dimanche " (SC 106). Le jour de la Résurrection du Christ est à la fois le " premier jour de la semaine ", mémorial du premier jour de la création, et le " huitième jour " où le Christ, après son " repos " du grand Sabbat, inaugure le Jour " que fait le Seigneur ", le " jour qui ne connaît pas de soir " (cf. Matutinumin die Paschatis ritus Byzantini, Oda 9, troparium [Romae 1884] p. 11). Le " repas du Seigneur " est son centre, car cest ici que toute la communauté des fidèles rencontre le Seigneur ressuscité qui les invite à son banquet (cf. Jn 21, 12 ; Lc 24, 30) :
Le jour du Seigneur, le jour de la Résurrection, le jour des chrétiens, est notre jour. Cest pour cela quil est appelé jour du Seigneur : car cest ce jour là que le Seigneur est monté victorieux auprès du Père. Si les païens lappellent jour du soleil, nous aussi, nous le confessons volontiers : car aujourdhui sest levé la lumière du monde, aujourdhui est apparu le soleil de justice dont les rayons apportent le salut (S. Jérôme, pasch. : CCL 78, 550, 52).
1167 Le dimanche est le jour par excellence de lAssemblée liturgique, où les fidèles se rassemblent " pour que, entendant la Parole de Dieu et participant à lEucharistie, ils fassent mémoire de la Passion, de la Résurrection et de la Gloire du Seigneur Jésus, en rendant grâces à Dieu qui les a régénérés pour une vivante espérance par la Résurrection de Jésus-Christ dentre les morts " (SC 106) :
Quand nous méditons, ô Christ, les merveilles qui furent accomplis en ce jour du dimanche de ta sainte Résurrection, nous disons : Béni est le jour du dimanche, car cest en lui que fut le commencement de la création… le salut du monde… le renouvellement du genre humain… Cest en lui que le ciel et la terre se sont réjouis et que lunivers entier fut rempli de lumière. Béni est le jour du dimanche, car cest en lui que furent ouvertes les portes du paradis pour quAdam et tous les bannis y entrent sans crainte (Fanqîth, Office syriaque dAntioche, Vol. 6, La partie de lété, p. 193 b).
Lannée liturgique
1168 A partir du Triduum Pascal, comme de sa source de lumière, le temps nouveau de la Résurrection emplit toute lannée liturgique de sa clarté. De proche en proche, de part et dautre de cette source, lannée est transfigurée par la Liturgie. Elle est réellement " année de grâce du Seigneur " (cf. Lc 4, 19). LÉconomie du salut est à luvre dans le cadre du temps, mais depuis son accomplissement dans la Pâque de Jésus et leffusion de lEsprit Saint, la fin de lhistoire est anticipée, en avant-goût, et le Royaume de Dieu entre dans notre temps.
1169 Cest pourquoi Pâques nest pas simplement une fête parmi dautres : elle est la " Fête des fêtes ", " Solennité des solennités ", comme lEucharistie est le Sacrement des sacrements (le Grand sacrement). S. Athanase lappelle " le Grand dimanche " (ep. fest. 329 : PG 26, 1366A), comme la Semaine sainte est appelée en Orient " la Grande Semaine ". Le Mystère de la Résurrection, dans lequel le Christ a écrasé la mort, pénètre notre vieux temps de sa puissante énergie, jusquà ce que tout Lui soit soumis.
1170 Au Concile de Nicée (en 325) toutes les Églises se sont mises daccord pour que la Pâque chrétienne soit célébrée le dimanche qui suit la pleine lune (14 Nisan) après léquinoxe de printemps. A cause des différentes méthodes de calcul du 14 Nisan, la date de Pâques dans les Eglises dOccident et dOrient ne coïncide pas toujours. Cest pourquoi, ces Eglises cherchent aujourdhui un accord, afin de parvenir de nouveau à célébrer à une date commune le jour de la Résurrection du Seigneur.
1171 Lannée liturgique est le déploiement des divers aspects de lunique mystère pascal. Cela vaut tout particulièrement pour le cycle des fêtes autour du Mystère de lIncarnation (Annonciation, Noël, Épiphanie) qui commémorent le commencement de notre salut et nous communiquent les prémices du mystère de Pâques.
Le Sanctoral dans lannée liturgique
1172 " En célébrant le cycle annuel des mystères du Christ, la sainte Église vénère avec un particulier amour la bienheureuse Marie, Mère de Dieu, qui est unie à son Fils dans luvre du salut par un lien indissoluble. En Marie, lÉglise admire et exalte le fruit le plus excellent de la rédemption, et, comme dans une image très pure, elle contemple avec joie ce quelle-même désire et espère être tout entière " (SC 103).
1173 Quand lÉglise, dans le cycle annuel, fait mémoire des martyrs et des autres saints, elle " proclame le mystère pascal " en ceux et celles " qui ont souffert avec le Christ et sont glorifiés avec lui, et elle propose aux fidèles leurs exemples qui les attirent tous au Père par le Christ, et, par leurs mérites, elle obtient les bienfaits de Dieu " (SC 104 ; cf. SC 108 et 111).
La Liturgiedes Heures
1174 Le Mystère du Christ, son Incarnation et sa Pâque, que nous célébrons dans lEucharistie, spécialement dans lAssemblée dominicale, pénètre et transfigure le temps de chaque jour par la célébration de la Liturgie des Heures, " lOffice divin " (cf. SC IV). Cette célébration, en fidélité aux recommandations apostoliques de " prier sans cesse " (1 Th 5, 17 ; Ep 6, 18), " sest constituée de telle façon que le déroulement du jour et de la nuit soit consacré par la louange de Dieu " (SC 84). Elle est " la prière publique de lÉglise " (SC 98) dans laquelle les fidèles (clercs, religieux et laïcs) exercent le sacerdoce royal des baptisés. Célébrée " selon la forme approuvée " par lÉglise, la Liturgie des Heures " est vraiment la voix de lÉpouse elle-même qui sadresse à son Époux ; et même aussi, cest la prière du Christ avec son Corps au Père " (SC 84).
1175 La Liturgie des Heures est destinée à devenir la prière de tout le Peuple de Dieu. En elle, le Christ lui-même " continue à exercer sa fonction sacerdotale par son Église " (SC 83) ; chacun y participe selon sa place propre dans lÉglise et les circonstances de sa vie : les prêtres en tant quadonnés au ministère pastoral, parce quils sont appelés à rester assidus à la prière et au service de la Parole (cf. SC 86 ; 96 ; PO 5) ; les religieux et religieuses, de par le charisme de leur vie consacrée (cf. SC 98) ; tous les fidèles selon leurs possibilités : " Les pasteurs veilleront à ce que les Heures principales, surtout les Vêpres, les dimanches et jours de fêtes solennelles, soient célébrées en commun dans léglise. On recommande aux laïcs eux-mêmes la récitation de loffice divin, soit avec les prêtres, soit lorsquils sont réunis entre eux, voire individuellement " (SC 100).
1176 Célébrer la Liturgie des Heures exige non seulement dharmoniser la voix avec le cur qui prie, mais aussi " de se procurer une connaissance plus abondante de la liturgie et de la Bible, principalement des psaumes " (SC 90).
1177 Les hymnes et les litanies de la Prière des Heures insèrent la prière des psaumes dans le temps de lÉglise, exprimant le symbolisme du moment de la journée, du temps liturgique ou de la fête célébrée. De plus, la lecture de la Parole de Dieu à chaque Heure (avec les répons ou les tropaires qui la suivent), et, à certaines Heures, les lectures des Pères et maîtres spirituels, révèlent plus profondément le sens du Mystère célébré, aident à lintelligence des psaumes et préparent à loraison silencieuse. La lectiodivina, où la Parole de Dieu est lue et méditée pour devenir prière, est ainsi enracinée dans la célébration liturgique.
1178 La Liturgie des Heures, qui est comme un prolongement de la célébration eucharistique, nexclut pas mais appelle de manière complémentaire les diverses dévotions du Peuple de Dieu, particulièrement ladoration et le culte du Saint Sacrement.
IV. Où célébrer ?
1179 Le culte " en esprit et en vérité " (Jn 4, 24) de la Nouvelle Alliance nest pas lié à un lieu exclusif. Toute la terre est sainte et confiée aux enfants des hommes. Ce qui est premier, lorsque les fidèles se rassemblent en un même lieu, ce sont les " pierres vivantes ", assemblées pour " lédification dun édifice spirituel " (1 P 2, 4-5). Le Corps du Christ ressuscité est le temple spirituel doù jaillit la source deau vive. Incorporés au Christ par lEsprit Saint, " cest nous qui sommes le temple du Dieu vivant " (2 Co 6, 16).
1180 Lorsque lexercice de la liberté religieuse nest pas entravée (cf. DH 4), les chrétiens construisent des édifices destinés au culte divin. Ces églises visibles ne sont pas de simples lieux de rassemblement mais elles signifient et manifestent lÉglise vivant en ce lieu, demeure de Dieu avec les hommes réconciliés et unis dans le Christ.
1181 " La maison de prière où lEucharistie est célébrée et conservée, où les fidèles se rassemblent, où la présence du Fils de Dieu notre Sauveur, offert pour nous sur lautel du sacrifice, est honorée pour le soutien et le réconfort des chrétiens, cette maison doit être belle et adaptée à la prière et aux célébrations eucharistiques " (PO 5 ; cf. SC 122-127). Dans cette " maison de Dieu ", la vérité et lharmonie des signes qui la constituent doivent manifester le Christ qui est présent et agit en ce lieu (cf. SC 7) :
1182 Lautel de la Nouvelle Alliance est la Croix du Seigneur (cf. He 13, 10) de laquelle découlent les sacrements du mystère Pascal. Sur lautel, qui est le centre de léglise, est rendu présent le sacrifice de la croix sous les signes sacramentels. Il est aussi la Table du Seigneur, à laquelle le Peuple de Dieu est invité (cf. IGMR 259). Dans certaines liturgies orientales, lautel est aussi le symbole du Tombeau (le Christ est vraiment mort et vraiment ressuscité).
1183 Le tabernacle doit être situé " dans les églises en un lieu des plus dignes, avec le plus grand honneur " (MF). La noblesse, la disposition et la sécurité du tabernacle eucharistique (SC 128) doivent favoriser ladoration du Seigneur réellement présent dans le Saint Sacrement de lautel .
Le saint chrême (myron), dont lonction est le signe sacramentel du sceau du don de lEsprit Saint est traditionnellement conservé et vénéré dans un lieu sûr du sanctuaire. On peut y joindre lhuile des catéchumènes et celle des malades.
1184 Le siège de lévêque (cathèdre) ou du prêtre " doit exprimer la fonction de celui qui préside lassemblée et dirige la prière " (IGMR 271).
Lambon : " La dignité de la Parole de Dieu requiert quil existe dans léglise un lieu qui favorise lannonce de cette Parole et vers lequel, pendant la liturgie de la Parole, se tourne spontanément lattention des fidèles " (IGMR 272).
1185 Le rassemblement du peuple de Dieu commence par le Baptême ; léglise doit donc avoir un lieu pour la célébration du Baptême (baptistère) et favoriser le souvenir des promesses du Baptême (eau bénite).
Le renouvellement de la vie baptismale exige la pénitence. Léglise doit donc se prêter à lexpression du repentir et à laccueil du pardon, ce qui exige un lieu approprié à laccueil des pénitents.
Léglise doit aussi être un espace qui invite au recueillement et à la prière silencieuse qui prolonge et intériorise la grande prière de lEucharistie.
1186 Enfin, léglise a une signification eschatologique. Pour entrer dans la maison de Dieu, il faut franchir un seuil, symbole du passage du monde blessé par le péché au monde de la Vie nouvelle auquel tous les hommes sont appelés. Léglise visible symbolise la maison paternelle vers laquelle le peuple de Dieu est en marche et où le Père " essuiera toute larme de leurs yeux " (Ap 21, 4). Cest pourquoi aussi léglise est la maison de tous les enfants de Dieu, largement ouverte et accueillante.
En bref
1187 La Liturgie est luvre du Christ tout entier, Tête et Corps. Notre Grand Prêtre la célèbre sans cesse dans la Liturgie céleste, avec la sainte Mère de Dieu, les Apôtres, tous les saints et la multitude des humains qui sont déjà entrés dans le Royaume.
1188 Dans une célébration liturgique, toute lAssemblée est " liturge ", chacun selon sa fonction. Le sacerdoce baptismal est celui de tout le Corps du Christ. Mais certains fidèles sont ordonnés par le sacrement de lOrdre pour représenter le Christ comme Tête du Corps.
1189 La célébration liturgique comporte des signes et des symboles qui se réfèrent à la création (lumière, eau, feu), à la vie humaine (laver, oindre, rompre le pain) et à lhistoire du salut (les rites de la Pâque). Insérés dans le monde de la foi et assumés par la force de lEsprit Saint, ces éléments cosmiques, ces rites humains, ces gestes du souvenir de Dieu deviennent porteurs de laction salvatrice et sanctificatrice du Christ.
1190 La Liturgie de la Parole est une partie intégrante de la célébration. Le sens de la célébration est exprimé par la Parole de Dieu qui est annoncée et par lengagement de la foi qui y répond.
1191 Le chant et la musique sont en connexion étroite avec laction liturgique. Les critères de leur bon usage : la beauté expressive de la prière, la participation unanime de lassemblée et le caractère sacré de la célébration.
1192 Les saintes images, présentes dans nos églises et dans nos maisons, sont destinées à éveiller et à nourrir notre foi dans le mystère du Christ. A travers licône du Christ et de ses uvres de salut, cest Lui que nous adorons. A travers les saintes images de la sainte Mère de Dieu, des anges et des saints, nous vénérons les personnes qui y sont représentées.
1193 Le dimanche, " Jour du Seigneur ", est le principal jour de la célébration de lEucharistie parce quil est le jour de la Résurrection. Il est le jour de lAssemblée liturgique par excellence, le jour de la famille chrétienne, le jour de la joie et du repos du travail. Il est " le fondement et le noyau de toute lannée liturgique " (SC 106).
1194 LÉglise " déploie tout le Mystère du Christ pendant le cycle de lannée, de lIncarnation et la Nativité jusquà lAscension, jusquau jour de la Pentecôte et jusquà lattente de la bienheureuse espérance et de lAvènement du Seigneur " (SC 102).
1195 Faisant mémoire des saints, en premier lieu de la sainte Mère de Dieu, puis des apôtres, des martyrs et des autres saints, à des jours fixes de lannée liturgique, lÉglise de la terre manifeste quelle est unie à la Liturgie céleste ; elle glorifie le Christ davoir accompli son salut dans ses membres glorifiés ; leur exemple la stimule sur son chemin vers le Père.
1196 Les fidèles qui célèbrent la Liturgie des Heures sunissent au Christ, notre Souverain Prêtre, par la prière des psaumes, la méditation de la Parole de Dieu, des cantiques et des bénédictions, afin dêtre associés à sa prière incessante et universelle qui rend gloire au Père et implore le don de lEsprit Saint sur le monde entier.
1197 Le Christ est le vrai Temple de Dieu, " le lieu où réside sa gloire " ; par la grâce de Dieu, les chrétiens deviennent, eux aussi, temples de lEsprit Saint, les pierres vivantes dont est bâtie lÉglise.
1198 Dans sa condition terrestre, lÉglise a besoin de lieux où la communauté puisse se rassembler : nos églises visibles, lieux saints, images de la Cité sainte, la Jérusalem céleste vers laquelle nous cheminons en pèlerins.
1199 Cest dans ces églises que lÉglise célèbre le culte public à la gloire de la Trinité Sainte, quelle entend la Parole de Dieu et chante ses louanges, quelle fait monter sa prière, et quelle offre le Sacrifice du Christ, sacramentellement présent au milieu de lassemblée. Ces églises sont aussi des lieux de recueillement et de prière personnelle.
Article 2
Diversité liturgique et unité du mystère
Traditions liturgiques et catholicité de lÉglise
1200 De la première Communauté de Jérusalem jusquà la Parousie, cest le même Mystère pascal que célèbrent, en tout lieu, les Églises de Dieu fidèles à la foi apostolique. Le Mystère célébré dans la liturgie est un, mais les formes de sa célébration sont diverses.
1201 La richesse insondable du Mystère du Christ est telle quaucune tradition liturgique ne peut en épuiser lexpression. Lhistoire de léclosion et du développement de ces rites témoigne dune étonnante complémentarité. Lorsque les Églises ont vécu ces traditions liturgiques en Communion dans la foi et dans les sacrements de la foi, elles se sont enrichies mutuellement et elles grandissent dans la fidélité à la Tradition et à la mission commune à toute lÉglise (cf. EN 63-64).
1202 Les diverses traditions liturgiques sont nées en raison même de la mission de lÉglise. Les Églises dune même aire géographique et culturelle en sont venues à célébrer le Mystère du Christ à travers des expressions particulières, culturellement typées : dans la tradition du " dépôt de la foi " (2 Tm 1, 14), dans le symbolisme liturgique, dans lorganisation de la communion fraternelle, dans lintelligence théologique des mystères et dans des types de sainteté. Ainsi, le Christ, Lumière et Salut de tous les peuples, est manifesté par la vie liturgique dune Église, au peuple et à la culture auxquels elle est envoyée et dans lesquels elle est enracinée. LÉglise est catholique : elle peut intégrer dans son unité, en les purifiant, toutes les vraies richesse des cultures (cf. LG 23 ; UR 4).
1203 Les traditions liturgiques, ou rites, actuellement en usage dans lÉglise sont le rite latin (principalement le rite romain, mais aussi les rites de certaines Églises locales comme le rite ambrosien, ou de certains ordres religieux) et les rites byzantin, alexandrin ou copte, syriaque, arménien, maronite et chaldéen. " Obéissant fidèlement à la tradition, le saint Concile déclare que la sainte Mère lÉglise considère comme égaux en droit et en dignité tous les rites légitimement reconnus, et quelle veut, à lavenir, les conserver et les favoriser de toutes manières " (SC 4).
Liturgie et cultures
1204 La célébration de la liturgie doit donc correspondre au génie et à la culture des différents peuples (cf. SC 37-40). Pour que le Mystère du Christ soit " porté à la connaissance de toutes les nations pour les amener à lobéissance de la foi " (Rm 16, 26), il doit être annoncé, célébré et vécu dans toutes les cultures, de sorte que celles-ci ne sont pas abolies mais rachetées et accomplies par lui (cf. CT 53). Cest avec et par leur culture humaine propre, assumée et transfigurée par le Christ, que la multitude des enfants de Dieu ont accès auprès du Père, pour le glorifier, en un seul Esprit.
1205 " Dans la liturgie, surtout celle des sacrements, il existe une partie immuable parce quelle est dinstitution divine -, dont lÉglise est gardienne, et des parties susceptibles de changement, quelle a le pouvoir, et parfois même le devoir, dadapter aux cultures des peuples récemment évangélisés " (Jean Paul II, l. ap. " Vicesimus quintus annus " 16. Cf. SC 21).
1206 " La diversité liturgique peut être source denrichissement, elle peut aussi provoquer des tensions, des incompréhensions réciproques et même des schismes. Dans ce domaine, il est clair que la diversité ne doit pas nuire à lunité. Elle ne peut sexprimer que dans la fidélité à la foi commune, aux signes sacramentels que lÉglise a reçus du Christ, et à la communion hiérarchique. Ladaptation aux cultures exige une conversion du cur, et, sil le faut, des ruptures avec des habitudes ancestrales incompatibles avec la foi catholique " (ibid.).
En bref
1207 Il convient que la célébration de la liturgie tende à sexprimer dans la culture du peuple où se trouve lÉglise, sans se soumettre à elle. Dautre part, la liturgie est elle-même génératrice et formatrice de cultures.
1208 Les diverses traditions liturgiques, ou rites, légitimement reconnues, parce quelles signifient et communiquent le même Mystère du Christ, manifestent la catholicité de lÉglise.
1209 Le critère qui assure lunité dans la pluriformité des traditions liturgiques est la fidélité à la Tradition apostolique, cest-à-dire : la Communion dans la foi et les sacrements reçus des Apôtres, Communion qui est signifiée et garantie par la succession apostolique.
Deuxième Section
Les sept sacrements de ÉGLISE
1210 Les sacrements de la Loi Nouvelle sont institués par le Christ et ils sont au nombre de sept, à savoir le Baptême, la Confirmation, lEucharistie, la Pénitence, lOnction des malades, lOrdre et le Mariage. Les sept sacrements touchent toutes les étapes et tous les moments importants de la vie du chrétien : ils donnent naissance et croissance, guérison et mission à la vie de foi des chrétiens. En cela il existe une certaine ressemblance entre les étapes de la vie naturelle et les étapes de la vie spirituelle (cf. S. Thomas dA., s. th. 3, 65, 1).
1211 En suivant cette analogie on exposera dabord les trois sacrements de linitiation chrétienne (chapitre premier), ensuite les sacrements de guérison (chapitre deuxième), enfin les sacrements qui sont au service de la communion et de la mission des fidèles (chapitre troisième). Cet ordre nest, certes, pas le seul possible, mais il permet de voir que les sacrements forment un organisme en lequel chaque sacrement particulier a sa place vitale. Dans cet organisme, lEucharistie tient une place unique en tant que " sacrement des sacrements " : " tous les autres sacrements sont ordonnés à celui-ci comme à leur fin " (S. Thomas dA., s. th. 3, 65, 3).
Chapitre premier
Les sacrements de linitiation chrétienne
1212 Par les sacrements de linitiation chrétienne, le Baptême, la Confirmation et lEucharistie, sont posés les fondements de toute vie chrétienne. " La participation à la nature divine, donnée aux hommes par la grâce du Christ, comporte une certaine analogie avec lorigine, la croissance et le soutien de la vie naturelle. Nés à une vie nouvelle par le Baptême, les fidèles sont en effet fortifiés par le sacrement de Confirmation et reçoivent dans lEucharistie le pain de la vie éternelle. Ainsi, par ces sacrements de linitiation chrétienne, ils reçoivent toujours davantage les richesses de la vie divine et savancent vers la perfection de la charité " (Paul VI, const. ap. " Divinæ consortium naturæ " ; cf. OICA prænotanda 1-2).
Article 1
Le sacrement du Baptême
1213 Le saint Baptême est le fondement de toute la vie chrétienne le porche de la vie dans lEsprit (vitæ spiritualis ianua) et la porte qui ouvre laccès aux autres sacrements. Par le Baptême nous sommes libérés du péché et régénérés comme fils de Dieu, nous devenons membres du Christ et nous sommes incorporés à lÉglise et faits participants à sa mission (cf. Cc. Florence : DS 1314 ; CIC, can. 204, § 1 ; 849 ; CCEO, can. 675, § 1) : " Le Baptême est le sacrement de la régénération par leau et dans la parole " (Catech. R. 2, 2, 5).
I. Comment est appelé ce sacrement ?
1214 On lappelle Baptême selon le rite central par lequel il est réalisé : baptiser (en grec baptizein) signifie " plonger ", " immerger " ; la " plongée " dans leau symbolise lensevelissement du catéchumène dans la mort du Christ doù il sort par la résurrection avec lui (cf. Rm 6, 3-4 ; Col 2, 12), comme " nouvelle créature " (2 Co 5, 17 ; Ga 6, 15).
1215 Ce sacrement est aussi appelé " le bain de la régénération etde la rénovation en lEsprit Saint " (Tt 3, 5), car il signifie et réalise cette naissance de leau et de lEsprit sans laquelle " nul ne peut entrer au Royaume de Dieu " (Jn 3, 5).
1216 " Ce bain est appelé illumination, parce que ceux qui reçoivent cet enseignement [catéchétique] ont lesprit illuminé … " (S. Justin, apol. 1, 61, 12). Ayant reçu dans le Baptême le Verbe, " la lumière véritable qui illumine tout homme " (Jn 1, 9), le baptisé, " après avoir été illuminé " (He 10, 32) est devenu " fils de lumière " (1 Th 5, 5), et " lumière " lui-même (Ep 5, 8) :
Le Baptême est le plus beau et le plus magnifique des dons de Dieu… Nous lappelons don, grâce, onction, illumination, vêtement dincorruptibilité, bain de régénération, sceau, et tout ce quil y a de plus précieux. Don, parce quil est conféré à ceux qui napportent rien ; grâce, parce quil est donné même à des coupables ; Baptême, parce que le péché est enseveli dans leau ; onction, parce quil est sacré et royal (tels sont ceux qui sont oints) ; illumination, parce quil est lumière éclatante ; vêtement, parce quil voile notre honte ; bain, parce quil lave ; sceau, parce quil nous garde et quil est le signe de la seigneurie de Dieu (S. Grégoire de Naz., or. 40, 3-4 : PG 36, 361C).
II. Le Baptême dans léconomie du salut
Les préfigurations du Baptême dans lAncienne Alliance
1217 Dans la liturgie de la Nuit Pascale, lors de la bénédiction de leau baptismale, lÉglise fait solennellement mémoire des grands événements de lhistoire du salut qui préfiguraient déjà le mystère du Baptême :
Par ta puissance, Seigneur, tu accomplis des merveilles dans tes sacrements, et au cours de lhistoire du salut tu tes servi de leau, ta créature, pour nous faire connaître la grâce du Baptême (MR, Vigile pascale 42 : bénédiction de leau baptismale).
1218 Depuis lorigine du monde, leau, cette créature humble et admirable, est la source de la vie et de la fécondité. LÉcriture Sainte la voit comme " couvée " par lEsprit de Dieu (cf. Gn 1, 2) :
Dès le commencement du monde, cest ton Esprit qui planait sur les eaux pour quelles reçoivent en germe la force qui sanctifie (MR, Vigile pascale 42 : bénédiction de leau baptismale).
1219LÉglise a vu dans lArche de Noé une préfiguration du salut par le Baptême. En effet, par elle " un petit nombre, en tout huit personnes, furent sauvés par leau " (1 P 3, 20) :
Par les flots du déluge, tu annonçais le Baptême qui fait revivre, puisque leau y préfigurait également la mort du péché et la naissance de toute justice (MR, Vigile pascale 42 : bénédiction de leau baptismale).
1220 Si leau de source symbolise la vie, leau de la mer est un symbole de la mort. Cest pourquoi il pouvait figurer le mystère de la Croix. De par ce symbolisme le baptême signifie la communion avec la mort du Christ.
1221 Cest surtout la traversée de la Mer Rouge, véritable libération dIsraël de lesclavage dÉgypte, qui annonce la libération opérée par le Baptême :
Aux enfants dAbraham, tu as fait passer la mer Rouge à pied sec pour que la race libérée de la servitude préfigure le peuple des baptisés (ibid.).
1222 Enfin, le Baptême est préfiguré dans la traversée du Jourdain, par laquelle le peuple de Dieu reçoit le don de la terre promise à la descendance dAbraham, image de la vie éternelle. La promesse de cet héritage bienheureux saccomplit dans la nouvelle Alliance.
Le Baptême du Christ
1223 Toutes les préfigurations de lAncienne Alliance trouvent leur achèvement dans le Christ Jésus. Il commence sa vie publique après sêtre fait baptiser par S. Jean le Baptiste dans le Jourdain (cf. Mt 3, 13), et, après sa résurrection, il donne cette mission aux apôtres : " Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit " (Mt 28, 19-20 ; cf. Mc 16, 15-16).
1224 Notre Seigneur sest volontairement soumis au Baptême de S. Jean, destiné aux pécheurs, pour " accomplir toute justice " (Mt 3, 15). Ce geste de Jésus est une manifestation de son " anéantissement " (Ph 2, 7). LEsprit qui planait sur les eaux de la première création, descend alors sur le Christ, en prélude de la nouvelle création, et le Père manifeste Jésus comme son " Fils bien-aimé " (Mt 3, 16-17).
1225 Cest dans sa Pâque que le Christ a ouvert à tous les hommes les sources du Baptême. En effet, il avait déjà parlé de sa passion quil allait souffrir à Jérusalem comme dun " Baptême " dont il devait être baptisé (Mc 10, 38 ; cf. Lc 12, 50). Le Sang et eau qui ont coulé du côté transpercé de Jésus crucifié (Jn 19, 34) sont des types du Baptême et de lEucharistie, sacrements de la vie nouvelle (cf. 1 Jn 5, 6-8) : dès lors, il est possible " de naître de leau et de lEsprit " pour entrer dans le Royaume de Dieu (Jn 3, 5).
Vois où tu es baptisé, doù vient le Baptême, sinon de la croix du Christ, de la mort du Christ. Là est tout le mystère : il a souffert pour toi. Cest en lui que tu es racheté, cest en lui que tu es sauvé, et, à ton tour tu deviens sauveur (S. Ambroise, sacr. 2, 6 : PL 16, 425C).
Le Baptême dans lÉglise
1226 Dès le jour de la Pentecôte, lÉglise a célébré et administré le saint Baptême. En effet, S. Pierre déclare à la foule bouleversée par sa prédication : " Convertissez-vous, et que chacun de vous se fasse baptiser au nom de Jésus Christ pour obtenir le pardon de ses péchés. Vous recevrez alors le don du Saint-Esprit " (Ac 2, 38). Les Apôtres et leurs collaborateurs offrent le Baptême à quiconque croit en Jésus : juifs, craignants-Dieu, païens (cf. Ac 2, 41 ; 8, 12-13 ; 10, 48 ; 16, 15). Toujours le Baptême apparaît comme lié à la foi : " Crois au Seigneur Jésus ; alors tu seras sauvé, toi et toute ta maison ", déclare S. Paul à son geôlier de Philippes. Le récit continue : " Le geôlier reçut le Baptême sur-le-champ, lui et tous les siens " (Ac 16, 31-33).
1227 Selon lapôtre S. Paul, par le Baptême le croyant communie à la mort du Christ ; il est enseveli et il ressuscite avec lui :
Baptisés dans le Christ Jésus, cest dans sa mort que tous nous avons été baptisés. Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle (Rm 6, 3-4 ; cf. Col 2, 12).
Les baptisés ont " revêtu le Christ " (Ga 3, 27). Par lEsprit Saint, le Baptême est un bain qui purifie, sanctifie et justifie (cf. 1 Co 6, 11 ; 12, 13).
1228 Le Baptême est donc un bain deau en lequel " la semence incorruptible " de la Parole de Dieu produit son effet vivificateur (cf. 1 P 1, 23 ; Ep 5, 26). S. Augustin dira du Baptême : " La parole rejoint lélément matériel et cela devient un sacrement " (ev. Jo. 80, 3).
III. Comment est célébré le sacrement du baptême ?
Linitiation chrétienne
1229 Devenir chrétien, cela se réalise dès les temps des apôtres par un cheminement et une initiation à plusieurs étapes. Ce chemin peut être parcouru rapidement ou lentement. Il devra toujours comporter quelques éléments essentiels : lannonce de la Parole, laccueil de lÉvangile entraînant une conversion, la profession de foi, le Baptême, leffusion de lEsprit Saint, laccès à la communion eucharistique.
1230 Cette initiation a beaucoup varié au cours des siècles et selon les circonstances. Aux premiers siècles de lÉglise, linitiation chrétienne a connu un grand déploiement, avec une longue période de catéchuménat et une suite de rites préparatoires qui jalonnaient liturgiquement le chemin de la préparation catéchuménale et qui aboutissaient à la célébration des sacrements de linitiation chrétienne.
1231 Là où le Baptême des enfants est devenu largement la forme habituelle de la célébration de ce sacrement, celle-ci est devenue un acte unique qui intègre de façon très abrégée les étapes préalables à linitiation chrétienne. De par sa nature même le Baptême des enfants exige un catéchuménat postbaptismal. Il ne sagit pas seulement du besoin dune instruction postérieure au baptême, mais de lépanouissement nécessaire de la grâce baptismale dans la croissance de la personne. Cest le lieu propre du catéchisme.
1232 Le deuxième Concile du Vatican a restauré, pour lÉglise latine, " le catéchuménat des adultes, distribué en plusieurs étapes " (SC 64). On en trouve les rites dans lOrdo initiationis christianæ adultorum (1972). Le Concile a par ailleurs permis que, " outre les éléments dinitiation fournis par la tradition chrétienne ", on admette, en terre de mission, " ces autres éléments dinitiation dont on constate la pratique dans chaque peuple, pour autant quon peut les adapter au rite chrétien " (SC 65 ; cf. SC 37-40).
1233 Aujourdhui, donc, dans tous les rites latins et orientaux, linitiation chrétienne des adultes commence dès leur entrée en catéchuménat, pour atteindre son point culminant dans une seule célébration des trois sacrements du Baptême, de la Confirmation et de lEucharistie (cf. AG 14 ; CIC, can. 851 ; 865 ; 866). Dans les rites orientaux linitiation chrétienne des enfants commence au Baptême suivi immédiatement par la Confirmation et lEucharistie, tandis que dans le rite romain elle se poursuit durant des années de catéchèse, pour sachever plus tard avec la Confirmation et lEucharistie, sommet de leur initiation chrétienne (cf. CIC, can. 851, 2° ; 868).
La mystagogie de la célébration
1234 Le sens et la grâce du sacrement du Baptême apparaissent clairement dans les rites de sa célébration. Cest en suivant, avec une participation attentive, les gestes et les paroles de cette célébration que les fidèles sont initiés aux richesses que ce sacrement signifie et réalise en chaque nouveau baptisé.
1235 Le signe de la croix, au seuil de la célébration, marque lempreinte du Christ sur celui qui va lui appartenir et signifie la grâce de la rédemption que le Christ nous a acquis par sa croix.
1236 Lannonce de la Parole de Dieu illumine de la vérité révélée les candidats et lassemblée, et suscite la réponse de la foi, inséparable du Baptême. En effet, le Baptême est dune façon particulière " le sacrement de la foi " puisquil est lentrée sacramentelle dans la vie de foi.
1237 Puisque le Baptême signifie la libération du péché et de son instigateur, le diable, on prononce un (ou plusieurs) exorcisme(s) sur le candidat. Il est oint de lhuile des catéchumènes ou bien le célébrant lui impose la main, et il renonce explicitement à Satan. Ainsi préparé, il peut confesser la foi de lÉglise à laquelle il sera " confié " par le Baptême (cf. Rm 6, 17).
1238 Leau baptismale est alors consacrée par une prière dépiclèse (soit au moment même, soit dans la nuit pascale). LÉglise demande à Dieu que, par son Fils, la puissance du Saint-Esprit descende dans cette eau, afin que ceux qui y seront baptisés " naissent de leau et de lEsprit " (Jn 3, 5).
1239 Suit alors lerite essentiel du sacrement : le Baptême proprement dit, qui signifie et réalise la mort au péché et lentrée dans la vie de la Très Sainte Trinité à travers la configuration au Mystère pascal du Christ. Le Baptême est accompli de la façon la plus significative par la triple immersion dans leau baptismale. Mais depuis lantiquité il peut aussi être conféré en versant par trois fois leau sur la tête du candidat.
1240 Dans lÉglise latine, cette triple infusion est accompagnée par les paroles du ministre : " N., je te baptise au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ". Dans les liturgies orientales, le catéchumène étant tourné vers lOrient, le prêtre dit : " Le serviteur de Dieu, N., est baptisé au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ". Et à linvocation de chaque personne de la Très Sainte Trinité, il le plonge dans leau et le relève.
1241 Lonction du saint chrême, huile parfumée consacrée par lévêque, signifie le don de lEsprit Saint au nouveau baptisé. Il est devenu un chrétien, cest-à-dire " oint " de lEsprit Saint, incorporé au Christ, qui est oint prêtre, prophète et roi (cf. OBP 62).
1242 Dans la liturgie des Églises dOrient, lonction postbaptismale est le sacrement de la Chrismation (Confirmation). Dans la liturgie romaine, elle annonce une seconde onction de saint chrême que donnera lévêque : le sacrement de la Confirmation qui, pour ainsi dire, " confirme " et achève lonction baptismale.
1243 Le vêtement blanc symbolise que le baptisé a " revêtu le Christ " (Ga 3, 27) : est ressuscité avec le Christ. Lecierge, allumé au cierge pascal, signifie que le Christ a illuminé le néophyte. Dans le Christ, les baptisés sont " la lumière du monde " (Mt 5, 14 ; cf. Ph 2, 15).
Le nouveau baptisé est maintenant enfant de Dieu dans le Fils Unique. Il peut dire la prière des enfants de Dieu : le Notre Père.
1244 La première communion eucharistique. Devenu enfant de Dieu, revêtu de la robe nuptiale, le néophyte est admis " au festin des noces de lAgneau " et reçoit la nourriture de la vie nouvelle, le Corps et le Sang du Christ. Les Églises orientales gardent une conscience vive de lunité de linitiation chrétienne en donnant la sainte Communion à tous les nouveaux baptisés et confirmés, même aux petits enfants, se souvenant de la parole du Seigneur : " Laissez venir à moi les petits enfants, ne les empêchez pas " (Mc 10, 14). LÉglise latine, qui réserve laccès à la sainte Communion à ceux qui ont atteint lâge de raison, exprime louverture du Baptême sur lEucharistie en approchant de lautel lenfant nouveau baptisé pour la prière du Notre Père.
1245 La bénédiction solennelle conclut la célébration du Baptême. Lors du Baptême de nouveau-nés la bénédiction de la mère tient une place spéciale.
IV. Qui peut recevoir le baptême ?
1246 " Tout être humain non encore baptisé, et lui seul, est capable de recevoir le Baptême " (CIC, can. 864 ; CCEO, can. 679).
Le Baptême des adultes
1247 Depuis les origines de lÉglise, le Baptême des adultes est la situation la plus courante là où lannonce de lÉvangile est encore récente. Le catéchuménat (préparation au Baptême) tient alors une place importante. Initiation à la foi et à la vie chrétienne, il doit disposer à laccueil du don de Dieu dans le Baptême, la Confirmation et lEucharistie.
1248 Le catéchuménat, ou formation des catéchumènes, a pour but de permettre à ces derniers, en réponse à linitiative divine et en union avec une communauté ecclésiale, de mener leur conversion et leur foi à maturité. Il sagit dune " formation à la vie chrétienne intégrale… par laquelle les disciples sont unis au Christ leur Maître. Les catéchumènes doivent donc être initiés … aux mystères du salut et à la pratique dune vie évangélique, et introduits, par des rites sacrés, célébrés à des époques successives, dans la vie de la foi, de la liturgie et de la charité du Peuple de Dieu " (AG 14 ; cf. OICA 19 et 98).
1249 Les catéchumènes " sont déjà unis à lÉglise, ils sont déjà de la maison du Christ, et il nest pas rare quils mènent une vie de foi, espérance et charité " (AG 14). " La Mère Église les enveloppe déjà comme siens dans son amour en prenant soin deux " (LG 14 ; cf. CIC, can. 206 ; 788, § 3).
Le Baptême des enfants
1250 Naissant avec une nature humaine déchue et entachée par le péché originel, les enfants eux aussi ont besoin de la nouvelle naissance dans le Baptême (cf. DS 1514) afin dêtre libérés du pouvoir des ténèbres et dêtre transférés dans le domaine de la liberté des enfants de Dieu (cf. Col 1, 12-14), à laquelle tous les hommes sont appelés. La pure gratuité de la grâce du salut est particulièrement manifeste dans le Baptême des enfants. LÉglise et les parents priveraient dès lors lenfant de la grâce inestimable de devenir enfant de Dieu sils ne lui conféraient le Baptême peu après la naissance (cf. CIC, can. 867 ; CCEO, can. 681 ; 686, 1).
1251 Les parents chrétiens reconnaîtront que cette pratique correspond aussi à leur rôle de nourricier de la vie que Dieu leur a confiés (cf. LG 11 ; 41 ; GS 48 ; CIC, can. 868).
1252 La pratique de baptiser les petits enfants est une tradition immémoriale de lÉglise. Elle est attestée explicitement depuis le deuxième siècle. Il est cependant bien possible que, dès le début de la prédication apostolique, lorsque des " maisons " entières ont reçu le Baptême (cf. Ac 16, 15. 33 ; 18, 8 ; 1 Co 1, 16), on ait aussi baptisé les enfants (cf. CDF, instr. " Pastoralis actio ").
Foi et Baptême
1253 Le Baptême est le sacrement de la foi (cf. Mc 16, 16). Mais la foi a besoin de la communauté des croyants. Ce nest que dans la foi de lÉglise que chacun des fidèles peut croire. La foi qui est requise pour le Baptême nest pas une foi parfaite et mûre, mais un début qui est appelé à se développer. Au catéchumène ou à son parrain on demande : " Que demandez-vous à lÉglise de Dieu ? " Et il répond : " La foi ! ".
1254 Chez tous les baptisés, enfants ou adultes, la foi doit croître après le Baptême. Cest pour cela que lÉglise célèbre chaque année, dans la nuit pascale, le renouvellement des promesses du Baptême. La préparation au Baptême ne mène quau seuil de la vie nouvelle. Le Baptême est la source de la vie nouvelle dans le Christ de laquelle jaillit toute la vie chrétienne.
1255 Pour que la grâce baptismale puisse se déployer, laide des parents est importante. Cest là aussi le rôle du parrain ou de la marraine, qui doivent être des croyants solides, capables et prêts à aider le nouveau baptisé, enfant ou adulte, sur son chemin dans la vie chrétienne (cf. CIC, can. 872-874). Leur tâche est une véritable fonction ecclésiale (" officium " ; cf. SC 67) Toute la communauté ecclésiale porte une part de responsabilité dans le déploiement et la garde de la grâce reçue au Baptême.
V. Qui peut baptiser ?
1256 Sont ministres ordinaires du Baptême lévêque et le prêtre, et, dans lÉglise latine, aussi le diacre (cf. CIC, can. 861, § 1 ; CCEO, can. 677, § 1). En cas de nécessité, toute personne, même non baptisée, ayant lintention requise, peut baptiser, en appliquant la formule baptismale trinitaire (cf. CIC 861, § 2). Lintention requise, cest de vouloir faire ce que fait lÉglise en baptisant. LÉglise voit la raison de cette possibilité dans la volonté salvifique universelle de Dieu (cf. 1 Tm 2, 4) et dans la nécessité du Baptême pour le salut (cf. Mc 16, 16) (cf. DS 1315 ; 646 ; CIC, can. 861, § 2).
VI. La nécessité du baptême
1257 Le Seigneur lui-même affirme que le Baptême est nécessaire pour le salut (cf. Jn 3, 5). Aussi a-t-il commandé à ses disciples dannoncer lÉvangile et de baptiser toutes les nations (cf. Mt 28, 20) (cf. DS 1618 ; LG 14 ; AG 5). Le Baptême est nécessaire au salut pour ceux auxquels lÉvangile a été annoncé et qui ont eu la possibilité de demander ce sacrement (cf. Mc 16, 16). LÉglise ne connaît pas dautre moyen que le baptême pour assurer lentrée dans la béatitude éternelle ; cest pourquoi elle se garde de négliger la mission quelle a reçu du Seigneur de faire " renaître de leau et de lEsprit " tous ceux qui peuvent être baptisés. Dieu a lié le salut au sacrement du Baptême, mais il nest pas lui-même lié à ses sacrements.
1258 Depuis toujours, lÉglise garde la ferme conviction que ceux qui subissent la mort en raison de la foi, sans avoir reçu le Baptême, sont baptisés par leur mort pour et avec le Christ. Ce Baptême du sang, comme le désir du Baptême, porte les fruits du Baptême, sans être sacrement.
1259 Pour lescatéchumènes qui meurent avant leur Baptême, leur désir explicite de le recevoir uni à la repentance de leurs péchés et à la charité, leur assure le salut quils nont pas pu recevoir par le sacrement.
1260 " Puisque le Christ est mort pour tous, et que la vocation dernière de lhomme est réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que lEsprit Saint offre à tous, dune façon que Dieu connaît, la possibilité dêtre associé(s) au mystère pascal " (GS 22 ; cf. LG 16 ; AG 7). Tout homme qui, ignorant lÉvangile du Christ et son Église, cherche la vérité et fait la volonté de Dieu selon quil la connaît, peut être sauvé. On peut supposer que de telles personnes auraient désiré explicitement le Baptême si elles en avaient connu la nécessité.
1261 Quant aux enfants morts sans Baptême, lÉglise ne peut que les confier à la miséricorde de Dieu, comme elle le fait dans le rite des funérailles pour eux. En effet, la grande miséricorde de Dieu qui veut que tous les hommes soient sauvés (cf. 1 Tm 2, 4), et la tendresse de Jésus envers les enfants, qui lui a fait dire : " Laissez les enfants venir à moi, ne les empêchez pas " (Mc 10, 14), nous permettent despérer quil y ait un chemin de salut pour les enfants morts sans baptême. Dautant plus pressant est aussi lappel de lÉglise à ne pas empêcher les petits enfants de venir au Christ par le don du saint Baptême.
VII. La grâce du baptême
1262 Les différents effets du Baptême sont signifiés par les éléments sensibles du rite sacramentel. La plongée dans leau fait appel aux symbolismes de la mort et de la purification, mais aussi de la régénération et du renouvellement. Les deux effets principaux sont donc la purification des péchés et la nouvelle naissance dans lEsprit Saint (cf. Ac 2, 38 ; Jn 3, 5).
Pour la rémission des péchés …
1263 Par le Baptême, tous les péchés sont remis, le péché originel et tous les péchés personnels ainsi que toutes les peines du péché (cf. DS 1316). En effet, en ceux qui ont été régénérés il ne demeure rien qui les empêcherait dentrer dans le Royaume de Dieu, ni le péché dAdam, ni le péché personnel, ni les suites du péché, dont la plus grave est la séparation de Dieu.
1264 Dans le baptisé, certaines conséquences temporelles du péché demeurent cependant, tels les souffrances, la maladie, la mort, ou les fragilités inhérentes à la vie comme les faiblesses de caractère, etc., ainsi quune inclination au péché que la Tradition appelle la concupiscence, ou, métaphoriquement, " le foyer du péché " (fomespeccati) : " Laissée pour nos combats, la concupiscence nest pas capable de nuire à ceux qui, ny consentant pas, résistent avec courage par la grâce du Christ. Bien plus, celui qui aura combattu selon les règles sera couronné (2 Tm 2, 5) " (Cc. Trente : DS 1515).
" Une créature nouvelle "
1265 Le Baptême ne purifie pas seulement de tous les péchés, il fait aussi du néophyte " une création nouvelle " (2 Co 5, 17), un fils adoptif de Dieu (cf. Ga 4, 5-7) qui est devenu " participant de la nature divine " (2 P 1, 4), membre du Christ (cf. 1 Co 6, 15 ; 12, 27) et cohéritier avec Lui (Rm 8, 17), temple de lEsprit Saint (cf. 1 Co 6, 19).
1266 La Très Sainte Trinité donne au baptisé la grâce sanctifiante, la grâce de la justification qui
le rend capable de croire en Dieu, despérer en Lui et de Laimer par les vertus théologales ;
lui donne de pouvoir vivre et agir sous la motion de lEsprit Saint par les dons du Saint-Esprit ;
lui permet de croître dans le bien par les vertus morales
Ainsi, tout lorganisme de la vie surnaturelle du chrétien a sa racine dans le saint Baptême.
Incorporés à lÉglise, Corps du Christ
1267 Le Baptême fait de nous des membres du Corps du Christ. " Dès lors, … ne sommes-nous pas membres les uns des autres ? " (Ep 4, 25). Le Baptême incorpore à lÉglise. Des fonts baptismaux naît lunique peuple de Dieu de la Nouvelle Alliance qui dépasse toutes les limites naturelles ou humaines des nations, des cultures, des races et des sexes : " Aussi bien est-ce en un seul Esprit que nous tous avons été baptisés pour ne former quun seul corps " (1 Co 12, 13).
1268 Les baptisés sont devenus des " pierres vivantes " pour " lédification dun édifice spirituel, pour un sacerdoce saint " (1 P 2, 5). Par le Baptême ils participent au sacerdoce du Christ, à sa mission prophétique et royale, ils sont " une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis pour annoncer les louanges de Celui qui (les) a appelés des ténèbres à son admirable lumière " (1 P 2, 9). Le Baptême donne part au sacerdoce commun des fidèles.
1269 Devenu membre de lÉglise, le baptisé nappartient plus à lui-même (1 Co 6, 19), mais à Celui qui est mort et ressuscité pour nous (cf. 2 Co 5, 15). Dès lors il est appelé à se soumettre aux autres (cf. Ep 5, 21 ; 1 Co 16, 15-16), à les servir (cf. Jn 13, 12-15) dans la communion de lÉglise, et à être " obéissant et docile " aux chefs de lÉglise (He 13, 17) et à les considérer avec respect et affection (cf. 1 Th 5, 12-13). De même que le Baptême est la source de responsabilités et de devoirs, le baptisé jouit aussi de droits au sein de lÉglise : à recevoir les sacrements, à être nourri avec la parole de Dieu et à être soutenu par les autres aides spirituelles de lÉglise. (cf. LG 37 ; CIC, can. 208-223 ; CCEO, can. 675, 2).
1270 " Devenus fils de Dieu par la régénération [baptismale], (les baptisés) sont tenus de professer devant les hommes la foi que par lÉglise ils ont reçue de Dieu " (LG 11) et de participer à lactivité apostolique et missionnaire du Peuple de Dieu (cf. LG 17 ; AG 7, 23).
Le lien sacramentel de lunité des chrétiens
1271 Le Baptême constitue le fondement de la communion entre tous les chrétiens, aussi avec ceux qui ne sont pas encore en pleine communion avec lÉglise catholique : " En effet, ceux qui croient au Christ et qui ont reçu validement le Baptême, se trouvent dans une certaine communion, bien quimparfaite, avec lÉglise catholique … Justifiés par la foi reçue au Baptême, incorporés au Christ, ils portent à juste titre le nom de chrétiens, et les fils de lÉglise catholique les reconnaissent à bon droit comme des frères dans le Seigneur " (UR 3). " Le Baptême est donc le lien sacramentel dunité existant entre ceux qui ont été régénérés par lui " (UR 22).
Une marque spirituelle indélébile…
1272 Incorporé au Christ par le Baptême, le baptisé est configuré au Christ (cf. Rm 8, 29). Le Baptême scelle le chrétien dune marque spirituelle indélébile (" character ") de son appartenance au Christ. Cette marque nest effacée par aucun péché, même si le péché empêche le Baptême de porter des fruits de salut (cf. DS 1609-1619). Donné une fois pour toutes, le Baptême ne peut pas être réitéré.
1273 Incorporés à lÉglise par le Baptême, les fidèles ont reçu le caractère sacramentel qui les consacre pour le culte religieux chrétien (cf. LG 11). Le sceau baptismal rend capable et engage les chrétiens à servir Dieu dans une participation vivante à la sainte Liturgie de lÉglise et à exercer leur sacerdoce baptismal par le témoignage dune vie sainte et dune charité efficace (cf. LG 10).
1274 Le " sceau du Seigneur " (" Dominicuscharacter " : S. Augustin, ep. 98, 5: PL 33, 362) est le sceau dont lEsprit Saint nous a marqués " pour le jour de la rédemption " (Ep 4, 30 ; cf. Ep 1, 13-14 ; 2 Co 1, 21-22). " Le Baptême, en effet, est le sceau de la vie éternelle " (S. Irénée, dem. 3). Le fidèle qui aura " gardé le sceau " jusquau bout, cest-à-dire qui sera resté fidèle aux exigences de son Baptême, pourra sen aller " marqué du signe de la foi " (MR, Canon Romain 97), avec la foi de son Baptême, dans lattente de la vision bienheureuse de Dieu consommation de la foi et dans lespérance de la résurrection.
En bref
1275 Linitiation chrétienne saccomplit par lensemble de trois sacrements : le Baptême qui est le début de la vie nouvelle ; la Confirmation qui en est laffermissement ; et lEucharistie qui nourrit le disciple avec le Corps et le Sang du Christ en vue de sa transformation en Lui.
1276 " Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit " (Mt 28, 19-20).
1277 Le Baptême constitue la naissance à la vie nouvelle dans le Christ. Selon la volonté du Seigneur il est nécessaire pour le salut, comme lÉglise elle-même, à laquelle introduit le Baptême.
1278 Le rite essentiel du Baptême consiste à plonger dans leau le candidat ou à verser de leau sur sa tête, en prononçant linvocation de la Très Sainte Trinité, cest à dire du Père, du Fils et du Saint-Esprit.
1279 Le fruit du Baptême ou grâce baptismale est une réalité riche qui comporte : la rémission du péché originel et de tous les péchés personnels ; la naissance à la vie nouvelle par laquelle lhomme devient fils adoptif du Père, membre du Christ, temple du Saint-Esprit Par le fait même, le baptisé est incorporé à lÉglise, Corps du Christ, et rendu participant du sacerdoce du Christ.
1280 Le Baptême imprime dans lâme un signe spirituel indélébile, le caractère, qui consacre le baptisé au culte de la religion chrétienne. En raison du caractère le Baptême ne peut pas être réitéré (cf. DS 1609 et 1624).
1281 Ceux qui subissent la mort à cause de la foi, les catéchumènes et tous les hommes qui, sous limpulsion de la grâce, sans connaître lÉglise, cherchent sincèrement Dieu et sefforcent daccomplir sa volonté, peuvent être sauvés même sils nont pas reçu le Baptême (cf. LG 16).
1282 Depuis les temps les plus anciens, le Baptême est administré aux enfants, car il est une grâce et un don de Dieu qui ne supposent pas des mérites humains ; les enfants sont baptisés dans la foi de lÉglise. Lentrée dans la vie chrétienne donne accès à la vraie liberté.
1283 Quant aux enfants morts sans Baptême, la liturgie de lÉglise nous invite à avoir confiance en la miséricorde divine, et à prier pour leur salut.
1284 En cas de nécessité, toute personne peut baptiser, pourvu quelle ait lintention de faire ce que fait lÉglise, et quelle verse de leau sur la tête du candidat en disant : " Je te baptise au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ".
Article 2
Le sacrement de la Confirmation
1285 Avec le Baptême et lEucharistie, le sacrement de la Confirmation constitue lensemble des " sacrements de linitiation chrétienne ", dont lunité doit être sauvegardée. Il faut donc expliquer aux fidèles que la réception de ce sacrement est nécessaire à laccomplissement de la grâce baptismale (cf. OCf prænotanda 1). En effet, " par le sacrement de Confirmation, le lien des baptisés avec lÉglise est rendu plus parfait, ils sont enrichis dune force spéciale de lEsprit Saint et obligés ainsi plus strictement à répandre et à défendre la foi par la parole et par laction en vrais témoins du Christ " (LG 11 ; cf. OCf prænotanda 2).
I. La confirmation dans léconomie du salut
1286 Dans lAncien Testament, les prophètes ont annoncé que lEsprit du Seigneur reposerait sur le Messie espéré (cf. Is 11, 2) en vue de sa mission salvifique (cf. Lc 4, 16-22 ; Is 61, 1). La descente de lEsprit Saint sur Jésus lors de son baptême par Jean fut le signe que cétait Lui qui devait venir, quil était le Messie, le Fils de Dieu (cf. Mt 3, 13-17 ; Jn 1, 33-34). Conçu de lEsprit Saint, toute sa vie et toute sa mission se réalisent en une communion totale avec lEsprit Saint que le Père lui donne " sans mesure " (Jn 3, 34).
1287 Or, cette plénitude de lEsprit ne devait pas rester uniquement celle du Messie, elle devait être communiquée à tout le peuplemessianique (cf. Ez 36, 25-27 ; Jl 3, 1-2). A plusieurs reprises le Christ a promis cette effusion de lEsprit (cf. Lc 12, 12 ; Jn 3, 5-8 ; 7, 37-39 ; 16, 7-15 ; Ac 1, 8), promesse quil a réalisée dabord le jour de Pâques (Jn 20, 22) et ensuite, de manière plus éclatante le jour de la Pentecôte (cf. Ac 2, 1-4). Remplis de lEsprit Saint, les apôtres commencent à proclamer " les merveilles de Dieu " (Ac 2, 11) et Pierre de déclarer que cette effusion de lEsprit est le signe des temps messianiques (cf. Ac 2, 17-18). Ceux qui ont alors cru à la prédication apostolique et qui se sont fait baptiser, ont à leur tour reçu le don du Saint-Esprit (cf. Ac 2, 38).
1288 " Depuis ce temps, les apôtres, pour accomplir la volonté du Christ, communiquèrent aux néophytes, par limposition des mains, le don de lEsprit qui porte à son achèvement la grâce du Baptême (cf. Ac 8, 15-17 ; 19, 5-6). Cest pourquoi dans lÉpître aux Hébreux, prend place, parmi les éléments de la première instruction chrétienne, la doctrine sur les Baptêmes et aussi sur limposition des mains (cf. He 6, 2). Limposition des mains est à bon droit reconnue par la tradition catholique comme lorigine du sacrement de la Confirmation qui perpétue, en quelque sorte, dans lÉglise, la grâce de la Pentecôte " (Paul VI, const. ap. " Divinæ consortium naturæ ").
1289 Très tôt, pour mieux signifier le don du Saint-Esprit, sest ajoutée à limposition des mains une onction dhuile parfumée (chrême). Cette onction illustre le nom de " chrétien " qui signifie " oint " et qui tire son origine de celui du Christ lui même, lui que " Dieu a oint de lEsprit Saint " (Ac 10, 38). Et ce rite donction existe jusquà nos jours, tant en Orient quen Occident. Cest pourquoi, en Orient, on appelle ce sacrement chrismation, onction de chrême, ou myron, ce qui signifie " chrême ". En Occident le nom de Confirmation suggère que ce sacrement à la fois confirme le baptême et affermit la grâce baptismale.
Deux traditions : lOrient et lOccident
1290 Aux premiers siècles, la Confirmation constitue généralement une unique célébration avec le Baptême, formant avec celui-ci, selon lexpression de S. Cyprien, un " sacrement double ". Parmi dautres raisons, la multiplication des Baptêmes denfants, et ce en tout temps de lannée, et la multiplication des paroisses (rurales), agrandissant les diocèses, ne permettent plus la présence de lévêque à toutes les célébrations baptismales. En Occident, parce que lon désire réserver à lévêque lachèvement du Baptême sinstaure la séparation temporelle des deux sacrements. LOrient a gardé unis les deux sacrements, si bien que la confirmation est donnée par le prêtre qui baptise. Celui-ci cependant ne peut le faire quavec le " myron " consacré par un évêque (cf. CCEO, can. 695, 1 ; 696, 1).
1291 Une coutume de lÉglise de Rome a facilité le développement de la pratique occidentale : grâce à une double onction au saint chrême après le Baptême : accomplie déjà par le prêtre sur le néophyte, au sortir du bain baptismal, elle est achevée par une deuxième onction faite par lévêque sur le front de chacun des nouveaux baptisés (cf. S. Hippolyte, trad. ap. 21). La première onction au saint chrême, celle que donne le prêtre, est restée rattachée au rite baptismal ; elle signifie la participation du baptisé aux fonctions prophétique, sacerdotale et royale du Christ. Si le Baptême est conféré à un adulte, il ny a quune onction postbaptismale : celle de la Confirmation.
1292 La pratique des Églises dOrient souligne davantage lunité de linitiation chrétienne. Celle de lÉglise latine exprime plus nettement la communion du nouveau chrétien avec son évêque, garant et serviteur de lunité de son Église, de sa catholicité et de son apostolicité, et par là, le lien avec les origines apostoliques de lÉglise du Christ.
II. Les signes et le rite dela Confirmation
1293 Dans le rite de ce sacrement, il convient de considérer le signe de lonction et ce que lonction désigne et imprime : le sceau spirituel.
Lonction, dans la symbolique biblique et antique, est riche de nombreuses significations : lhuile est signe dabondance (cf. Dt 11, 14 etc.) et de joie (cf. Ps 23, 5 ; 104, 15), elle purifie (onction avant et après le bain) et elle rend souple (lonction des athlètes et des lutteurs) ; elle est signe de guérison, puisquelle adoucit les contusions et les plaies (cf. Is 1, 6 ; Lc 10, 34) et elle rend rayonnant de beauté, de santé et de force.
1294 Toutes ces significations de lonction dhuile se retrouvent dans la vie sacramentelle. Lonction avant le Baptême avec lhuile des catéchumènes signifie purification et fortification ; lonction des malades exprime la guérison et le réconfort. Lonction du saint chrême après le Baptême, dans la Confirmation et dans lOrdination, est le signe dune consécration. Par la Confirmation, les chrétiens, cest-à-dire ceux qui sont oints, participent davantage à la mission de Jésus-Christ et à la plénitude de lEsprit Saint dont Il est comblé, afin que toute leur vie dégage " la bonne odeur du Christ " (cf. 2 Co 2, 15).
1295 Par cette onction, le confirmand reçoit " la marque ", le sceau de lEsprit Saint. Le sceau est le symbole de la personne (cf. Gn 38, 18 ; Ct 8, 6), signe de son autorité (cf. Gn 41, 42), de sa propriété sur un objet (cf. Dt 32, 34) cest ainsi que lon marquait les soldats du sceau de leur chef et aussi les esclaves de celui de leur maître ; il authentifie un acte juridique (cf. 1 R 21, 8) ou un document (cf. Jr 32, 10) et le rend éventuellement secret (cf. Is 29, 11).
1296 Le Christ lui-même se déclare marqué du sceau de son Père (cf. Jn 6, 27). Le chrétien, lui aussi, est marqué dun sceau : " Celui qui nous affermit avec vous dans le Christ et qui nous a donné lonction, cest Dieu, Lui qui nous a marqués de son sceau et a mis dans nos curs les arrhes de lEsprit " (2 Co 1, 22 ; cf. Ep 1, 13 ; 4,30). Ce sceau de lEsprit Saint, marque lappartenance totale au Christ, la mise à son service pour toujours, mais aussi la promesse de la protection divine dans la grande épreuve eschatologique (cf. Ap 7, 2-3 ; 9, 4 ; Ez 9, 4-6).
La célébration de la Confirmation
1297 Un moment important qui précède la célébration de la Confirmation, mais qui, dune certaine façon, en fait partie, est la consécrationdu saint chrême. Cest lévêque qui, le Jeudi Saint, au cours de la Messe chrismale, consacre le saint chrême pour tout son diocèse. Dans les Églises dOrient, cette consécration est même réservée au Patriarche :
La liturgie dAntioche exprime ainsi lépiclèse de la consécration du saint chrême (myron) : " [Père …. envoie ton Esprit Saint] sur nous et sur cette huile qui est devant nous et consacre-la, afin quelle soit pour tous ceux qui en seront oints et marqués : myron saint, myron sacerdotal, myron royal, onction dallégresse, le vêtement de la lumière, le manteau du salut, le don spirituel, la sanctification des âmes et des corps, le bonheur impérissable, le sceau indélébile, le bouclier de la foi et le casque terrible contre toutes les uvres de lAdversaire " (Pontificale iuxta ritum Ecclesiae Syrorum Occidentalium id est Antiochiae, Pars I, Versio latina, polyglotte Vaticane 1941 p. 36-37).
1298 Lorsque la Confirmation est célébrée séparément du Baptême, comme cest le cas dans le rite romain, la liturgie du sacrement commence par le renouvellement des promesses du Baptême et par la profession de foi des confirmands. Ainsi il apparaît clairement que la Confirmation se situe dans la suite du Baptême (cf. SC 71). Lorsquun adulte est baptisé, il reçoit immédiatement la Confirmation et participe à lEucharistie (cf. CIC, can. 866).
1299 Dans le rite romain, lévêque étend les mains sur lensemble des confirmands, geste qui, depuis le temps des apôtres, est le signe du don de lEsprit. Et lévêque dinvoquer leffusion de lEsprit :
" Dieu très bon, Père de Jésus, le Christ, notre Seigneur, regarde ces baptisés sur qui nous imposons les mains : par le Baptême, tu les as libérés du péché, tu les as fait renaître de leau et de lEsprit. Comme tu las promis, répands maintenant sur eux ton Esprit Saint ; donne-leur en plénitude lEsprit qui reposait sur ton Fils Jésus : esprit de sagesse et dintelligence, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et daffection filiale ; remplis-les de lesprit de la crainte de Dieu. Par le Christ, notre Seigneur " (Ordo confirmationis, 25, polyglotte Vaticane 1973, p. 26).
1300 Suit le rite essentiel du sacrement. Dans le rite latin, " le sacrement de Confirmation est conféré par lonction du saint chrême sur le front, faite en imposant la main, et par ces paroles : Accipe signaculum doni Spiritus Sancti (Sois marqué de lEsprit Saint, le don de Dieu) " (Paul VI, const. ap. Divinæconsortium naturæ). Dans les Églises orientales de rite byzantin, lonction du myron se fait, après une prière dEpiclèse, sur les parties les plus significatives du corps : le front, les yeux, les narines, les oreilles, les lèvres, la poitrine, le dos, les mains et les pieds ; chaque onction étant accompagnée de la formule : " Sfragiz dwreaz Pneumatoz Agiou " (" Signaculum doni Spiritus Sancti ", " Sceau du don de lEsprit-Saint " [Ritualeper le Chiese orientali di rito bizantino in lingua greca, Pars 1, Vatican 1954 p. 36]).
1301 Le baiser de paix qui achève le rite du sacrement signifie et manifeste la communion ecclésiale avec lévêque et avec tous les fidèles (cf. S. Hippolyte, trad. ap. 21).
III. Les effets dela Confirmation
1302 Il ressort de la célébration que leffet du sacrement de Confirmation est leffusion spéciale de lEsprit Saint, comme elle fut accordée jadis aux Apôtres au jour de la Pentecôte.
1303 De ce fait, la Confirmation apporte croissance et approfondissement de la grâce baptismale :
elle nous enracine plus profondément dans la filiation divine qui nous fait dire " Abba, Père " (Rm 8, 15) ;
elle nous unit plus fermement au Christ ;
elle augmente en nous les dons de lEsprit Saint ;
elle rend notre lien avec lÉglise plus parfait (cf. LG 11) ;
elle nous accorde une force spéciale de lEsprit Saint pour répandre et défendre la foi par la parole et par laction en vrais témoins du Christ, pour confesser vaillamment le nom du Christ et pour ne jamais éprouver de la honte à légard de la croix (cf. DS 1319 ; LG 11 ; 12) :
Rappelle donc que tu as reçu le signe spirituel, lEsprit de sagesse et dintelligence, lEsprit de conseil et de force, lEsprit de connaissance et de piété, lEsprit de la sainte crainte, et garde ce que tu as reçu. Dieu le Père ta marqué de son signe, le Christ Seigneur ta confirmé et il a mis en ton cur le gage de lEsprit (S. Ambroise, myst. 7, 42 : PL 16, 402-403).
1304 Comme le Baptême dont elle est lachèvement, la Confirmation est donnée une seule fois. La Confirmation imprime en effet dans lâme une marque spirituelle indélébile, le " caractère " (cf. DS 1609), qui est le signe de ce que Jésus-Christ a marqué un chrétien du sceau de son Esprit en le revêtant de la force den haut pour quil soit son témoin (cf. Lc 24, 48-49).
1305 Le " caractère " perfectionne le sacerdoce commun des fidèles, reçu dans le Baptême, et " le confirmé reçoit la puissance de confesser la foi du Christ publiquement, et comme en vertu dune charge (quasi ex officio) " (S. Thomas dA., s. th. 3, 72, 5, ad 2).
IV. Qui peut recevoir ce sacrement ?
1306 Tout baptisé non encore confirmé peut et doit recevoir le sacrement de la Confirmation (cf. CIC, can. 889, § 1). Puisque Baptême, Confirmation et Eucharistie forment une unité, il sen suit que " les fidèles sont tenus par lobligation de recevoir ce sacrement en temps opportun " (CIC, can. 890), car sans la Confirmation et lEucharistie, le sacrement du Baptême est, certes, valide et efficace, mais linitiation chrétienne reste inachevée.
1307 La coutume latine, depuis des siècles, indique " lâge de la discrétion " comme point de référence pour recevoir la Confirmation. En danger de mort, on doit cependant confirmer les enfants même sils nont pas encore atteint lâge de la discrétion (cf. CIC, can. 891 ; 883, 3).
1308 Si lon parle parfois de la Confirmation comme du " sacrement de la maturité chrétienne ", il ne faudrait pas pour autant confondre lâge adulte de la foi avec lâge adulte de la croissance naturelle, ni oublier que la grâce baptismale est une grâce délection gratuite et imméritée qui na pas besoin dune " ratification " pour devenir effective. S. Thomas le rappelle :
Lâge du corps ne constitue pas un préjudice pour lâme. Ainsi, même dans lenfance, lhomme peut recevoir la perfection de lâge spirituel dont parle la Sagesse (4, 8) : La vieillesse honorable nest pas celle que donnent de longs jours, elle ne se mesure pas au nombre des années. Cest ainsi que de nombreux enfants, grâce à la force du Saint-Esprit quils avaient reçue, ont lutté courageusement et jusquau sang pour le Christ (Thomas dA., s. th. 3, 72, 8, ad 2).
1309 La préparation à la Confirmation doit viser à conduire le chrétien vers une union plus intime au Christ, vers une familiarité plus vive avec lEsprit Saint, son action, ses dons et ses appels, afin de pouvoir mieux assumer les responsabilités apostoliques de la vie chrétienne. Par là, la catéchèse de la confirmation sefforcera déveiller le sens de lappartenance à lÉglise de Jésus-Christ, tant à lÉglise universelle quà la communauté paroissiale. Cette dernière porte une responsabilité particulière dans la préparation des confirmands (cf. OCf prænotanda 3).
1310 Pour recevoir la Confirmation il faut être en état de grâce. Il convient de recourir au sacrement de Pénitence pour être purifié en vue du don du Saint-Esprit. Une prière plus intense doit préparer à recevoir avec docilité et disponibilité la force et les grâces du Saint-Esprit (cf. Ac 1, 14).
1311 Pour la Confirmation, comme pour le Baptême, il convient que les candidats cherchent laide spirituelle dun parrain ou dune marraine. Il convient quil soit le même que pour le Baptême pour bien marquer lunité des deux sacrements (cf. OCf prænotanda 5 ; 6 ; CIC, can. 893, § 1. 2).
V. Le ministre dela Confirmation
1312 Le ministre originaire de la Confirmation est lévêque (LG 26).
En Orient, cest ordinairement le prêtre qui baptise qui donne aussi immédiatement la Confirmation dans une seule et même célébration. Il le fait cependant avec le saint chrême consacré par le patriarche ou lévêque, ce qui exprime lunité apostolique de lÉglise dont les liens sont renforcés par le sacrement de Confirmation. Dans lÉglise latine on applique la même discipline dans les baptêmes dadultes ou lorsquest admis à la pleine communion avec lÉglise un baptisé dune autre communauté chrétienne qui na pas validement le sacrement de confirmation (cf. CIC, can. 883, § 2).
1313 Dans le rite latin, le ministre ordinaire de la Confirmation est lévêque (cf. CIC, can. 882). Même si lévêque peut, en cas de nécessité, concéder la faculté à des prêtres dadministrer la Confirmation (CIC, can. 884, § 2), il convient quil la confère lui-même, noubliant pas que cest pour cette raison que la célébration de la Confirmation a été temporellement séparée du Baptême. Les évêques sont les successeurs des apôtres, ils ont reçu la plénitude du sacrement de lordre. Ladministration de ce sacrement par eux marque bien quil a pour effet dunir ceux qui le reçoivent plus étroitement à lÉglise, à ses origines apostoliques et à sa mission de témoigner du Christ.
1314 Si un chrétien est en danger de mort, tout prêtre peut lui donner la Confirmation (cf. CIC, can. 883, § 3). En effet, lÉglise veut quaucun de ses enfants, même tout petit, ne sorte de ce monde sans avoir été parfait par lEsprit Saint avec le don de la plénitude du Christ.
En bref
1315 " Apprenant que la Samarie avait accueilli la parole de Dieu, les Apôtres qui étaient à Jérusalem y envoyèrent Pierre et Jean. Ceux-ci descendirent donc chez les Samaritains et prièrent pour eux, afin que lEsprit Saint leur fût donné. Car il nétait encore tombé sur aucun deux ; ils avaient seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus. Alors Pierre et Jean se mirent à leur imposer les mains et ils recevaient lEsprit Saint " (Ac 8, 14-17).
1316 La Confirmation parfait la grâce baptismale ; elle est le sacrement qui donne lEsprit Saint pour nous enraciner plus profondément dans la filiation divine, nous incorporer plus fermement au Christ, rendre plus solide notre lien avec lÉglise, nous associer davantage à sa mission et nous aider à rendre témoignage de la foi chrétienne par la parole accompagnée des uvres.
1317 La Confirmation, comme le Baptême, imprime dans lâme du chrétien un signe spirituel ou caractère indélébile ; cest pourquoi on ne peut recevoir ce sacrement quune seule fois dans la vie .
1318 En Orient, ce sacrement est administré immédiatement après le Baptême ; il est suivi de la participation à lEucharistie, tradition qui met en relief lunité des trois sacrements de linitiation chrétienne. Dans lÉglise latine on administre ce sacrement lorsque lâge de raison est atteint, et on en réserve ordinairement la célébration à lévêque, signifiant ainsi que ce sacrement affermit le lien ecclésial.
1319 Un candidat pour la Confirmation qui a atteint lâge de raison doit professer la foi, être en état de grâce, avoir lintention de recevoir le sacrement et être préparé à assumer son rôle de disciple et de témoin du Christ, dans la communauté ecclésiale et dans les affaires temporelles.
1320 Le rite essentiel de la Confirmation est lonction avec le saint chrême sur le front du baptisé (en Orient également sur dautres organes des sens), avec limposition de la main du ministre et les paroles : " Accipe signaculum doni Spiritus Sancti " (" Reçois la marque du don de lEsprit Saint "), dans le rite romain, " Signaculum doni Spiritus Sancti " (" Sceau du don de lEsprit Saint "), dans le rite byzantin.
1321 Lorsque la Confirmation est célébrée séparément du Baptême, son lien avec le Baptême est exprimé entre autres par le renouvellement des engagements baptismaux. La célébration de la Confirmation au cours de lEucharistie contribue à souligner lunité des sacrements de linitiation chrétienne.
Article 3
Le sacrement de lEucharistie
1322 La Sainte Eucharistie achève linitiation chrétienne. Ceux qui ont été élevés à la dignité du sacerdoce royal par le baptême et configurés plus profondément au Christ par la confirmation, ceux-là, par le moyen de lEucharistie, participent avec toute la communauté au sacrifice même du Seigneur.
1323 " Notre Sauveur, à la dernière Cène, la nuit où il était livré, institua le sacrifice eucharistique de son Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des siècles, jusquà ce quil vienne, et pour confier à lÉglise, son Épouse bien-aimée, le mémorial de sa mort et de sa résurrection : sacrement de lamour, signe de lunité, lien de la charité, banquet pascal dans lequel le Christ est reçu en nourriture, lâme est comblée de grâce et le gage de la gloire future nous est donné " (SC 47).
I. LEucharistie source et sommet de la vie ecclésiale
1324 LEucharistie est " source et sommet de toute la vie chrétienne " (LG 11). " Les autres sacrements ainsi que tous les ministères ecclésiaux et les tâches apostoliques sont tous liés à lEucharistie et ordonnés à elle. Car la sainte Eucharistie contient tout le trésor spirituel de lÉglise, cest-à-dire le Christ lui-même, notre Pâque " (PO 5).
1325 " La communion de vie avec Dieu et lunité du peuple de Dieu, par lesquelles lÉglise est elle-même, lEucharistie les signifie et les réalise. En elle se trouve le sommet à la fois de laction par laquelle, dans le Christ, Dieu sanctifie le monde, et du culte quen lEsprit Saint les hommes rendent au Christ et, par lui, au Père " (CdR, instr. " Eucharisticum mysterium " 6).
1326 Enfin, par la célébration eucharistique nous nous unissons déjà à la liturgie du ciel et nous anticipons la vie éternelle quand Dieu sera tout en tous (cf. 1 Co 15, 28).
1327 Bref, lEucharistie est le résumé et la somme de notre foi : " Notre manière de penser saccorde avec lEucharistie, et lEucharistie en retour confirme notre manière de penser " (S. Irénée, hær. 4, 18, 5).
II. Comment est appelé ce sacrement ?
1328 La richesse inépuisable de ce sacrement sexprime dans les différents noms quon lui donne. Chacun de ces noms en évoque certains aspects. On lappelle :
Eucharistie parce quil est action de grâces à Dieu. Les mots eucharistein (Lc 22, 19 ; 1 Co 11, 24) et eulogein (Mt 26, 26 ; Mc 14, 22) rappellent les bénédictions juives qui proclament surtout pendant le repas les uvres de Dieu : la création, la rédemption et la sanctification.
1329 Repas du Seigneur (cf. 1 Co 11, 20) parce quil sagit de la Cène que le Seigneur a pris avec ses disciples la veille de sa passion et de lanticipation du repas des noces de lAgneau (cf. Ap 19, 9) dans la Jérusalem céleste.
Fraction du Pain parce que ce rite, propre au repas juif, a été utilisé par Jésus lorsquil bénissait et distribuait le pain en maître de table (cf. Mt 14, 19 ; 15, 36 ; Mc 8, 6. 19), surtout lors de la dernière Cène (cf. Mt 26, 26 ; 1 Co 11, 24). Cest à ce geste que les disciples le reconnaîtront après sa résurrection (cf. Lc 24, 13-35), et cest de cette expression que les premiers chrétiens désigneront leurs assemblées eucharistiques (cf. Ac 2, 42. 46 ; 20, 7. 11). Ils signifient par là que tous ceux qui mangent à lunique pain rompu, le Christ, entrent en communion avec Lui et ne forment plus quun seul corps en Lui (cf. 1 Co 10, 16-17).
Assemblée eucharistique(synaxis) parce que lEucharistie est célébrée en lassemblée des fidèles, expression visible de lÉglise (cf. 1 Co 11, 17-34).
1330 Mémorial de la passion et de la résurrection du Seigneur.
Saint Sacrifice, parce quil actualise lunique sacrifice du Christ Sauveur et quil inclut loffrande de lÉglise ; ou encore saint sacrifice de la messe," sacrifice de louange " (He 13, 15 ; cf. Ps 116, 13. 17), sacrifice spirituel (cf. 1 P 2, 5), sacrifice pur (cf. Ml 1, 11) et saint, puisquil achève et dépasse tous les sacrifices de lAncienne Alliance.
Sainte et divine Liturgie, parce que toute la liturgie de lÉglise trouve son centre et son expression la plus dense dans la célébration de ce sacrement ; cest dans le même sens quon lappelle aussi célébration des Saints Mystères. On parle aussi du Très Saint Sacrement parce quil est le sacrement des sacrements. On désigne de ce nom les espèces eucharistiques gardées dans le tabernacle.
1331 Communion, parce que cest par ce sacrement que nous nous unissons au Christ qui nous rend participants de son Corps et de son Sang pour former un seul corps (cf. 1 Co 10, 16-17) ; on lappelle encore les choses saintes : ta hagia ; sancta (Const. Ap. 8, 13, 12 ; Didaché 9, 5 ; 10, 6) cest le sens premier de la " communion des saints " dont parle le Symbole des Apôtres -, pain des anges, pain du ciel, médicament dimmortalité (S. Ignace dAntioche, Eph. 20, 2), viatique…
1332 Sainte Messe parce que la liturgie dans laquelle sest accompli le mystère du salut, se termine par lenvoi des fidèles (" missio ") afin quils accomplissent la volonté de Dieu dans leur vie quotidienne.
III. Leucharistie dans léconomie du salut
Les signes du pain et du vin
1333 Au cur de la célébration de lEucharistie il y a le pain et le vin qui, par les paroles du Christ et par linvocation de lEsprit Saint, deviennent le Corps et le Sang du Christ. Fidèle à lordre du Seigneur lÉglise continue de faire, en mémoire de Lui, jusquà son retour glorieux, ce quil a fait la veille de sa passion : " Il prit du pain… ", " Il prit la coupe remplie de vin… ". En devenant mystérieusement le Corps et le Sang du Christ, les signes du pain et du vin continuent à signifier aussi la bonté de la création. Ainsi, dans lOffertoire, nous rendons grâce au Créateur pour le pain et le vin (cf. Ps 104, 13-15), fruit " du travail de lhomme ", mais dabord " fruit de la terre " et " de la vigne ", dons du Créateur. LÉglise voit dans le geste de Melchisédech, roi et prêtre, qui " apporta du pain et du vin " (Gn 14, 18) une préfiguration de sa propre offrande (cf. MR, Canon Romain 95 : " Supra quæ ").
1334 Dans lAncienne Alliance, le pain et le vin sont offerts en sacrifice parmi les prémices de la terre, en signe de reconnaissance au Créateur. Mais ils reçoivent aussi une nouvelle signification dans le contexte de lExode : Les pains azymes quIsraël mange chaque année à la Pâque, commémorent la hâte du départ libérateur dÉgypte ; le souvenir de la manne du désert rappellera toujours à Israël quil vit du pain de la Parole de Dieu (cf. Dt 8, 3). Enfin, le pain de tous les jours est le fruit de la Terre promise, gage de la fidélité de Dieu à ses promesses. La " coupe de bénédiction " (1 Co 10, 16), à la fin du repas pascal des juifs, ajoute à la joie festive du vin une dimension eschatologique, celle de lattente messianique du rétablissement de Jérusalem. Jésus a institué son Eucharistie en donnant un sens nouveau et définitif à la bénédiction du pain et de la coupe.
1335 Les miracles de la multiplication des pains, lorsque le Seigneur dit la bénédiction, rompit et distribua les pains par ses disciples pour nourrir la multitude, préfigurent la surabondance de cet unique pain de son Eucharistie (cf. Mt 14, 13-21 ; 15, 32-39). Le signe de leau changé en vin à Cana (cf. Jn 2, 11) annonce déjà lHeure de la glorification de Jésus. Il manifeste laccomplissement du repas des noces dans le Royaume du Père, où les fidèles boiront le vin nouveau (cf. Mc 14, 25) devenu le Sang du Christ.
1336 La première annonce de lEucharistie a divisé les disciples, tout comme lannonce de la Passion les a scandalisés : " Ce langage-là est trop fort ! Qui peut lécouter ? " (Jn 6, 60). LEucharistie et la croix sont des pierres dachoppement. Cest le même mystère, et il ne cesse dêtre occasion de division. " Voulez-vous partir, vous aussi ? " (Jn 6, 67) : Cette question du Seigneur retentit à travers les âges, invitation de son amour à découvrir que cest Lui seul qui a " les paroles de la vie éternelle " (Jn 6, 68) et quaccueillir dans la foi le don de son Eucharistie, cest laccueillir Lui-même.
Linstitution de lEucharistie
1337 Le Seigneur, ayant aimé les siens, les aima jusquà la fin. Sachant que lheure était venue de partir de ce monde pour retourner à son Père, au cours dun repas, il leur lava les pieds et leur donna le commandement de lamour (cf. Jn 13, 1-17). Pour leur laisser un gage de cet amour, pour ne jamais séloigner des siens et pour les rendre participants de sa Pâque, il institua lEucharistie comme mémorial de sa mort et de sa résurrection, et il ordonna à ses apôtres de le célébrer jusquà son retour, " les établissant alors prêtres du Nouveau Testament " (Cc. Trente : DS 1740).
1338 Les trois évangiles synoptiques et S. Paul nous ont transmis le récit de linstitution de lEucharistie ; de son côté, S. Jean rapporte les paroles de Jésus dans la synagogue de Capharnaüm, paroles qui préparent linstitution de lEucharistie : Le Christ se désigne comme le pain de vie, descendu du ciel (cf. Jn 6).
1339 Jésus a choisi le temps de la Pâque pour accomplir ce quil avait annoncé à Capharnaüm : donner à ses disciples son Corps et son Sang :
Vint le jour des Azymes, où lon devait immoler la pâque. [Jésus] envoya alors Pierre et Jean : Allez dit-il, nous préparer la Pâque, que nous la mangions… Ils sen allèrent donc … et préparèrent la Pâque. Lheure venue, il se mit à table avec ses apôtres et leur dit : Jai désiré avec ardeur manger cette pâque avec vous avant de souffrir ; car je vous le dis, je ne la mangerai jamais plus jusquà ce quelle saccomplisse dans le Royaume de Dieu … Puis, prenant du pain et rendant grâces, il le rompit et le leur donna, en disant : Ceci est mon Corps, qui va être donné pour vous ; faites ceci en mémoire de moi. Il fit de même pour la coupe après le repas, disant : Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon Sang, qui va être versé pour vous (Lc 22, 7-20 ; cf. Mt 26, 17-29 ; Mc 14, 12-25 ; 1 Co 11, 23-26).
1340 En célébrant la dernière Cène avec ses apôtres au cours du repas pascal, Jésus a donné son sens définitif à la pâque juive. En effet, le passage de Jésus à son Père par sa mort et sa résurrection, la Pâque nouvelle, est anticipée dans la Cène et célébrée dans lEucharistie qui accomplit la pâque juive et anticipe la pâque finale de lÉglise dans la gloire du Royaume.
" Faites ceci en mémoire de moi "
1341 Le commandement de Jésus de répéter ses gestes et ses paroles " jusquà ce quil vienne ", ne demande pas seulement de se souvenir de Jésus et de ce quil a fait. Il vise la célébration liturgique, par les apôtres et leurs successeurs, du mémorial du Christ, de sa vie, de sa mort, de sa résurrection et de son intercession auprès du Père.
1342 Dès le commencement lÉglise a été fidèle à lordre du Seigneur. De lÉglise de Jérusalem il est dit :
Ils se montraient assidus à lenseignement des apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières… Jour après jour, dun seul cur, ils fréquentaient assidûment le Temple et rompaient le pain dans leurs maisons, prenant leur nourriture avec joie et simplicité de cur (Ac 2, 42. 46).
1343Cétait surtout " le premier jour de la semaine ", cest-à-dire le jour du dimanche, le jour de la résurrection de Jésus, que les chrétiens se réunissaient " pour rompre le pain " (Ac 20, 7). Depuis ces temps-là jusquà nos jours la célébration de lEucharistie sest perpétuée, de sorte quaujourdhui nous la rencontrons partout dans lÉglise, avec la même structure fondamentale. Elle demeure le centre de la vie de lÉglise.
1344 Ainsi, de célébration en célébration, annonçant le mystère pascal de Jésus " jusquà ce quIl vienne " (1 Co 11, 26), le peuple de Dieu en pèlerinage " savance par la porte étroite de la Croix " (AG 1) vers le banquet céleste, quand tous les élus sassiéront à la table du Royaume.
IV. La célébration liturgique de leucharistie
La messe de tous les siècles
1345 Dès le deuxième siècle, nous avons le témoignage de S. Justin le Martyr sur les grandes lignes du déroulement de la célébration eucharistique. Elles sont restées les mêmes jusquà nos jours pour toutes les grandes familles liturgiques. Voici ce quil écrit, vers 155, pour expliquer à lempereur païen Antonin le Pieux (138-161) ce que font les chrétiens :
[Le jour quon appelle jour du soleil, a lieu le rassemblement en un même endroit de tous ceux qui habitent la ville ou la campagne.
On lit les mémoires des Apôtres et les écrits des Prophètes, autant que le temps le permet.
Quand le lecteur a fini, celui qui préside prend la parole pour inciter et exhorter à limitation de ces belles choses.
Ensuite, nous nous levons tous ensemble et nous faisons des prières] pour nous-mêmes … et pour tous les autres, où quils soient, afin que nous soyons trouvés justes par notre vie et nos actions et fidèles aux commandements, pour obtenir ainsi le salut éternel.
Quand les prières sont terminées, nous nous donnons un baiser les uns aux autres.
Ensuite, on apporte à celui qui préside les frères du pain et une coupe deau et de vin mélangés.
Il les prend et fait monter louange et gloire vers le Père de lunivers, par le nom du Fils et du Saint-Esprit et il rend grâce (en grec : eucharistian) longuement de ce que nous avons été jugés dignes de ces dons.
Quand il a terminé les prières et les actions de grâce, tout le peuple présent pousse une acclamation en disant : Amen.
Lorsque celui qui préside a fait laction de grâce et que le peuple a répondu, ceux que chez nous on appelle diacres distribuent à tous ceux qui sont présents du pain, du vin et de leau " eucharistiés " et ils en apportent aux absents (S. Justin, apol. 1, 65 [le texte entre crochets est du chapitre 67]).
1346 La liturgie de lEucharistie se déroule selon une structure fondamentale qui sest conservée à travers les siècles jusquà nous. Elle se déploie en deux grands moments qui forment une unité foncière :
le rassemblement, la liturgie de la Parole, avec les lectures, lhomélie et la prière universelle ;
la liturgie eucharistique, avec la présentation du pain et du vin, laction de grâce consécratoire et la communion.
Liturgie de la Parole et liturgie eucharistique constituent ensemble " un seul et même acte du culte " (SC 56) ; en effet, la table dressée pour nous dans lEucharistie est à la fois celle de la Parole de Dieu et celle du Corps du Seigneur (cf. DV 21).
1347 Nest-ce pas là le mouvement même du repas pascal de Jésus ressuscité avec ses disciples : chemin faisant, il leur expliquait les Écritures, puis, se mettant à table avec eux, " il prit le pain, dit la bénédiction, le rompit et le leur donna " (cf. Lc 24, 13-35) ?
Le mouvement de la célébration
1348 Tous se rassemblent. Les chrétiens accourent dans un même lieu pour lassemblée eucharistique. A sa tête le Christ lui-même qui est lacteur principal de lEucharistie. Il est le grand prêtre de la Nouvelle Alliance. Cest Lui-même qui préside invisiblement toute célébration eucharistique. Cest en Le représentant que lévêque ou le prêtre (agissant " in persona Christi capitis ") préside lassemblée, prend la parole après les lectures, reçoit les offrandes et dit la prière eucharistique. Tous ont leur part active dans la célébration, chacun à sa manière : les lecteurs, ceux qui apportent les offrandes, ceux qui donnent la communion, et le peuple tout entier dont lAmen manifeste la participation.
1349 La liturgie de la Parole comporte " les écrits des prophètes ", cest-à-dire lAncien Testament, et " les mémoires des apôtres ", cest-à-dire leurs épîtres et les Évangiles ; après lhomélie qui exhorte à accueillir cette Parole comme ce quelle est vraiment, Parole de Dieu (cf. 1 Th 2, 13), et à la mettre en pratique, viennent les intercessions pour tous les hommes, selon la parole de lApôtre : " Je recommande donc, avant tout, quon fasse des demandes, des prières, des supplications, des actions de grâces pour tous les hommes, pour les rois et tous les dépositaires de lautorité " (1 Tm 2, 1-2).
1350 La présentationdes oblats (loffertoire) : on apporte alors, parfois en procession, le pain et le vin à lautel qui seront offerts par le prêtre au nom du Christ dans le sacrifice eucharistique où ils deviendront le corps et le sang de Celui-ci. Cest le geste même du Christ à la Dernière Cène, " prenant du pain et une coupe ". " Cette oblation, lÉglise seule loffre, pure, au Créateur, en lui offrant avec action de grâce ce qui provient de sa création " (S. Irénée, hær. 4, 18, 4 ; cf. Ml 1, 11). La présentation des oblats à lautel assume le geste de Melchisédech et confie les dons du créateur entre les mains du Christ. Cest Lui qui, dans Son sacrifice, mène à la perfection toutes les tentatives humaines doffrir des sacrifices.
1351 Dès le début, les chrétiens apportent, avec le pain et le vin pour lEucharistie, leurs dons pour le partage avec ceux qui sont dans le besoin. Cette coutume de la collecte (cf. 1 Co 16, 1), toujours actuelle, sinspire de lexemple du Christ qui sest fait pauvre pour nous enrichir (cf. 2 Co 8, 9) :
Ceux qui sont riches et qui veulent, donnent, chacun selon ce quil sest lui-même imposé ; ce qui est recueilli est remis à celui qui préside et lui, il assiste les orphelins et les veuves, ceux que la maladie ou toute autre cause prive de ressources, les prisonniers, les immigrés et, en un mot, il secourt tous ceux qui sont dans le besoin (S. Justin, apol. 1, 67, 6).
1352 Lanaphore : Avec la prière eucharistique, prière daction de grâce et de consécration, nous arrivons au cur et au sommet de la célébration :
Dans la préface lÉglise rend grâce au Père, par le Christ, dans lEsprit Saint, pour toutes ses uvres, pour la création, la rédemption et la sanctification. Toute la communauté rejoint alors cette louange incessante que lÉglise céleste, les anges et tous les saints, chantent au Dieu trois fois Saint.
1353 Dans lépiclèse elle demande au Père denvoyer son Esprit Saint (ou la puissance de sa bénédiction : cf. MR, Canon Romain 90) sur le pain et le vin, afin quils deviennent, par sa puissance, le Corps et le Sang de Jésus-Christ, et que ceux qui prennent part à lEucharistie soient un seul corps et un seul esprit (certaines traditions liturgiques placent lépiclèse après lanamnèse).
Dans le récit de linstitution la force des paroles et de laction du Christ, et la puissance de lEsprit Saint, rendent sacramentellement présents sous les espèces du pain et du vin son Corps et son Sang, son sacrifice offert sur la croix une fois pour toutes.
1354 Dans lanamnèse qui suit, lÉglise fait mémoire de la passion, de la résurrection et du retour glorieux du Christ Jésus ; elle présente au Père loffrande de son Fils qui nous réconcilie avec Lui.
Dans les intercessions, lÉglise exprime que lEucharistie est célébrée en communion avec toute lÉglise du ciel et de la terre, des vivants et des défunts, et dans la communion avec les pasteurs de lÉglise, le Pape, lévêque du diocèse, son presbyterium et ses diacres, et tous les évêques du monde entier avec leurs églises.
1355 Dans la communion, précédée de la prière du Seigneur et de la fraction du pain, les fidèles reçoivent " le pain du ciel " et " la coupe du salut ", le Corps et le Sang du Christ qui sest livré " pour la vie du monde " (Jn 6, 51) :
Parce que ce pain et ce vin ont été, selon lexpression ancienne, " eucharistiés ", " nous appelons cette nourriture Eucharistie et personne ne peut y prendre part sil ne croit pas à la vérité de ce quon enseigne chez nous, sil na reçu le bain pour la rémission des péchés et la nouvelle naissance et sil ne vit selon les préceptes du Christ " (S. Justin, apol. 1, 66, 1-2).
V. Le sacrifice sacramentel : action de grâce, mémorial, présence
1356 Si les chrétiens célèbrent lEucharistie depuis les origines, et sous une forme qui, dans sa substance, na pas changé à travers la grande diversité des âges et des liturgies, cest parce que nous nous savons liés par lordre du Seigneur, donné la veille de sa passion : " faites ceci en mémoire de moi " (1 Co 11, 24-25).
1357 Cet ordre du Seigneur, nous laccomplissons en célébrant le mémorial de son sacrifice. Ce faisant, nous offrons auPère ce quil nous a Lui-même donné : les dons de sa création, le pain et le vin, devenus, par la puissance de lEsprit Saint et par les paroles du Christ, le Corps et le Sang du Christ : le Christ est ainsi rendu réellement et mystérieusementprésent.
1358 Il nous faut donc considérer lEucharistie
comme action de grâce et louange au Père
comme mémorial sacrificiel du Christ et de son Corps,
comme présence du Christ par la puissance de sa Parole et de son Esprit
Laction de grâce et la louange au Père
1359 LEucharistie, sacrement de notre salut accompli par le Christ sur la croix, est aussi un sacrifice de louange en action de grâce pour luvre de la création. Dans le sacrifice eucharistique, toute la création aimée par Dieu est présentée au Père à travers la mort et la résurrection du Christ. Par le Christ, lÉglise peut offrir le sacrifice de louange en action de grâce pour tout ce que Dieu a fait de bon, de beau et de juste dans la création et dans lhumanité.
1360 LEucharistie est un sacrifice daction de grâce au Père, une bénédiction par laquelle lÉglise exprime sa reconnaissance à Dieu pour tous ses bienfaits, pour tout ce quil a accompli par la création, la rédemption et la sanctification. Eucharistie signifie dabord : action de grâce.
1361 LEucharistie est aussi le sacrifice de louange, par lequel lÉglise chante la gloire de Dieu au nom de toute la création. Ce sacrifice de louange nest possible quà travers le Christ : Il unit les fidèles à sa personne, à sa louange et à son intercession, en sorte que le sacrifice de louange au Père est offert par le Christ et avec lui pour être accepté en lui.
Le mémorial sacrificiel du Christ et de son Corps, lÉglise
1362 LEucharistie est le mémorial de la Pâque du Christ, lactualisation et loffrande sacramentelle de son unique sacrifice, dans la liturgie de lÉglise qui est son Corps. Dans toutes les prières eucharistiques nous trouvons, après les paroles de linstitution, une prière appelée anamnèse ou mémorial.
1363 Dans le sens de lÉcriture Sainte le mémorial nest pas seulement le souvenir des événements du passé, mais la proclamation des merveilles que Dieu a accomplies pour les hommes (cf. Ex 13, 3). Dans la célébration liturgique de ces événements, ils deviennent dune certaine façon présents et actuels. Cest de cette manière quIsraël comprend sa libération dÉgypte : chaque fois quest célébrée la pâque, les événements de lExode sont rendus présents à la mémoire des croyants afin quils y conforment leur vie.
1364 Le mémorial reçoit un sens nouveau dans le Nouveau Testament. Quand lÉglise célèbre lEucharistie, elle fait mémoire de la Pâque du Christ, et celle-ci devient présente : le sacrifice que le Christ a offert une fois pour toutes sur la Croix demeure toujours actuel (cf. He 7, 25-27) : " Toutes les fois que le sacrifice de la croix par lequel le Christ notre pâque a été immolé se célèbre sur lautel, luvre de notre rédemption sopère " (LG 3).
1365 Parce quelle est mémorial de la Pâque du Christ, lEucharistie est aussi un sacrifice. Le caractère sacrificiel de lEucharistie est manifesté dans les paroles mêmes de linstitution : " Ceci est mon Corps qui va être donné pour vous " et " Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon Sang, qui va être versé pour vous " (Lc 22, 19-20). Dans lEucharistie le Christ donne ce corps même quil a livré pour nous sur la croix, le sang même quil a " répandu pour une multitude en rémission des péchés " (Mt 26, 28).
1366LEucharistie est donc un sacrifice parce quelle représente (rend présent) le sacrifice de la croix, parce quelle en est le mémorial et parce quelle en applique le fruit :
[Le Christ] notre Dieu et Seigneur, soffrit lui-même à Dieu le Père une fois pour toutes, mourant en intercesseur sur lautel de la Croix, afin de réaliser pour eux (les hommes) une rédemption éternelle. Cependant, comme sa mort ne devait pas mettre fin à son sacerdoce (He 7, 24. 27), à la dernière Cène, " la nuit où il fut livré " (1 Co 11, 13), il voulait laisser à lÉglise, son épouse bien-aimée, un sacrifice visible (comme le réclame la nature humaine), où serait représenté le sacrifice sanglant qui allait saccomplir une unique fois sur la croix, dont la mémoire se perpétuerait jusquà la fin des siècles (1 Co 11, 23) et dont la vertu salutaire sappliquerait à la rédemption des péchés que nous commettons chaque jour (Cc. Trente : DS 1740).
1367 Le sacrifice du Christ et le sacrifice de lEucharistie sont un unique sacrifice : " Cest une seule et même victime, cest le même qui offre maintenant par le ministère des prêtres, qui sest offert lui-même alors sur la Croix. Seule la manière doffrir diffère " (Cc. Trente, sess. 22a, Doctrina de ss. Missae sacrificio, c. 2 : DS 1743). " Et puisque dans ce divin sacrifice qui saccomplit à la messe, ce même Christ, qui sest offert lui-même une fois de manière sanglante sur lautel de la Croix, est contenu et immolé de manière non sanglante, ce sacrifice est vraiment propitiatoire " (ibid.).
1368 LEucharistie est également lesacrifice de lÉglise. LÉglise, qui est le Corps du Christ, participe à loffrande de son Chef. Avec Lui, elle est offerte elle-même tout entière. Elle sunit à son intercession auprès du Père pour tous les hommes. Dans lEucharistie, le sacrifice du Christ devient aussi le sacrifice des membres de son Corps. La vie des fidèles, leur louange, leur souffrance, leur prière, leur travail, sont unis à ceux du Christ et à sa totale offrande, et acquièrent ainsi une valeur nouvelle. Le sacrifice du Christ présent sur lautel donne à toutes les générations de chrétiens la possibilité dêtre unis à son offrande.
Dans les catacombes, lÉglise est souvent représentée comme une femme en prière, les bras largement ouverts en attitude dorante. Comme le Christ qui a étendu les bras sur la croix, par lui, avec lui et en lui, elle soffre et intercède pour tous les hommes.
1369 Toute lÉglise est unie à loffrande et à lintercession du Christ. Chargé du ministère de Pierre dans lÉglise, le Pape est associé à toute célébration de lEucharistie où il est nommé comme signe et serviteur de lunité de lÉglise Universelle. Lévêque du lieu est toujours responsable de leucharistie, même lorsquelle est présidée par un prêtre ; son nom y est prononcé pour signifier sa présidence de lÉglise particulière, au milieu du presbyterium et avec lassistance des diacres. La communauté intercède aussi pour tous les ministres qui, pour elle et avec elle, offrent le sacrifice eucharistique :
Que cette eucharistie seule soit regardée comme légitime, qui se fait sous la présidence de lévêque ou de celui quil en a chargé (S. Ignace dAntioche, Smyrn. 8, 1).
Cest par le ministère des prêtres que se consomme le sacrifice spirituel des chrétiens, en union avec le sacrifice du Christ, unique Médiateur, offert au nom de toute lÉglise dans lEucharistie par les mains des prêtres, de manière non sanglante et sacramentelle, jusquà ce que vienne le Seigneur lui-même (PO 2).
1370 A loffrande du Christ sunissent non seulement les membres qui sont encore ici-bas, mais aussi ceux qui sont déjà dans la gloire du ciel : Cest en communion avec la très Sainte Vierge Marie et en faisant mémoire delle, ainsi que de tous les saints et toutes les saintes, que lÉglise offre le sacrifice eucharistique. Dans lEucharistie lÉglise, avec Marie, est comme au pied de la Croix, unie à loffrande et à lintercession du Christ.
1371 Le sacrifice eucharistique est aussi offert pour les fidèles défunts " qui sont morts dans le Christ et ne sont pas encore pleinement purifiés " (Cc. Trente : DS 1743), pour quils puissent entrer dans la lumière et la paix du Christ :
Enterrez ce corps nimporte où ! Ne vous troublez pas pour lui daucun souci ! Tout ce que je vous demande, cest de vous souvenir de moi à lautel du Seigneur où que vous soyez " (S. Monique, avant sa mort, à S. Augustin et son frère ; conf. 9, 11, 27).
Ensuite, nous prions [dans lanaphore] pour les saints pères et évêques endormis, et en général pour tous ceux qui se sont endormis avant nous, en croyant quil y aura très grand profit pour les âmes, en faveur desquelles la supplication est offerte, tandis que se trouve présente la sainte et si redoutable victime… En présentant à Dieu nos supplications pour ceux qui se sont endormis, fussent-ils pécheurs, nous … présentons le Christ immolé pour nos péchés, rendant propice, pour eux et pour nous, le Dieu ami des hommes (S. Cyrille de Jérusalem, catech. myst. 5, 9. 10 : PG 33, 1116B-1117A).
1372 S. Augustin a admirablement résumé cette doctrine qui nous incite à une participation de plus en plus complète au sacrifice de notre Rédempteur que nous célébrons dans lEucharistie :
Cette cité rachetée tout entière, cest-à-dire lassemblée et la société des saints, est offerte à Dieu comme un sacrifice universel par le Grand Prêtre qui, sous la forme desclave, est allé jusquà soffrir pour nous dans sa passion, pour faire de nous le corps dun si grand Chef … Tel est le sacrifice des chrétiens : " à plusieurs, nêtre quun seul corps dans le Christ " (Rm 12, 5). Et ce sacrifice, lÉglise ne cesse de le reproduire dans le Sacrement de lautel bien connu des fidèles, où il lui est montré que dans ce quelle offre, elle est elle-même offerte (S. Augustin, civ. 10, 6).
La présence du Christ par la puissance de sa Parole et de lEsprit Saint
1373 " Le Christ Jésus qui est mort, qui est ressuscité, qui est à la droite de Dieu, qui intercède pour nous " (Rm 8, 34), est présent de multiples manières à son Église (cf. LG 48) : dans sa Parole, dans la prière de son Église, " là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom " (Mt 18, 20), dans les pauvres, les malades, les prisonniers (Mt 25, 31-46), dans ses sacrements dont il est lauteur, dans le sacrifice de la messe et en la personne du ministre. Mais " au plushaut point (il est présent) sous les espèces eucharistiques " (SC 7).
1374 Le mode de présence du Christ sous les espèces eucharistiques est unique. Il élève lEucharistie au-dessus de tous les sacrements et en fait " comme la perfection de la vie spirituelle et la fin à laquelle tendent tous les sacrements " (S. Thomas dA., s. th. 3, 73, 3). Dans le très saint sacrement de lEucharistie sont " contenus vraiment,réellement et substantiellement le Corps et le Sang conjointement avec lâme et la divinité de notre Seigneur Jésus-Christ, et, par conséquent, le Christ tout entier " (Cc Trente : DS 1651). " Cette présence, on la nomme réelle, non à titre exclusif, comme si les autres présences nétaient pas réelles, mais par excellence parce quelle est substantielle, et que par elle le Christ, Dieu et homme, se rend présent tout entier " (MF 39).
1375 Cest par la conversion du pain et du vin au le Corps et au Sang du Christ que le Christ devient présent en ce sacrement. Les Pères de lÉglise ont fermement affirmé la foi de lÉglise en lefficacité de la Parole du Christ et de laction de lEsprit Saint pour opérer cette conversion. Ainsi, S. Jean Chrysostome déclare :
Ce nest pas lhomme qui fait que les choses offertes deviennent Corps et Sang du Christ, mais le Christ lui-même qui a été crucifié pour nous. Le prêtre, figure du Christ, prononce ces paroles, mais leur efficacité et la grâce sont de Dieu. Ceci est mon Corps, dit-il. Cette parole transforme les choses offertes (prod. Jud. 1, 6 : PG 49, 380C).
Et saint Ambroise dit au sujet de cette conversion :
Soyons bien persuadés que ceci nest pas ce que la nature a formé, mais ce que la bénédiction a consacré, et que la force de la bénédiction lemporte sur celle de la nature, parce que par la bénédiction la nature elle-même se trouve changée … La parole du Christ, qui a pu faire de rien ce qui nexistait pas, ne pourrait donc changer les choses existantes en ce quelles nétaient pas encore ? Car ce nest pas moins de donner aux choses leur nature première que de la leur changer (myst. 9, 50. 52 : PL 16, 405-406).
1376 Le Concile de Trente résume la foi catholique en déclarant : " Parce que le Christ, notre Rédempteur, a dit que ce quil offrait sous lespèce du pain était vraiment son Corps, on a toujours eu dans lÉglise cette conviction, que déclare le saint Concile de nouveau : par la consécration du pain et du vin sopère le changement de toute la substance du pain en la substance du Corps du Christ notre Seigneur et de toute la substance du vin en la substance de son Sang ; ce changement, lÉglise catholique la justement et exactement appelé transsubstantiation " (DS 1642).
1377 La présence eucharistique du Christ commence au moment de la consécration et dure aussi longtemps que les espèces eucharistiques subsistent. Le Christ est tout entier présent dans chacune des espèces et tout entier dans chacune de leurs parties, de sorte que la fraction du pain ne divise pas le Christ (cf. Cc. Trente : DS 1641).
1378 Le culte de lEucharistie. Dans la liturgie de la messe, nous exprimons notre foi en la présence réelle du Christ sous les espèces du pain et du vin, entre autres, en fléchissant les genoux, ou en nous inclinant profondément en signe dadoration du Seigneur. " LÉglise catholique a rendu et continue de rendre ce culte dadoration qui est dû au sacrement de lEucharistie non seulement durant la messe, mais aussi en dehors de sa célébration : en conservant avec le plus grand soin les hosties consacrées, en les présentant aux fidèles pour quils les vénèrent avec solennité, en les portant en procession " (MF 56).
1379 La sainte réserve (tabernacle) était dabord destinée à garder dignement lEucharistie pour quelle puisse être portée aux malades et aux absents en dehors de la messe. Par lapprofondissement de la foi en la présence réelle du Christ dans son Eucharistie, lÉglise a pris conscience du sens de ladoration silencieuse du Seigneur présent sous les espèces eucharistiques. Cest pour cela que le tabernacle doit être placé à un endroit particulièrement digne de léglise ; il doit être construit de telle façon quil souligne et manifeste la vérité de la présence réelle du Christ dans le saint sacrement.
1380 Il est hautement convenable que le Christ ait voulu rester présent à son Église de cette façon unique. Puisque le Christ allait quitter les siens sous sa forme visible, il voulait nous donner sa présence sacramentelle ; puisquil allait soffrir sur la Croix pour nous sauver, il voulait que nous ayons le mémorial de lamour dont il nous a aimés " jusquà la fin " (Jn 13, 1), jusquau don de sa vie. En effet, dans sa présence eucharistique il reste mystérieusement au milieu de nous comme celui qui nous a aimés et qui sest livré pour nous (cf. Ga 2, 20), et il le reste sous les signes qui expriment et communiquent cet amour :
LÉglise et le monde ont un grand besoin du culte eucharistique. Jésus nous attend dans ce sacrement de lamour. Ne refusons pas le temps pour aller Le rencontrer dans ladoration, dans la contemplation pleine de foi et ouverte à réparer les fautes graves et les délits du monde. Que ne cesse jamais notre adoration (Jean Paul II, l. " Dominicæ cenæ " 3).
1381 " La présence du véritable Corps du Christ et du véritable Sang du Christ dans ce sacrement, on ne lapprend point par les sens, dit S. Thomas, mais par la foi seule, laquelle sappuie sur lautorité de Dieu. Cest pourquoi, commentant le texte de S. Luc, 22, 19 : Ceci est mon Corps qui sera livré pour vous, saint Cyrille dAlexandrie (Lc. 22, 19 : PG 72, 921B) déclare : Ne va pas te demander si cest vrai, mais accueille plutôt avec foi les paroles du Seigneur, parce que lui, qui est la Vérité, ne ment pas " (Thomas dA., s. th. 3, 75, 1 cité par Paul VI, MF 18) :
Adoro te devote, latens Deitas, Quæ sub his figuris vere latitas : Tibi se cor meum totum subjicit, Quia te contemplans totum deficit. |
Je Tadore profondément, divinité cachée, vraiment présente sous ces apparences ; à Toi mon cur se soumet tout entier parce quà Te contempler, tout entier il défaille |
Visus, gustus, tactus in te fallitur, Sed auditu solo tuto creditur : Credo quidquid dixit Dei Filius : Nil hoc Veritatis verbo verius. |
La vue, le goût, le toucher ne Tatteignent pas : à ce quon entend dire seulement il faut se fier ; je crois tout ce qua dit le Fils de Dieu ; rien de plus vrai que cette parole de la Vérité. |
VI. Le banquet pascal
1382 La messe est à la fois et inséparablement le mémorial sacrificiel dans lequel se perpétue le sacrifice de la croix, et le banquet sacré de la communion au Corps et au Sang du Seigneur. Mais la célébration du sacrifice eucharistique est toute orientée vers lunion intime des fidèles au Christ par la communion. Communier, cest recevoir le Christ lui-même qui sest offert pour nous.
1383 Lautel, autour duquel lÉglise est rassemblée dans la célébration de lEucharistie, représente les deux aspects dun même mystère : lautel du sacrifice et la table du Seigneur, et ceci dautant plus que lautel chrétien est le symbole du Christ lui-même, présent au milieu de lassemblée de ses fidèles, à la fois comme la victime offerte pour notre réconciliation et comme aliment céleste qui se donne à nous. " Quest-ce en effet lautel du Christ sinon limage du Corps du Christ ? " dit S. Ambroise (sacr. 5, 7 : PL 16, 447C), et ailleurs : " Lautel représente le Corps [du Christ], et le Corps du Christ est sur lautel " (sacr. 4, 7 : PL 16, 437D). La liturgie exprime cette unité du sacrifice et de la communion dans de nombreuses prières. Ainsi, lÉglise de Rome prie dans son anaphore :
Supplices te rogamus, omnipotens Deus, jube hæc perferri per manus sancti Angeli tui in sublime altare tuum, in conspectu divinæ majestatis : ut quotquot ex hac altaris participatione sacrosanctum Filii tui Corpus et Sanguinem sumpserimus, omni benedictione cælesti et gratia repleamur. |
Nous Ten supplions, Dieu Tout-Puissant : que [cette offrande] soit portée par ton ange en présence de ta gloire, sur ton autel céleste, afin quen recevant ici, par notre communion à cet autel, le corps et le sang de ton Fils, nous soyons comblés de ta grâce et de tes bénédictions. |
" Prenez et mangez en tous " : la communion
1384 Le Seigneur nous adresse une invitation pressante à le recevoir dans le sacrement de lEucharistie : " En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la Chair du Fils de lhomme et ne buvez son Sang, vous naurez pas la vie en vous " (Jn 6, 53).
1385 Pour répondre à cette invitation, nous devons nous préparer à ce moment si grand et si saint. S. Paul exhorte à un examen de conscience : " Quiconque mange ce pain ou boit cette coupe du Seigneur indignement aura à répondre du Corps et du Sang du Seigneur. Que chacun donc séprouve soi-même et quil mange alors de ce pain et boive de cette coupe ; car celui qui mange et boit, mange et boit sa propre condamnation, sil ny discerne le Corps " (1 Co 11, 27-29). Celui qui est conscient dun péché grave doit recevoir le sacrement de la Réconciliation avant daccéder à la communion.
1386 Devant la grandeur de ce sacrement, le fidèle ne peut que reprendre humblement et avec une foi ardente la parole du Centurion (cf. Mt 8, 8) : " Domine, non sum dignus, ut intres sub tectum meum, sed tantum dic verbum, et sanabitur anima mea " (" Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri "). Et dans la Divine Liturgie de S. Jean Chrysostome, les fidèles prient dans le même esprit :
A ta cène mystique fais-moi communier aujourdhui, ô Fils de Dieu. Car je ne dirai pas le Secret à tes ennemis, ni ne te donnerai le baiser de Judas. Mais, comme le larron, je te crie : Souviens-toi de moi, Seigneur, dans ton royaume.
1387 Pour se préparer convenablement à recevoir ce sacrement, les fidèles observeront le jeûne prescrit dans leur Église (cf. CIC, can. 919). Lattitude corporelle (gestes, vêtement) traduira le respect, la solennité, la joie de ce moment où le Christ devient notre hôte.
1388 Il est conforme au sens même de lEucharistie que les fidèles, sils ont les dispositions requises (cf. CIC 916), communient quand ils participent à la messe (Dans la même journée, les fidèles peuvent recevoir la très Sainte Communion deux fois, et seulement deux fois [cf. Pontificia Commissio Codicis Iuris Canonici authentice interpretando, Responsa ad proposita dubia, 1 : AAS 76 (1984), p. 746]) : " Il est vivement recommandé aux fidèles de participer à la Messe de façon plus parfaite en recevant aussi, après la communion du prêtre, le corps du Seigneur du même sacrifice " (SC 55).
1389 LÉglise fait obligation aux fidèles de participer les dimanches et les jours de fête à la divine liturgie (cf. OE 15) et de recevoir au moins une fois par an lEucharistie, si possible au temps pascal (cf. CIC, can. 920), préparés par le sacrement de la Réconciliation. Mais lÉglise recommande vivement aux fidèles de recevoir la sainte Eucharistie les dimanches et les jours de fête, ou plus souvent encore, même tous les jours.
1390 Grâce à la présence sacramentelle du Christ sous chacune des espèces, la communion à la seule espèce du pain permet de recevoir tout le fruit de grâce de lEucharistie. Pour des raisons pastorales, cette manière de communier sest légitimement établie comme la plus habituelle dans le rite latin. " La sainte communion réalise plus pleinement sa forme de signe lorsquelle se fait sous les deux espèces. Car, sous cette forme, le signe du banquet eucharistique est mis plus pleinement en lumière " (IGMR 240). Cest la forme habituelle de communier dans les rites orientaux.
Les fruits de la communion
1391 La communion accroît notre union au Christ. Recevoir lEucharistie dans la communion porte comme fruit principal lunion intime au Christ Jésus. Le Seigneur dit en effet : " Qui mange ma Chair et boit mon Sang demeure en moi et moi en lui " (Jn 6, 56). La vie en Christ trouve son fondement dans le banquet eucharistique : " De même quenvoyé par le Père, qui est vivant, moi, je vis par le Père, de même, celui qui me mange, vivra, lui aussi, par moi " (Jn 6, 57) :
Lorsque dans les fêtes du Seigneur les fidèles reçoivent le Corps du Fils, ils proclament les uns aux autres la Bonne Nouvelle que les arrhes de la vie sont donnés, comme lorsque lange dit à Marie de Magdala : " Le Christ est ressuscité ! " Voici que maintenant aussi la vie et la résurrection sont conférées à celui qui reçoit le Christ (Fanqîth, Office syriaque dAntioche, volume 1, Commun, 237a-b).
1392 Ce que laliment matériel produit dans notre vie corporelle, la communion le réalise de façon admirable dans notre vie spirituelle. La communion à la Chair du Christ ressuscité, " vivifiée par lEsprit Saint et vivifiante " (PO 5), conserve, accroît et renouvelle la vie de grâce reçue au Baptême. Cette croissance de la vie chrétienne a besoin dêtre nourrie par la communion eucharistique, pain de notre pèlerinage, jusquau moment de la mort, où il nous sera donné comme viatique.
1393 La communion nous sépare du péché. Le Corps du Christ que nous recevons dans la communion est " livré pour nous ", et le Sang que nous buvons, est " versé pour la multitude en rémission des péchés ". Cest pourquoi lEucharistie ne peut pas nous unir au Christ sans nous purifier en même temps des péchés commis et nous préserver des péchés futurs :
" Chaque fois que nous le recevons, nous annonçons la mort du Seigneur " (1 Co 11, 26). Si nous annonçons la mort du Seigneur, nous annonçons la rémission des péchés. Si, chaque fois que son Sang est répandu, il est répandu pour la rémission des péchés, je dois toujours le recevoir, pour que toujours il remette mes péchés. Moi qui pèche toujours, je dois avoir toujours un remède (S. Ambroise, sacr. 4, 28 : PL 16, 446A).
1394 Comme la nourriture corporelle sert à restaurer la perte des forces, lEucharistie fortifie la charité qui, dans la vie quotidienne, tend à saffaiblir ; et cette charité vivifiée efface les péchés véniels (cf. Cc. Trente : DS 1638). En se donnant à nous, le Christ ravive notre amour et nous rend capables de rompre les attachements désordonnés aux créatures et de nous enraciner en Lui :
Puisque le Christ est mort pour nous par amour, lorsque nous faisons mémoire de sa mort au moment du sacrifice, nous demandons que lamour nous soit accordé par la venue du Saint-Esprit ; nous prions humblement quen vertu de cet amour, par lequel le Christ a voulu mourir pour nous, nous aussi, en recevant la grâce du Saint-Esprit, nous puissions considérer le monde comme crucifié pour nous, et être nous-mêmes crucifiés pour le monde… Ayant reçu le don de lamour, mourons au péché et vivons pour Dieu (S. Fulgence de Ruspe, Fab. 28, 16-19 : CCL 19A, 813-814 : LH, sem. 28, lundi, off. lect.).
1395 Par la même charité quelle allume en nous, lEucharistie nous préserve des péchés mortels futurs. Plus nous participons à la vie du Christ et plus nous progressons dans son amitié, plus il nous est difficile de rompre avec Lui par le péché mortel. LEucharistie nest pas ordonnée au pardon des péchés mortels. Ceci est propre au sacrement de la Réconciliation. Le propre de lEucharistie est dêtre le sacrement de ceux qui sont dans la pleine communion de lÉglise.
1396 Lunité du Corps mystique : lEucharistie fait lÉglise. Ceux qui reçoivent lEucharistie sont unis plus étroitement au Christ. Par là même, le Christ les unit à tous les fidèles en un seul corps : lÉglise. La communion renouvelle, fortifie, approfondit cette incorporation à lÉglise déjà réalisée par le Baptême. Dans le Baptême nous avons été appelés à ne faire quun seul corps (cf. 1 Co 12, 13). LEucharistie réalise cet appel : " La coupe de bénédiction que nous bénissons nest-elle pas communion au Sang du Christ ? Le pain que nous rompons, nest-il pas communion au Corps du Christ ? Puisquil ny a quun pain, à nous tous nous ne formons quun corps, car tous nous avons part à ce pain unique " (1 Co 10, 16-17) :
Si vous êtes le corps du Christ et ses membres, cest votre sacrement qui est placé sur la table du Seigneur, vous recevez votre sacrement. Vous répondez " Amen " (" oui, cest vrai ! ") à ce que vous recevez, et vous y souscrivez en répondant. Tu entends ce mot : " le Corps du Christ " et tu réponds : " Amen ". Sois donc un membre du Christ pour que soit vrai ton Amen (S. Augustin, serm. 272 : PL 38, 1247).
1397 LEucharistie engage envers les pauvres : Pour recevoir dans la vérité le Corps et le Sang du Christ livrés pour nous, nous devons reconnaître le Christ dans les plus pauvres, Ses frères (cf. Mt 25, 40) :
Tu as goûté au sang du Seigneur et tu ne reconnais pas même ton frère. Tu déshonores cette table même, en ne jugeant pas digne de partager ta nourriture celui qui a été jugé digne de prendre part à cette table. Dieu ta libéré de tous tes péchés et ty a invité. Et toi, pas même alors, tu nes devenu plus miséricordieux (S. Jean Chrysostome, hom. in 1 Cor. 27, 4 : PG 61, 229-230).
1398 LEucharistie et lunité des chrétiens. Devant la grandeur de ce mystère, S. Augustin sécrie : " O sacrement de la piété ! O signe de lunité ! O lien de la charité ! " (ev. Jo. 26, 6, 13 ; cf. SC 47). Dautant plus douloureuses se font ressentir les divisions de lÉglise qui rompent la commune participation à la table du Seigneur, dautant plus pressantes sont les prières au Seigneur pour que reviennent les jours de lunité complète de tous ceux qui croient en Lui.
1399 Les Églises orientales qui ne sont pas en pleine communion avec lÉglise catholique célèbrent lEucharistie avec un grand amour. " Ces Églises, bien que séparées, ont de vrais sacrements, principalement, en vertu de la succession apostolique : le Sacerdoce et lEucharistie, qui les unissent intimement à nous " (UR 15). Une certaine communion in sacris, donc dans lEucharistie, est " non seulement possible, mais même recommandée, lors de circonstances favorables et avec lapprobation de lautorité ecclésiastique " (UR 15 ; cf. CIC, can. 844, § 3).
1400 Les communautés ecclésiales issues de la Réforme, séparées de lÉglise catholique, " en raison surtout de labsence du sacrement de lOrdre, nont pas conservé la substance propre et intégrale du mystère eucharistique " (UR 22). Cest pour cette raison que, pour lÉglise catholique, lintercommunion eucharistique avec ces communautés nest pas possible. Cependant, ces communautés ecclésiales, " lorsquelles font mémoire dans la sainte Cène de la mort et de la résurrection du Seigneur, professent que la vie consiste dans la communion au Christ et attendent son retour glorieux " (UR 22).
1401 Lorsquune nécessité grave se fait pressente, selon le jugement de lordinaire, les ministres catholiques peuvent donner les sacrements (Eucharistie, pénitence, onction des malades) aux autres chrétiens qui ne sont pas en pleine communion avec lÉglise catholique, mais qui les demandent de leur plein gré : il faut alors quils manifestent la foi catholique concernant ces sacrements et quils se trouvent dans les dispositions requises (cf. CIC, can. 844, § 4).
VII. Leucharistie " pignusfuturae gloriae
1402 Dans une antique prière, lÉglise acclame le mystère de lEucharistie : " O sacrum convivium in quo Christus sumitur. Recolitur memoria passionis eius ; mens impletur gratia et futuræ gloriæ nobis pignus datur " (O banquet sacré où le Christ est notre aliment, où est ravivé le souvenir de sa passion, où la grâce emplit notre âme, où nous est donné le gage de la vie à venir). Si lEucharistie est le mémorial de la Pâque du Seigneur, si par notre communion à lautel, nous sommes comblés " de toute bénédiction céleste et grâce " (MR, Canon Romain 96 : " Supplices te rogamus "), lEucharistie est aussi lanticipation de la gloire céleste.
1403 Lors de la dernière cène, le Seigneur a lui-même tourné le regard de ses disciples vers laccomplissement de la Pâque dans le royaume de Dieu : " Je vous le dis, je ne boirai plus désormais de ce produit de la vigne jusquau jour où je boirai avec vous le vin nouveau dans le Royaume de mon Père " (Mt 26, 29 ; cf. Lc 22, 18 ; Mc 14, 25). Chaque fois que lÉglise célèbre lEucharistie, elle se souvient de cette promesse et son regard se tourne vers " Celui qui vient " (Ap 1, 4). Dans sa prière, elle appelle sa venue : " Maranatha " (1 Co 16, 22), " Viens, Seigneur Jésus " (Ap 22, 20), " Que ta grâce vienne et que ce monde passe ! " (Didaché 10, 6).
1404 LÉglise sait que, dès maintenant, le Seigneur vient dans son Eucharistie, et quil est là, au milieu de nous. Cependant, cette présence est voilée. Cest pour cela que nous célébrons lEucharistie " expectantes beatam spem et adventum Salvatoris nostri Jesu Christi " (en attendant la bienheureuse espérance et lavénement de notre Sauveur Jésus-Christ Embolisme après le Notre Père ; cf. Tt 2, 13), en demandant " dêtre comblés de ta gloire, dans ton Royaume, tous ensemble et pour léternité, quand Tu essuieras toute larme de nos yeux ; en Te voyant, Toi notre Dieu, tel que Tu es, nous Te serons semblables éternellement, et sans fin nous chanterons ta louange, par le Christ, notre Seigneur " (MR, prière eucharistique III, 116 : prière pour les défunts).
1405 De cette grande espérance, celle des cieux nouveaux et de la terre nouvelle en lesquels habitera la justice (cf. 2 P 3, 13), nous navons pas de gage plus sûr, de signe plus manifeste que lEucharistie. En effet, chaque fois quest célébré ce mystère, " luvre de notre rédemption sopère " (LG 3) et nous " rompons un même pain qui est remède dimmortalité, antidote pour ne pas mourir, mais pour vivre en Jésus-Christ pour toujours " (S. Ignace dAntioche, Eph. 20, 2).
En bref
1406 Jésus dit : " Je suis le pain vivant, descendu du ciel. Qui mangera ce pain vivra à jamais… Qui mange ma Chair et boit mon Sang a la vie éternelle … il demeure en moi et moi en lui " (Jn 6, 51. 54. 56).
1407 Leucharistie est le cur et le sommet de la vie de lÉglise car en elle le Christ associe son Église et tous ses membres à son sacrifice de louange et daction de grâces offert une fois pour toutes sur la Croix à son Père ; par ce sacrifice il répand les grâces du salut sur son Corps, qui est lÉglise.
1408 La célébration eucharistique comporte toujours : la proclamation de la Parole de Dieu, laction de grâce à Dieu le Père pour tous ses bienfaits, surtout pour le don de son Fils, la consécration du pain et du vin et la participation au banquet liturgique par la réception du Corps et du Sang du Seigneur. Ces éléments constituent un seul et même acte de culte.
1409 LEucharistie est le mémorial de la Pâque du Christ : cest-à-dire de luvre du salut accomplie par la vie, la mort et la résurrection du Christ, uvre rendue présente par laction liturgique.
1410 Cest le Christ lui-même, grand prêtre éternel de la nouvelle Alliance, qui, agissant par le ministère des prêtres, offre le sacrifice eucharistique. Et cest encore le même Christ, réellement présent sous les espèces du pain et du vin, qui est loffrande du sacrifice eucharistique.
1411 Seuls les prêtres validement ordonnés peuvent présider lEucharistie et consacrer le pain et le vin pour quils deviennent le Corps et le Sang du Seigneur.
1412 Les signes essentiels du sacrement eucharistique sont le pain de blé et le vin du vignoble, sur lesquels est invoquée la bénédiction de lEsprit Saint et le prêtre prononce les paroles de la consécration dites par Jésus pendant la dernière cène : " Ceci est mon corps livré pour vous … Ceci est la coupe de mon sang … "
1413 Par la consécration sopère la transsubstantiation du pain et du vin dans le Corps et le Sang du Christ. Sous les espèces consacrées du pain et du vin, le Christ lui-même, vivant et glorieux, est présent de manière vraie, réelle et substantielle, son Corps et son Sang, avec son âme et sa divinité (cf. Cc. Trente : DS 1640 ; 1651).
1414 En tant que sacrifice, lEucharistie est aussi offerte en réparation des péchés des vivants et des défunts, et pour obtenir de Dieu des bienfaits spirituels ou temporels.
1415 Celui qui veut recevoir le Christ dans la Communion eucharistique doit se trouver en état de grâce. Si quelquun a conscience davoir péché mortellement, il ne doit pas accéder à lEucharistie sans avoir reçu préalablement labsolution dans le sacrement de Pénitence.
1416 La sainte Communion au Corps et au Sang du Christ accroît lunion du communiant avec le Seigneur, lui remet les péchés véniels et le préserve des péchés graves. Puisque les liens de charité entre le communiant et le Christ sont renforcés, la réception de ce sacrement renforce lunité de lÉglise, Corps mystique du Christ.
1417 LÉglise recommande vivement aux fidèles de recevoir la sainte communion quand ils participent à la célébration de lEucharistie ; elle leur en fait obligation au moins une fois par an.
1418 Puisque le Christ lui-même est présent dans le Sacrement de lAutel, il faut lhonorer dun culte dadoration. " La visite au Très Saint Sacrement est une preuve de gratitude, un signe damour et un devoir dadoration envers le Christ, notre Seigneur " (MF).
1419 Le Christ ayant passé de ce monde au Père, nous donne dans lEucharistie le gage de la gloire auprès de Lui : la participation au Saint Sacrifice nous identifie avec son Cur, soutient nos forces au long du pèlerinage de cette vie, nous fait souhaiter la Vie éternelle et nous unit déjà à lÉglise du Ciel, à la Sainte Vierge Marie et à tous les Saints
Chapitre deuxième
Les Sacrements de guérison
1420 Par les sacrements de linitiation chrétienne, lhomme reçoit la vie nouvelle du Christ. Or, cette vie, nous la portons " en des vases dargile " (2 Co 4, 7). Maintenant, elle est encore " cachée avec le Christ en Dieu " (Col 3, 3). Nous sommes encore dans " notre demeure terrestre " (2 Co 5, 1) soumise à la souffrance, à la maladie et à la mort. Cette vie nouvelle denfant de Dieu peut être affaiblie et même perdue par le péché.
1421 Le Seigneur Jésus-Christ, médecin de nos âmes et de nos corps, Lui qui a remis les péchés au paralytique et lui a rendu la santé du corps (cf. Mc 2, 1-12), a voulu que son Église continue, dans la force de lEsprit Saint, son uvre de guérison et de salut, même auprès de ses propres membres. Cest le but des deux sacrements de guérison : du sacrement de Pénitence et de lOnction des malades.
Article 4
Le sacrement de Pénitence et de Réconciliation
1422 " Ceux qui sapprochent du sacrement de Pénitence y reçoivent de la miséricorde de Dieu le pardon de loffense quils lui ont faite et du même coup sont réconciliés avec lÉglise que leur péché a blessée et qui, par la charité, lexemple, les prières, travaille à leur conversion " (LG 11).
. Comment est appelé ce sacrement ?
1423 Il est appelé sacrement de conversion puisquil réalise sacramentellement lappel de Jésus à la conversion (cf. Mc 1, 15), la démarche de revenir au Père (cf. Lc 15, 18) dont on sest éloigné par le péché.
Il est appelé sacrement de Pénitence puisquil consacre une démarche personnelle et ecclésiale de conversion, de repentir et de satisfaction du chrétien pécheur.
1424 Il est appelé sacrement de la confession puisque laveu, la confession des péchés devant le prêtre est un élément essentiel de ce sacrement. Dans un sens profond ce sacrement est aussi une " confession ", reconnaissance et louange de la sainteté de Dieu et de sa miséricorde envers lhomme pécheur.
Il est appelé sacrement du pardon puisque par labsolution sacramentelle du prêtre, Dieu accorde au pénitent " le pardon et la paix " (OP formule de labsolution).
Il est appelé sacrement de Réconciliation car il donne au pécheur lamour de Dieu qui réconcilie : " Laissez-vous réconcilier avec Dieu " (2 Co 5, 20). Celui qui vit de lamour miséricordieux de Dieu est prêt à répondre à lappel du Seigneur : " Va dabord te réconcilier avec ton frère " (Mt 5, 24).
II. Pourquoi un sacrement de la réconciliation après le Baptême ?
1425 " Vous avez été lavés, vous avez été sanctifiés, vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus Christ et par lEsprit de notre Dieu " (1 Co 6,11). Il faut se rendre compte de la grandeur du don de Dieu qui nous est fait dans les sacrements de linitiation chrétienne pour saisir à quel point le péché est une chose exclue pour celui qui a " revêtu le Christ " (Ga 3, 27). Mais lapôtre saint Jean dit aussi : " Si nous disons que nous sommes sans péché, nous nous abusons nous-mêmes, et la vérité nest point en nous " (1 Jn 1,8). Et le Seigneur lui-même nous a enseigné de prier : " Pardonne-nous nos offenses " (Lc 11,4) en liant le pardon mutuel de nos offenses au pardon que Dieu accordera à nos péchés.
1426 La conversion au Christ, la nouvelle naissance du Baptême, le don de lEsprit Saint, le Corps et le Sang du Christ reçus en nourriture, nous ont rendu " saints et immaculés devant lui " (Ep 1, 4), comme lÉglise elle-même, épouse du Christ, est " sainte et immaculée devant lui " (Ep 5, 27). Cependant, la vie nouvelle reçue dans linitiation chrétienne na pas supprimé la fragilité et la faiblesse de la nature humaine, ni linclination au péché que la tradition appelle la concupiscence, qui demeure dans les baptisés pour quils fassent leurs preuves dans le combat de la vie chrétienne aidés par la grâce du Christ (cf. DS 1515). Ce combat est celui de la conversion en vue de la sainteté et de la vie éternelle à laquelle le Seigneur ne cesse de nous appeler (cf. DS 1545 ; LG 40).
III. La conversion des baptisés
1427 Jésus appelle à la conversion. Cet appel est une partie essentielle de lannonce du Royaume : " Les temps sont accomplis et le Royaume de Dieu est tout proche ; repentez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle " (Mc 1,15). Dans la prédication de lÉglise cet appel sadresse dabord à ceux qui ne connaissent pas encore le Christ et son Évangile. Aussi, le Baptême est-il le lieu principal de la conversion première et fondamentale. Cest par la foi en la Bonne Nouvelle et par le Baptême (cf. Ac 2, 38) que lon renonce au mal et quon acquiert le salut, cest-à-dire la rémission de tous les péchés et le don de la vie nouvelle.
1428 Or, lappel du Christ à la conversion continue à retentir dans la vie des chrétiens. Cette seconde conversion est une tâche ininterrompue pour toute lÉglise qui " enferme des pécheurs dans son propre sein " et qui " est donc à la fois sainte et appelée à se purifier, et qui poursuit constamment son effort de pénitence et de renouvellement " (LG 8). Cet effort de conversion nest pas seulement une uvre humaine. Elle est le mouvement du " cur contrit " (Ps 51, 19) attiré et mû par la grâce (cf. Jn 6, 44 ; 12, 32) à répondre à lamour miséricordieux de Dieu qui nous a aimés le premier (cf. 1 Jn 4, 10).
1429 En témoigne la conversion de S. Pierre après le triple reniement de son Maître. Le regard dinfinie miséricorde de Jésus provoque les larmes du repentir (Lc 22, 61) et, après la résurrection du Seigneur, la triple affirmation de son amour envers lui (cf. Jn 21, 15-17). La seconde conversion a aussi une dimension communautaire. Cela apparaît dans lappel du Seigneur à toute une Église : " Repends-toi ! " (Ap 2, 5. 16).
S. Ambroise dit des deux conversions que, dans lÉglise, " il y a leau et les larmes : leau du Baptême et les larmes de la Pénitence " (ep. 41, 12 : PL 16, 1116B).
IV. La pénitence intérieure
1430 Comme déjà chez les prophètes, lappel de Jésus à la conversion et à la pénitence ne vise pas dabord des uvres extérieures, " le sac et la cendre ", les jeûnes et les mortifications, mais la conversion du cur, la pénitence intérieure. Sans elle, les uvres de pénitence restent stériles et mensongères ; par contre, la conversion intérieure pousse à lexpression de cette attitude en des signes visibles, des gestes et des uvres de pénitence (cf. Jl 2, 12-13 ; Is 1, 16-17 ; Mt 6, 1-6. 16-18).
1431 La pénitence intérieure est une réorientation radicale de toute la vie, un retour, une conversion vers Dieu de tout notre cur, une cessation du péché, une aversion du mal, avec une répugnance envers les mauvaises actions que nous avons commises. En même temps, elle comporte le désir et la résolution de changer de vie avec lespérance de la miséricorde divine et la confiance en laide de sa grâce. Cette conversion du cur est accompagnée dune douleur et dune tristesse salutaires que les Pères ont appelées animicruciatus (affliction de lesprit), compunctiocordis (repentir du cur) (cf. Cc. Trente : DS 1677-1678 ; 1705 ; Catech. R. 2, 5, 4).
1432 Le cur de lhomme est lourd et endurci. Il faut que Dieu donne à lhomme un cur nouveau (cf. Ez 36, 26-27). La conversion est dabord une uvre de la grâce de Dieu qui fait revenir nos curs à lui : " Convertis-nous, Seigneur, et nous serons convertis " (Lm 5, 21). Dieu nous donne la force de commencer à nouveau. Cest en découvrant la grandeur de lamour de Dieu que notre cur est ébranlé par lhorreur et le poids du péché et quil commence à craindre doffenser Dieu par le péché et dêtre séparé de lui. Le cur humain se convertit en regardant vers Celui que nos péchés ont transpercé (cf. Jn 19, 37 ; Za 12, 10) :
Ayons les yeux fixés sur le sang du Christ et comprenons combien il est précieux à son Père car, répandu pour notre salut, il a ménagé au monde entier la grâce du repentir (S. Clément de Rome, Cor. 7,4).
1433 Depuis Pâques, cest lEsprit Saint qui " confond " le monde en matière de péché " (Jn 16, 8-9), à savoir que le monde na pas cru en Celui que le Père a envoyé. Mais ce même Esprit, qui dévoile le péché, est le Consolateur (cf. Jn 15, 26) qui donne au cur de lhomme la grâce du repentir et de la conversion (cf. Ac 2, 36-38 ; cf. Jean-Paul II, DeV 27-48).
V. Les multiples formes de la pénitence dans la vie chrétienne
1434 La pénitence intérieure du chrétien peut avoir des expressions très variées. LÉcriture et les Pères insistent surtout sur trois formes : le jeûne, la prière, laumône (cf. Tb 12, 8 ; Mt 6, 1-18), qui expriment la conversion par rapport à soi-même, par rapport à Dieu et par rapport aux autres. A côté de la purification radicale opérée par le Baptême ou par le martyre, ils citent, comme moyen dobtenir le pardon des péchés, les efforts accomplis pour se réconcilier avec son prochain, les larmes de pénitence, le souci du salut du prochain (cf. Jc 5, 20) lintercession des saints et la pratique de la charité " qui couvre une multitude de péchés " (1 P 4, 8).
1435 La conversion se réalise dans la vie quotidienne par des gestes de réconciliation, par le souci des pauvres, lexercice et la défense de la justice et du droit (cf. Am 5, 24 ; Is 1, 17), par laveu des fautes aux frères, la correction fraternelle, la révision de vie, lexamen de conscience, la direction spirituelle, lacceptation des souffrances, lendurance de la persécution à cause de la justice. Prendre sa croix, chaque jour, et suivre Jésus est le chemin le plus sûr de la pénitence (cf. Lc 9, 23).
1436 Eucharistie et Pénitence. La conversion et la pénitence quotidiennes trouvent leur source et leur nourriture dans lEucharistie, car en elle est rendu présent le sacrifice du Christ qui nous a réconciliés avec Dieu ; par elle sont nourris et fortifiés ceux qui vivent de la vie du Christ ; " elle est lantidote qui nous libère de nos fautes quotidiennes et nous préserve des péchés mortels " (Cc. Trente : DS 1638).
1437 La lecture de lÉcriture Sainte, la prière de la Liturgie des Heures et du Notre Père, tout acte sincère de culte ou de piété ravive en nous lesprit de conversion et de pénitence et contribue au pardon de nos péchés.
1438 Les temps et les jours de pénitence au cours de lannée liturgique (le temps du carême, chaque vendredi en mémoire de la mort du Seigneur) sont des moments forts de la pratique pénitentielle de lÉglise (cf. SC 109-110 ; CIC, can. 1249-1253 ; CCEO, can. 880-883). Ces temps sont particulièrement appropriés pour les exercices spirituels, les liturgies pénitentielles, les pèlerinages en signe de pénitence, les privations volontaires comme le jeûne et laumône, le partage fraternel (uvres caritatives et missionnaires).
1439 Le mouvement de la conversionet de la pénitence a été merveilleusement décrit par Jésus dans la parabole dite " du fils prodigue " dont le centre est " le père miséricordieux " (Lc 15, 11-24) : la fascination dune liberté illusoire, labandon de la maison paternelle ; la misère extrême dans laquelle le fils se trouve après avoir dilapidé sa fortune ; lhumiliation profonde de se voir obligé de paître des porcs, et pire encore, celle de désirer se nourrir des caroubes que mangeaient les cochons ; la réflexion sur les biens perdus ; le repentir et la décision de se déclarer coupable devant son père ; le chemin du retour ; laccueil généreux par le père ; la joie du père : ce sont là des traits propres au processus de conversion. La belle robe, lanneau et le banquet de fête sont des symboles de cette vie nouvelle, pure, digne, pleine de joie quest la vie de lhomme qui revient à Dieu et au sein de sa famille, qui est lÉglise. Seul le cur du Christ qui connaît les profondeurs de lamour de son Père, a pu nous révéler labîme de sa miséricorde dune manière si pleine de simplicité et de beauté.
VI. Le sacrement de la pénitence et de la réconciliation
1440 Le péché est avant tout offense à Dieu, rupture de la communion avec Lui. Il porte en même temps atteinte à la communion avec lÉglise. Cest pourquoi la conversion apporte à la fois le pardon de Dieu et la réconciliation avec lÉglise, ce quexprime et réalise liturgiquement le sacrement de la Pénitence et de la Réconciliation (cf. LG 11).
Dieu seul pardonne le péché
1441 Dieu seul pardonne les péchés (cf. Mc 2, 7). Parce que Jésus est le Fils de Dieu, il dit de lui-même : " Le Fils de lhomme a le pouvoir de remettre les péchés sur la terre " (Mc 2, 10) et il exerce ce pouvoir divin : " Tes péchés sont pardonnés ! " (Mc 2, 5 ; Lc 7, 48). Plus encore : en vertu de sa divine autorité, il donne ce pouvoir aux hommes (cf. Jn 20, 21-23) pour quils lexercent en son nom.
1442 Le Christ a voulu que son Église soit tout entière, dans sa prière, sa vie et son agir, le signe et linstrument du pardon et de la réconciliation quIl nous a acquis au prix de son sang. Il a cependant confié lexercice du pouvoir dabsolution au ministère apostolique. Celui-ci est chargé du " ministère de la réconciliation " (2 Co 5, 18). Lapôtre est envoyé " au nom du Christ ", et " cest Dieu lui-même " qui, à travers lui, exhorte et supplie : " Laissez vous réconcilier avec Dieu " (2 Co 5, 20).
Réconciliation avec lÉglise
1443 Durant sa vie publique, Jésus na pas seulement pardonné les péchés, il a aussi manifesté leffet de ce pardon : il a réintégré les pécheurs pardonnés dans la communauté du peuple de Dieu doù le péché les avait éloignés ou même exclus. Un signe éclatant en est le fait que Jésus admet les pécheurs à sa table, plus encore, quil se met lui-même à leur table, geste qui exprime de façon bouleversante à la fois le pardon de Dieu (cf. Lc 15) et le retour au sein du peuple de Dieu (cf. Lc 19, 9).
1444 En donnant part aux apôtres de son propre pouvoir de pardonner les péchés, le Seigneur leur donne aussi lautorité de réconcilier les pécheurs avec lÉglise. Cette dimension ecclésiale de leur tâche sexprime notamment dans la parole solennelle du Christ à Simon Pierre : " Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux ; tout ce que tu lieras sur la terre sera lié aux cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié aux cieux " (Mt 16, 19). " Cette même charge de lier et de délier qui a été donnée à Pierre a été aussi donnée au collège des apôtres unis à leur chef (Mt 18, 18 ; 28, 16-20) " (LG 22).
1445 Les mots lier et délier signifient : celui que vous exclurez de votre communion, celui-là sera exclu de la communion avec Dieu ; celui que vous recevez de nouveau dans votre communion, Dieu laccueillera aussi dans la sienne. La réconciliation avec lÉglise est inséparable de la réconciliation avec Dieu
Le sacrement du pardon
1446 Le Christ a institué le sacrement de Pénitence pour tous les membres pécheurs de son Église, avant tout pour ceux qui, après le baptême, sont tombés dans le péché grave et qui ont ainsi perdu la grâce baptismale et blessé la communion ecclésiale. Cest à eux que le sacrement de Pénitence offre une nouvelle possibilité de se convertir et de retrouver la grâce de la justification. Les Pères de lÉglise présentent ce sacrement comme " la seconde planche [de salut] après le naufrage quest la perte de la grâce " (Tertullien, pæn. 4, 2 ; cf. Cc. Trente : DS 1542).
1447 Au cours des siècles la forme concrète, selon laquelle lÉglise a exercé ce pouvoir reçu du Seigneur, a beaucoup varié. Durant les premiers siècles, la réconciliation des chrétiens qui avaient commis des péchés particulièrement graves après leur Baptême (par exemple lidolâtrie, lhomicide ou ladultère), était liée à une discipline très rigoureuse, selon laquelle les pénitents devaient faire pénitence publique pour leurs péchés, souvent durant de longues années, avant de recevoir la réconciliation. A cet " ordre des pénitents " (qui ne concernait que certains péchés graves) on nétait admis que rarement et, dans certaines régions, une seule fois dans sa vie. Pendant le septième siècle, inspirés par la tradition monastique dOrient, les missionnaires irlandais apportèrent en Europe continentale la pratique " privée " de la pénitence qui nexige pas la réalisation publique et prolongée duvres de pénitence avant de recevoir la réconciliation avec lÉglise. Le sacrement se réalise désormais dune manière plus secrète entre le pénitent et le prêtre. Cette nouvelle pratique prévoyait la possibilité de la réitération et ouvrait ainsi le chemin à une fréquentation régulière de ce sacrement. Elle permettait dintégrer dans une seule célébration sacramentelle le pardon des péchés graves et des péchés véniels. Cest, dans les grandes lignes, cette forme de la pénitence que lÉglise pratique jusquà nos jours.
1448 A travers les changements que la discipline et la célébration de ce sacrement ont connu au cours des siècles, on discerne la même structure fondamentale. Elle comporte deux éléments également essentiels ; dune part, les actes de lhomme qui se convertit sous laction de lEsprit Saint : à savoir la contrition, laveu et la satisfaction ; dautre part, laction de Dieu par lintervention de lÉglise. LÉglise qui, par lévêque et ses prêtres, donne au nom de Jésus-Christ le pardon des péchés et fixe la modalité de la satisfaction, prie aussi pour le pécheur et fait pénitence avec lui. Ainsi le pécheur est guéri et rétabli dans la communion ecclésiale.
1449 La formule dabsolution en usage dans lÉglise latine exprime les éléments essentielles de ce sacrement : le Père des miséricordes est la source de tout pardon. Il réalise la réconciliation des pécheurs par la Pâque de son Fils et le don de son Esprit, à travers la prière et le ministère de lÉglise :
" Que Dieu notre Père vous montre sa miséricorde ; par la mort et la résurrection de son Fils, il a réconcilié le monde avec lui et il a envoyé lEsprit Saint pour la rémission des péchés : par le ministère de lÉglise, quil vous donne le pardon et la paix. Et moi, au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, je vous pardonne tous vos péchés ". (Ordo Paenitentiae 46. 55 [Polyglotte Vaticane 1974, p. 27. 37])
VII. Les actes du pénitent
1450 " La Pénitence oblige le pécheur à accepter volontiers tous ses éléments : dans son cur, la contrition ; dans sa bouche, la confession ; dans son comportement, une totale humilité ou une fructueuse satisfaction " (Catech. R. 2, 5, 21 ; cf. Cc. Trente : DS 1673).
La contrition
1451 Parmi les actes du pénitent, la contrition vient en premier lieu. Elle est " une douleur de lâme et une détestation du péché commis avec la résolution de ne plus pécher à lavenir " (Cc. Trente : DS 1676).
1452 Quand elle provient de lamour de Dieu aimé plus que tout, la contrition est appelée " parfaite " (contrition de charité). Une telle contrition remet les fautes vénielles ; elle obtient aussi le pardon des péchés mortels, si elle comporte la ferme résolution de recourir dès que possible à la confession sacramentelle (cf. Cc. Trente : DS 1677)
1453 La contrition dite " imparfaite " (ou " attrition ") est, elle aussi, un don de Dieu, une impulsion de lEsprit Saint. Elle naît de la considération de la laideur du péché ou de la crainte de la damnation éternelle et des autres peines dont est menacé le pécheur (contrition par crainte). Un tel ébranlement de la conscience peut amorcer une évolution intérieure qui sera parachevée sous laction de la grâce, par labsolution sacramentelle. Par elle-même, cependant, la contrition imparfaite nobtient pas le pardon des péchés graves, mais elle dispose à lobtenir dans le sacrement de la Pénitence (cf. Cc. Trente : DS 1678 ; 1705).
1454 Il convient de préparer la réception de ce sacrement par un examen de conscience fait à la lumière de la Parole de Dieu. Les textes les plus adaptés à cet effet sont à chercher dans le Décalogue et dans la catéchèse morale des Évangiles et des lettres apostoliques : Sermon sur la montagne, les enseignements apostoliques (cf. Rm 12-15 ; 1 Co 12-13 ; Ga 5 ; Ep 4-6).
La confession des péchés
1455 La confession des péchés (laveu), même dun point de vue simplement humain, nous libère et facilite notre réconciliation avec les autres. Par laveu, lhomme regarde en face les péchés dont il sest rendu coupable ; il en assume la responsabilité et par là, il souvre de nouveau à Dieu et à la communion de lÉglise afin de rendre possible un nouvel avenir.
1456 Laveu au prêtre constitue une partie essentielle du sacrement de Pénitence : " Les pénitents doivent, dans la confession, énumérer tous les péchés mortels dont ils ont conscience après sêtre examinés sérieusement, même si ces péchés sont très secrets et sils ont été commis seulement contre les deux derniers préceptes du Décalogue (cf. Ex 20, 17 ; Mt 5, 28), car parfois ces péchés blessent plus grièvement lâme et sont plus dangereux que ceux qui ont été commis au su de tous " (Cc. Trente : DS 1680) :
Lorsque les fidèles du Christ sefforcent de confesser tous les péchés qui leur viennent à la mémoire, on ne peut pas douter quils les présentent tous au pardon de la miséricorde divine. Ceux qui agissent autrement et qui en cachent sciemment quelques-uns ne proposent à la bonté divine rien quelle puisse remettre par lintermédiaire du prêtre. Car " si le malade rougit de découvrir sa plaie au médecin, la médecine ne soigne pas ce quelle ignore " (S. Jérôme, Eccl. 10, 11 : PL 23, 1096) (Cc. Trente : DS 1680).
1457 Daprès le commandement de lÉglise, " tout fidèle parvenu à lâge de la discrétion doit confesser au moins une fois par an, les péchés graves dont il a conscience " (DS 1683 ; cf. DS 1708 ; CIC, can. 989). Celui qui a conscience davoir commis un péché mortel ne doit pas recevoir la Sainte Communion, même sil éprouve une grande contrition, sans avoir préalablement reçu labsolution sacramentelle (cf. Cc. Trente : DS 1647 ; 1661), à moins quil nait un motif grave pour communier et quil ne lui soit possible daccéder à un confesseur (cf. CIC, can. 916 ; CCEO, can. 711). Les enfants doivent accéder au sacrement de la Pénitence avant de recevoir pour la première fois la Sainte. Communion (cf. CIC, can. 914).
1458 Sans être strictement nécessaire, la confession des fautes quotidiennes (péchés véniels) est néanmoins vivement recommandée par lÉglise (cf. Cc. Trente : DS 1680 ; CIC, can. 988, § 2 ). En effet, la confession régulière de nos péchés véniels nous aide à former notre conscience, à lutter contre nos penchants mauvais, à nous laisser guérir par le Christ, à progresser dans la vie de lEsprit. En recevant plus fréquemment par ce sacrement, le don de la miséricorde du Père, nous sommes poussés à être miséricordieux comme lui (cf. Lc 6, 36) :
Celui qui confesse ses péchés agit déjà avec Dieu. Dieu accuse tes péchés ; si tu les accuses toi aussi, tu te joins à Dieu. Lhomme et le pécheur sont pour ainsi dire deux réalités : quand tu entends parler de lhomme, cest Dieu qui la fait ; quand tu entends parler du pécheur, cest lhomme lui-même qui la fait. Détruis ce que tu as fais pour que Dieu sauve ce quil a fait… Quand tu commences à détester ce que tu as fait, cest alors que tes uvres bonnes commencent parce que tu accuses tes uvres mauvaises. Le commencement des uvres bonnes, cest la confession des uvres mauvaises. Tu fais la vérité et tu viens à la Lumière (S. Augustin, ev. Jo. 12, 13).
La satisfaction
1459 Beaucoup de péchés causent du tort au prochain. Il faut faire le possible pour le réparer (par exemple restituer des choses volées, rétablir la réputation de celui qui a été calomnié, compenser des blessures). La simple justice exige cela. Mais en plus, le péché blesse et affaiblit le pécheur lui-même, ainsi que ses relations avec Dieu et avec le prochain. Labsolution enlève le péché, mais elle ne remédie pas à tous les désordres que le péché a causés (cf. Cc. Trente : DS 1712). Relevé du péché, le pécheur doit encore recouvrer la pleine santé spirituelle. Il doit donc faire quelque chose de plus pour réparer ses péchés : il doit " satisfaire " de manière appropriée ou " expier " ses péchés. Cette satisfaction sappelle aussi " pénitence ".
1460 La pénitence que le confesseur impose, doit tenir compte de la situation personnelle du pénitent et doit chercher son bien spirituel. Elle doit correspondre autant que possible à la gravité et à la nature des péchés commis. Elle peut consister dans la prière, une offrande, dans les uvres de miséricorde, le service du prochain, dans des privations volontaires, des sacrifices, et surtout dans lacceptation patiente de la croix que nous devons porter. De telles pénitences aident à nous configurer au Christ qui, seul, a expié pour nos péchés (cf. Rm 3, 25 ; 1 Jn 2, 1-2) une fois pour toutes. Elles nous permettent de devenir les cohéritiers du Christ ressuscité, " puisque nous souffrons avec lui " (Rm 8, 17 ; cf. Cc. Trente : DS 1690) :
Mais notre satisfaction, celle que nous acquittons pour nos péchés, nest que par Jésus-Christ : nous qui, de nous mêmes comme tels, ne pouvons rien nous-mêmes, avec laide " de celui qui nous fortifie, nous pouvons tout " (Ph 4, 13). Ainsi lhomme na rien dont il puisse se glorifier, mais toute notre " gloire " est dans le Christ… en qui nous satisfaisons, " en faisant de dignes fruits de pénitence " (Lc 3, 8), qui en Lui puisent leur force, par Lui sont offerts au Père et grâce à Lui sont acceptés par le Père (Cc. Trente : DS 1691).
VIIILe ministre de ce sacrement
1461 Puisque le Christ a confié à ses apôtres le ministère de la réconciliation (cf. Jn 20, 23 ; 2 Co 5, 18), les évêques, leurs successeurs, et les presbytres, collaborateurs des évêques, continuent à exercer ce ministère. En effet, ce sont les évêques et les presbytres, qui ont, en vertu du sacrement de lOrdre, le pouvoir de pardonner tous les péchés " au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ".
1462 Le pardon des péchés réconcilie avec Dieu mais aussi avec lÉglise. Lévêque, chef visible de lÉglise particulière, est donc considéré à juste titre, depuis les temps anciens, comme celui qui a principalement le pouvoir et le ministère de la réconciliation : il est le modérateur de la discipline pénitentielle (LG 26). Les presbytres, ses collaborateurs, lexercent dans la mesure où ils en ont reçu la charge soit de leur évêque (ou dun supérieur religieux) soit du Pape, à travers le droit de lÉglise (cf. CIC, can. 844 ; 967-969 ; 972 ; CCEO, can. 722, §§ 3-4).
1463 Certains péchés particulièrement graves sont frappés de lexcommunication, la peine ecclésiastique la plus sévère, qui empêche le réception des sacrements et lexercice de certains actes ecclésiastiques (cf. CIC, can. 1331 ; CCEO, can. 1431 ; 1434), et dont labsolution, par conséquent, ne peut être accordée, selon le droit de lÉglise, que par le Pape, lévêque du lieu ou des prêtres autorisés par eux (cf. CIC, can. 1354-1357 ; CCEO, can. 1420). En cas de danger de mort tout prêtre, même dépourvu de la faculté dentendre les confessions, peut absoudre de tout péché (cf. CIC, can. 976 ; CCEO, can. 725) et de toute excommunication.
1464 Les prêtres doivent encourager les fidèles à accéder au sacrement de la Pénitence et doivent se montrer disponibles à célébrer ce sacrement chaque fois que les chrétiens le demandent de manière raisonnable (cf. CIC, can. 986 ; CCEO, can. 735 ; PO 13).
1465 En célébrant le sacrement de la Pénitence, le prêtre accomplit le ministère du Bon Pasteur qui cherche la brebis perdue, celui du Bon Samaritain qui panse les blessures, du Père qui attend le Fils prodigue et laccueille à son retour, du juste Juge qui ne fait pas acception de personne et dont le jugement est à la fois juste et miséricordieux. Bref, le prêtre est le signe et linstrument de lamour miséricordieux de Dieu envers le pécheur.
1466 Le confesseur nest pas le maître, mais le serviteur du pardon de Dieu. Le ministre de ce sacrement doit sunir à lintention et à la charité du Christ (cf. PO 13). Il doit avoir une connaissance éprouvée du comportement chrétien, lexpérience des choses humaines, le respect et la délicatesse envers celui qui est tombé ; il doit aimer la vérité, être fidèle au magistère de lÉglise et conduire le pénitent avec patience vers la guérison et la pleine maturité. Il doit prier et faire pénitence pour lui en le confiant à la miséricorde du Seigneur.
1467 Étant donnée la délicatesse et la grandeur de ce ministère et le respect dû aux personnes, lÉglise déclare que tout prêtre qui entend des confessions est obligé de garder un secret absolu au sujet des péchés que ses pénitents lui ont confessés, sous des peines très sévères (CIC, can. 1388, §1 ; CCEO, can. 1456). Il ne peut pas non plus faire état des connaissances que la confession lui donne sur la vie des pénitents. Ce secret, qui nadmet pas dexceptions, sappelle le " sceau sacramentel ", car ce que le pénitent a manifesté au prêtre reste " scellé " par le sacrement.
IX. Les effets de ce sacrement
1468 " Toute lefficacité de la Pénitence consiste à nous rétablir dans la grâce de Dieu et à nous unir à Lui dans une souveraine amitié " (Catech. R. 2, 5, 18). Le but et leffet de ce sacrement sont donc la réconciliation avec Dieu. Chez ceux qui reçoivent le sacrement de Pénitence avec un cur contrit et dans une disposition religieuse, " il est suivi de la paix et de la tranquillité de la conscience, quaccompagne une forte consolation spirituelle " (Cc. Trente : DS 1674). En effet, le sacrement de la réconciliation avec Dieu apporte une véritable " résurrection spirituelle ", une restitution de la dignité et des biens de la vie des enfants de Dieu dont le plus précieux est lamitié de Dieu (Lc 15, 32).
1469 Ce sacrement nous réconcilie avec lÉglise. Le péché ébrèche ou brise la communion fraternelle. Le sacrement de Pénitence la répare ou la restaure. En ce sens, il ne guérit pas seulement celui qui est rétabli dans la communion ecclésiale, il a aussi un effet vivifiant sur la vie de lÉglise qui a souffert du péché dun de ses membres (cf. 1 Co 12, 26). Rétabli ou affermi dans la communion des saints, le pécheur est fortifié par léchange des biens spirituels entre tous les membres vivants du Corps du Christ, quils soient encore dans létat de pèlerinage ou quils soient déjà dans la patrie céleste (cf. LG 48-50) :
Il faut rappeler que la réconciliation avec Dieu a comme conséquence, pour ainsi dire, dautres réconciliations qui porteront remède à dautres ruptures produites par le péché : le pénitent pardonné se réconcilie avec lui-même dans la profondeur de son être, où il récupère la propre vérité intérieure ; il se réconcilie avec les frères que de quelque manière il a offensé et blessé ; il se réconcilie avec lÉglise ; il se réconcilie avec la création toute entière (RP 31).
1470 Dans ce sacrement, le pécheur, en se remettant au jugement miséricordieux de Dieu,anticipe dune certaine façon le jugement auquel il sera soumis à la fin de cette vie terrestre Car cest maintenant, dans cette vie-ci, que nous est offert le choix entre la vie et la mort, et ce nest que par le chemin de la conversion que nous pouvons entrer dans le Royaume doù exclut le péché grave (cf. 1 Co 5, 11 ; Ga 5, 19-21 ; Ap 22, 15). En se convertissant au Christ par la pénitence et la foi, le pécheur passe de la mort à la vie " et il nest pas soumis au jugement " (Jn 5, 24).
X. Les indulgences
1471 La doctrine et la pratique des indulgences dans lÉglise sont étroitement liées aux effets du sacrement de Pénitence.
Quest-ce que lindulgence ?
" Lindulgence est la rémission devant Dieu de la peine temporelle due pour les péchés dont la faute est déjà effacée, rémission que le fidèle bien disposé obtient à certaines conditions déterminées, par laction de lÉglise, laquelle, en tant que dispensatrice de la rédemption, distribue et applique par son autorité le trésor des satisfactions du Christ et des saints " (Paul VI, const. ap. " Indulgentiarum doctrina ", Norme 1).
" Lindulgence est partielle ou plénière, selon quelle libère partiellement ou totalement de la peine temporelle due pour le péché " (ibid, Norme 2). " Tout fidèle peut gagner des indulgences pour soi-même ou les appliquer aux défunts " (CIC, can. 994).
Les peines du péché
1472 Pour comprendre cette doctrine et cette pratique de lÉglise il faut voir que le péché a une double conséquence. Le péché grave nous prive de la communion avec Dieu, et par là il nous rend incapables de la vie éternelle, dont la privation sappelle la " peine éternelle " du péché. Dautre part, tout péché, même véniel, entraîne un attachement malsain aux créatures, qui a besoin de purification, soit ici-bas, soit après la mort, dans létat quon appelle Purgatoire. Cette purification libère de ce quon appelle la " peine temporelle " du péché. Ces deux peines ne doivent pas être conçues comme une espèce de vengeance, infligée par Dieu de lextérieur, mais bien comme découlant de la nature même du péché. Une conversion qui procède dune fervente charité, peut arriver à la totale purification du pécheur, de sorte quaucune peine ne subsisterait (cf. Cc. Trente : DS 1712-1713 ; 1820).
1473 Le pardon du péché et la restauration de la communion avec Dieu entraînent la remise des peines éternelles du péché. Mais des peines temporelles du péché demeurent. Le chrétien doit sefforcer, en supportant patiemment les souffrances et les épreuves de toutes sortes et, le jour venu, en faisant sereinement face à la mort, daccepter comme une grâce ces peines temporelles du péché ; il doit sappliquer, par les uvres de miséricorde et de charité, ainsi que par la prière et les différentes pratiques de la pénitence, à se dépouiller complètement du " vieil homme " et à revêtir " lhomme nouveau " (cf. Ep 4, 24).
Dans la communion des saints
1474 Le chrétien qui cherche à se purifier de son péché et à se sanctifier avec laide de la grâce de Dieu ne se trouve pas seul. " La vie de chacun des enfants de Dieu se trouve liée dune façon admirable, dans le Christ et par le Christ, avec la vie de tous les autres frères chrétiens, dans lunité surnaturelle du Corps mystique du Christ, comme dans une personne mystique " (Paul VI, const. ap. " Indulgentiarum doctrina " 5).
1475 Dans la communion des saints " il existe donc entre les fidèles ceux qui sont en possession de la patrie céleste, ceux qui ont été admis à expier au purgatoire ou ceux qui sont encore en pèlerinage sur la terre un constant lien damour et un abondant échange de tous biens " (ibid.). Dans cet échange admirable, la sainteté de lun profite aux autres, bien au-delà du dommage que le péché de lun a pu causer aux autres. Ainsi, le recours à la communion des saints permet au pécheur contrit dêtre plus tôt et plus efficacement purifié des peines du péché.
1476 Ces biens spirituels de la communion des saints, nous les appelons aussi le trésor de lÉglise, " qui nest pas une somme de biens, ainsi quil en est des richesses matérielles accumulées au cours des siècles, mais qui est le prix infini et inépuisable quont auprès de Dieu les expiations et les mérites du Christ Notre Seigneur, offerts pour que lhumanité soit libérée du péché et parvienne à la communion avec le Père. Cest dans le Christ, notre Rédempteur, que se trouvent en abondance les satisfactions et les mérites de sa rédemption (cf. He 7, 23-25 ; 9, 11-28) ".
1477 " Appartiennent également à ce trésor le prix vraiment immense, incommensurable et toujours nouveau quont auprès de Dieu les prières et les bonnes uvres de la bienheureuse Vierge Marie et de tous les saints qui se sont sanctifiés par la grâce du Christ, en marchant sur ses traces, et ont accompli une uvre agréable au Père, de sorte quen travaillant à leur propre salut, ils ont coopéré également au salut de leurs frères dans lunité du Corps mystique " (Paul VI, const. ap. " Indulgentiarum doctrina " 5).
Obtenir lindulgence de Dieu par lÉglise
1478 Lindulgence sobtient par lÉglise qui, en vertu du pouvoir de lier et de délier qui lui a été accordé par le Christ Jésus, intervient en faveur dun chrétien et lui ouvre le trésor des mérites du Christ et des saints pour obtenir du Père des miséricordes la remise des peines temporelles dues pour ses péchés. Cest ainsi que lÉglise ne veut pas seulement venir en aide à ce chrétien, mais aussi linciter à des uvres de piété, de pénitence et de charité (cf. Paul VI, loc. cit. 8 ; Cc. Trente : DS 1835).
1479 Puisque les fidèles défunts en voie de purification sont aussi membres de la même communion des saints, nous pouvons les aider entre autres en obtenant pour eux des indulgences, de sorte quils soient acquittés des peines temporelles dues pour leurs péchés.
XI. La célébration du sacrement de pénitence
1480 Comme tous les sacrements, la pénitence est une action liturgique. Tels sont ordinairement les éléments de la célébration : salutation et bénédiction du prêtre, lecture de la Parole de Dieu pour éclairer la conscience et susciter la contrition, et exhortation à la repentance ; la confession qui reconnaît les péchés et les manifeste au prêtre ; limposition et acceptation de la pénitence ; labsolution du prêtre ; louange daction de grâces et envoi avec la bénédiction du prêtre.
1481 La liturgie byzantine connaît plusieurs formules dabsolution, de forme déprécative, qui expriment admirablement le mystère du pardon : " Que le Dieu, qui par le prophète Nathan, a pardonné à David lorsquil eut confessé ses propres péchés, et à Pierre lorsquil eut pleuré amèrement, et à la courtisane lorsquelle eut répandu ses larmes sur ses pieds, et au pharisien, et au prodigue, que ce même Dieu vous pardonne, par moi, pécheur, en cette vie et dans lautre et quIl vous fasse comparaître sans vous condamner à son redoutable tribunal, Lui qui est béni dans les siècles des siècles. Amen. " (Euxologia to mèga [Athens 1992] p. 222)
1482 Le sacrement de la Pénitence peut aussi avoir lieu dans le cadre dune célébration communautaire, dans laquelle on se prépare ensemble à la confession et on rend grâce ensemble pour le pardon reçu. Ici, la confession personnelle des péchés et labsolution individuelle sont insérées dans une liturgie de la Parole de Dieu, avec lectures et homélie, examen de conscience mené en commun, demande communautaire du pardon, prière du " Notre Père " et action de grâce en commun. Cette célébration communautaire exprime plus clairement le caractère ecclésial de la pénitence. Quelle que soit cependant la manière de sa célébration, le sacrement de Pénitence est toujours, daprès sa nature même, une action liturgique, donc ecclésiale et publique (cf. SC 26-27).
1483 En des cas de nécessité grave on peut recourir à la célébration communautaire de la réconciliation avec confession générale et absolution générale. Une telle nécessité grave peut se présenter lorsquil y a un danger imminent de mort sans que le ou les prêtres aient le temps suffisant pour entendre la confession de chaque pénitent. La nécessité grave peut exister aussi lorsque, compte tenu du nombre des pénitents, il ny a pas assez de confesseurs pour entendre dûment les confessions individuelles dans un temps raisonnable, de sorte que les pénitents, sans faute de leur part, se verraient privés pendant longtemps de la grâce sacramentelle ou de la sainte communion. Dans ce cas les fidèles doivent avoir, pour la validité de labsolution, le propos de confesser individuellement leurs péchés graves en temps voulu (cf. CIC, can. 962, § 1). Cest à lEvêque diocésain de juger si les conditions requises pour labsolution générale existent (cf. CIC, can. 961, § 2). Un grand concours de fidèles à loccasion de grandes fêtes ou de pèlerinages ne constitue pas un cas dune telle grave nécessité (cf. CIC, can. 961, § 1)
1484 " La confession individuelle et intégrale suivie de labsolution demeure le seul mode ordinaire par lequel les fidèles se réconcilient avec Dieu et lÉglise, sauf si une impossibilité physique ou morale dispense dune telle confession " (OP 31). Ceci nest pas sans raisons profondes. Le Christ agit en chacun des sacrements. Il sadresse personnellement à chacun des pécheurs : " Mon enfant, tes péchés sont remis " (Mc 2, 5) ; il est le médecin qui se penche sur chacun des malades qui ont besoin de lui (cf. Mc 2, 17) pour les guérir ; il les relève et les réintègre dans la communion fraternelle. La confession personnelle est donc la forme la plus significative de la réconciliation avec Dieu et avec lÉglise.
En bref
1485 " Le soir de Pâques, le Seigneur Jésus se montra à ses Apôtres et leur dit : Recevez lEsprit Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus " (Jn 20, 22-23).
1486 Le pardon des péchés commis après le Baptême est accordé par un sacrement propre appelé sacrement de la conversion, de la confession, de la pénitence ou de la réconciliation.
1487 Qui pèche blesse lhonneur de Dieu et son amour, sa propre dignité dhomme appelé à être fils de Dieu et le bien-être spirituel de lÉglise dont chaque chrétien doit être une pierre vivante.
1488 Aux yeux de la foi, aucun mal nest plus grave que le péché et rien na de pires conséquences pour les pécheurs eux-mêmes, pour lÉglise et pour le monde entier.
1489 Revenir à la communion avec Dieu après lavoir perdue par le péché, est un mouvement né de la grâce du Dieu plein de miséricorde et soucieux du salut des hommes. Il faut demander ce don précieux pour soi-même comme pour autrui.
1490 Le mouvement de retour à Dieu, appelé conversion et repentir, implique une douleur et une aversion vis-à-vis des péchés commis, et le propos ferme de ne plus pécher à lavenir. La conversion touche donc le passé et lavenir ; elle se nourrit de lespérance en la miséricorde divine.
1491 Le sacrement de la Pénitence est constitué par lensemble des trois actes posés par le pénitent, et par labsolution du prêtre. Les actes du pénitent sont : le repentir, la confession ou manifestation des péchés au prêtre et le propos daccomplir la réparation et les uvres de réparation.
1492 Le repentir (appelé aussi contrition) doit être inspiré par des motifs qui relèvent de la foi. Si le repentir est conçu par amour de charité envers Dieu, on le dit " parfait " ; sil est fondé sur dautres motifs, on lappelle " imparfait ".
1493 Celui qui veut obtenir la réconciliation avec Dieu et avec lÉglise, doit confesser au prêtre tous les péchés graves quil na pas encore confessé et dont il se souvient après avoir examiné soigneusement sa conscience. Sans être en soi nécessaire, la confession des fautes vénielles est néanmoins vivement recommandée par lÉglise.
1494 Le confesseur propose au pénitent laccomplissement de certains actes de " satisfaction " ou de " pénitence ", en vue de réparer le dommage causé par le péché et de rétablir les habitudes propres au disciple du Christ.
1495 Seuls les prêtres qui ont reçu de lautorité de lÉglise la faculté dabsoudre peuvent pardonner les péchés au nom du Christ.
1496 Les effets spirituels du sacrement de Pénitence sont :
la réconciliation avec Dieu par laquelle le pénitent recouvre la grâce,
la réconciliation avec lÉglise ;
la remise de la peine éternelle encourue par les péchés mortels ;
la remise, au moins en partie, des peines temporelles, suites du péché ;
la paix et la sérénité de la conscience, et la consolation spirituelle ;
laccroissement des forces spirituelles pour le combat chrétien.
1497 La confession individuelle et intégrale des péchés graves suivie de labsolution demeure le seul moyen ordinaire pour la réconciliation avec Dieu et avec lÉglise.
1498 Par les indulgences les fidèles peuvent obtenir pour eux-mêmes et aussi pour les âmes du Purgatoire, la rémission des peines temporelles, suites des péchés.
Article 5
LOnction des malades
1499 " Par lOnction sacrée des malades et la prière des prêtres, cest lÉglise toute entière qui recommande les malades au Seigneur souffrant et glorifié, pour quil les soulage et les sauve ; bien mieux, elle les exhorte, en sassociant librement à la passion et à la mort du Christ à apporter leur part pour le bien du peuple de Dieu " (LG 11).
I. Ses fondements dans lEconomie du Salut
La maladie dans la vie humaine
1500 La maladie et la souffrance ont toujours été parmi les problèmes les plus graves qui éprouvent la vie humaine. Dans la maladie, lhomme fait lexpérience de son impuissance, de ses limites et de sa finitude. Toute maladie peut nous faire entrevoir la mort.
1501 La maladie peut conduire à langoisse, au repliement sur soi, parfois même au désespoir et à la révolte contre Dieu. Elle peut aussi rendre la personne plus mûre, laider à discerner dans sa vie ce qui nest pas essentiel pour se tourner vers ce qui lest. Très souvent, la maladie provoque une recherche de Dieu, un retour à Lui.
Le malade devant Dieu
1502 Lhomme de lAncien Testament vit la maladie en face de Dieu. Cest devant Dieu quil déverse sa plainte sur sa maladie (cf. Ps 38) et cest de Lui, le Maître de la vie et de la mort, quil implore la guérison (cf. Ps 6, 3 ; Is 38). La maladie devient chemin de conversion (cf. Ps 38, 5 ; 39, 9. 12) et le pardon de Dieu inaugure la guérison (cf. Ps 32, 5 ; 107, 20 ; Mc 2, 5-12). Israël fait lexpérience que la maladie est, dune façon mystérieuse, liée au péché et au mal, et que la fidélité à Dieu, selon sa Loi, rend la vie : " car cest moi, le Seigneur, qui suis ton médecin " (Ex 15, 26). Le prophète entrevoit que la souffrance peut aussi avoir un sens rédempteur pour les péchés des autres (cf. Is 53, 11). Enfin, Isaïe annonce que Dieu amènera un temps pour Sion où il pardonnera toute faute et guérira toute maladie (cf. Is 33, 24).
Le Christ médecin
1503 La compassion du Christ envers les malades et ses nombreuses guérisons dinfirmes de toute sorte (cf. Mt 4, 24) sont un signe éclatant de ce " que Dieu a visité son peuple " (Lc 7, 16) et que le Royaume de Dieu est tout proche. Jésus na pas seulement pouvoir de guérir, mais aussi de pardonner les péchés (cf. Mc 2, 5-12) : il est venu guérir lhomme tout entier, âme et corps ; il est le médecin dont les malades ont besoin (cf. Mc 2, 17). Sa compassion envers tous ceux qui souffrent va si loin quil sidentifie avec eux : " Jai été malade et vous mavez visité " (Mt 25, 36). Son amour de prédilection pour les infirmes na cessé, tout au long des siècles, déveiller lattention toute particulière des chrétiens envers tous ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur âme. Elle est à lorigine des efforts inlassables pour les soulager.
1504 Souvent Jésus demande aux malades de croire (cf. Mc 5, 34. 36 ; 9, 23). Il se sert de signes pour guérir : salive et imposition des mains (cf. Mc 7, 32-36 ; 8, 22-25), boue et ablution (cf. Jn 9, 6 s). Les malades cherchent à le toucher (cf. Mc 1, 41 ; 3, 10 ; 6, 56) " car une force sortait de lui qui les guérissait tous " (Lc 6, 19). Ainsi, dans les sacrements, le Christ continue à nous " toucher " pour nous guérir.
1505 Emu par tant de souffrances, le Christ non seulement se laisse toucher par les malades, mais il fait siennes leurs misères : " Il a pris nos infirmités et sest chargé de nos maladies " (Mt 8, 17 ; cf. Is 53, 4). Il na pas guéri tous les malades. Ses guérisons étaient des signes de la venue du Royaume de Dieu. Ils annonçaient une guérison plus radicale : la victoire sur le péché et la mort par sa Pâque. Sur la Croix, le Christ a pris sur lui tout le poids du mal (cf. Is 53, 4-6) et a enlevé le " péché du monde " (Jn 1, 29), dont la maladie nest quune conséquence. Par sa passion et sa mort sur la Croix, le Christ a donné un sens nouveau à la souffrance : elle peut désormais nous configurer à lui et nous unir à sa passion rédemptrice.
" Guérissez les malades… "
1506 Le Christ invite ses disciples à le suivre en prenant à leur tour leur croix (cf. Mt 10, 38). En le suivant, ils acquièrent un nouveau regard sur la maladie et sur les malades. Jésus les associe à sa vie pauvre et servante. Il les fait participer à son ministère de compassion et de guérison : " Ils sen allèrent prêcher quon se repentît ; et ils chassaient beaucoup de démons et faisaient des onctions dhuile à de nombreux malades et les guérissaient " (Mc 6, 12-13).
1507 Le Seigneur ressuscité renouvelle cet envoi (" Par mon nom … ils imposeront les mains aux malades et ceux-ci seront guéris " : Mc 16, 17-18) et le confirme par les signes que lÉglise accomplit en invoquant son nom (cf. Ac 9, 34 ; 14, 3). Ces signes manifestent dune manière spéciale que Jésus est vraiment " Dieu qui sauve " (cf. Mt 1, 21 ; Ac 4, 12).
1508 LEsprit Saint donne à certains un charisme spécial de guérison (cf. 1 Co 12, 9. 28. 30) pour manifester la force de la grâce du Ressuscité. Même les prières les plus intenses nobtiennent toutefois pas la guérison de toutes les maladies. Ainsi S. Paul doit apprendre du Seigneur que " ma grâce te suffit : car ma puissance se déploie dans la faiblesse " (2 Co 12, 9), et que les souffrances à endurer peuvent avoir comme sens que " je complète dans ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son Corps qui est lÉglise " (Col 1, 24).
1509 " Guérissez les malades ! " (Mt 10, 8). Cette charge, lÉglise la reçue du Seigneur et tâche de la réaliser autant par les soins quelle apporte aux malades que par la prière dintercession avec laquelle elle les accompagne. Elle croit en la présence vivifiante du Christ, médecin des âmes et des corps. Cette présence est particulièrement agissante à travers les sacrements, et de manière toute spéciale par lEucharistie, pain qui donne la vie éternelle (cf. Jn 6, 54. 58) et dont S. Paul insinue le lien avec la santé corporelle (cf. 1 Co 11, 30).
1510 LÉglise apostolique connaît cependant un rite propre en faveur des malades, attesté par S. Jacques : " Quelquun parmi vous est malade ? Quil appelle les presbytres de lÉglise et quils prient sur lui, après lavoir oint dhuile au nom du Seigneur. La prière de la foi sauvera le patient, et le Seigneur le relèvera. Sil a commis des péchés, ils lui seront remis " (Jc 5, 14-15). La Tradition a reconnu dans ce rite un des sept sacrements de lÉglise (cf. DS 216 ; 1324-1325 ; 1695-1696 ; 1716-1717).
Un sacrement des malades
1511 LÉglise croit et confesse quil existe, parmi les sept sacrements, un sacrement spécialement destiné à réconforter ceux qui sont éprouvés par la maladie : lOnction des malades :
Cette onction sainte des malades a été instituée par le Christ notre Seigneur comme un sacrement du Nouveau Testament, véritablement et proprement dit, insinué par Marc [cf. Mc 6, 13], mais recommandé aux fidèles et promulgué par Jacques, apôtre et frère du Seigneur [cf. Jc 5, 14-15] (Cc. Trente : DS 1695).
1512 Dans la tradition liturgique, tant en Orient quen Occident, on possède dès lantiquité, des témoignages donctions de malades pratiquées avec de lhuile bénite. Au cours des siècles, lOnction des malades a été conférée de plus en plus exclusivement à ceux qui étaient sur le point de mourir. A cause de cela elle avait reçu le nom d " Extrême-Onction ". Malgré cette évolution la liturgie na jamais omis de prier le Seigneur afin que le malade recouvre sa santé si cela est convenable à son salut (cf. DS 1696).
1513 La Constitution apostolique " Sacram unctionem infirmorum " du 30 novembre 1972, à la suite du deuxième Concile du Vatican (cf. SC 73) a établi que désormais, dans le rite romain, on observe ce qui suit :
Le sacrement de lOnction des malades est conféré aux personnes dangereusement malades, en les oignant sur le front et sur les mains avec de lhuile dûment bénite huile dolive ou autre huile extraite de plantes en disant une seule fois : " Per istam sanctam unctionem et suam piissimam misericordiam adiuvet te Dominus gratia Spiritus Sancti, ut a peccatis liberatum te salvet atque propitius allevet " (Par cette onction sainte, que le Seigneur, en sa grande bonté vous réconforte par la grâce de lEsprit Saint. Ainsi, vous ayant libéré de tous péchés, quIl vous sauve et vous relève cf. CIC, can. 847, § 1).
II. Qui reçoit et qui administre ce sacrement ?
En cas de maladie grave …
1514 LOnction des malades " nest pas seulement le sacrement de ceux qui se trouvent à toute extrémité. Aussi, le temps opportun pour la recevoir est-il certainement déjà arrivé lorsque le fidèle commence à être en danger de mort à cause de la maladie par suite daffaiblissement physique ou de vieillesse " (SC 73 ; cf. CIC, can. 1004, § 1 ; 1005 ; 1007 ; CCEO, can. 738).
1515 Si un malade qui a reçu lOnction recouvre la santé, il peut, en cas de nouvelle maladie grave, recevoir de nouveau ce sacrement. Au cours de la même maladie, ce sacrement peut être réitéré si la maladie saggrave. Il est approprié de recevoir lOnction des malades au seuil dune opération importante. Il en va de même pour les personnes âgées dont la fragilité saccentue.
" …quil appelle les presbytres de lÉglise "
1516 Seuls les prêtres (évêques et presbytres) sont les ministres de lOnction des malades (cf. Cc. Trente : DS 1697 ; 1719 ; CIC, can. 1003 ; CCEO, can. 739, § 1). Cest le devoir des pasteurs dinstruire les fidèles des bienfaits de ce sacrement. Que les fidèles encouragent les malades à faire appel au prêtre pour recevoir ce sacrement. Que les malades se préparent pour le recevoir dans les bonnes dispositions, avec laide de leur pasteur et de toute la communauté ecclésiale qui est invitée à entourer tout spécialement les malades de ses prières et de ses attentions fraternelles.
III. Comment est célébré ce sacrement ?
1517 Comme tous les sacrements, lOnction des malades est une célébration liturgique et communautaire (cf. SC 27), quelle ait lieu en famille, à lhôpital ou à lÉglise, pour un seul malade ou pour tout un groupe dinfirmes. Il est très convenable quelle soit célébrée au sein de lEucharistie, mémorial de la Pâque du Seigneur. Si les circonstances y invitent, la célébration du sacrement peut être précédée du sacrement de Pénitence et suivie du sacrement de lEucharistie. En tant que sacrement de la Pâque du Christ, lEucharistie devrait toujours être le dernier sacrement de la pérégrination terrestre, le " viatique " pour le " passage " vers la vie éternelle.
1518 Parole et sacrement forment un tout inséparable. La Liturgie de la Parole, précédée dun acte de pénitence, ouvre la célébration. Les paroles du Christ, le témoignage des Apôtres éveillent la foi du malade et de la communauté pour demander au Seigneur la force de son Esprit.
1519 La célébration du sacrement comprend principalement les éléments suivants : " les prêtres de lÉglise " (Jc 5, 14) imposent en silence les mains aux malades ; ils prient sur les malades dans la foi de lÉglise (cf. Jc 5, 15) ; cest lépiclèse propre de ce sacrement ; ils donnent alors lonction avec lhuile bénite, si possible, par lévêque.
Ces actions liturgiques indiquent quelle grâce ce sacrement confère aux malades.
IV. Les effets de la célébration de ce sacrement
1520 Un don particulier de lEsprit Saint. La grâce première de ce sacrement est une grâce de réconfort, de paix et de courage pour vaincre les difficultés propres à létat de maladie grave ou à la fragilité de la vieillesse. Cette grâce est un don du Saint-Esprit qui renouvelle la confiance et la foi en Dieu et fortifie contre les tentations du malin, tentation de découragement et dangoisse de la mort (cf. He 2, 15). Cette assistance du Seigneur par la force de son Esprit veut conduire le malade à la guérison de lâme, mais aussi à celle du corps, si telle est la volonté de Dieu (cf. Cc. Florence : DS 1325). En outre, " sil a commis des péchés, ils lui seront remis " (Jc 5, 15 ; cf. Cc. Trente : DS 1717).
1521 Lunion à la Passion du Christ. Par la grâce de ce sacrement, le malade reçoit la force et le don de sunir plus intimement à la Passion du Christ : il est dune certaine façon consacré pour porter du fruit par la configuration à la Passion rédemptrice du Sauveur. La souffrance, séquelle du péché originel, reçoit un sens nouveau : elle devient participation à luvre salvifique de Jésus.
1522 Une grâce ecclésiale. Les malades qui reçoivent ce sacrement, " en sassociant librement à la Passion et à la mort du Christ ", apportent " leur part pour le bien du peuple de Dieu " (LG 11). En célébrant ce sacrement, lÉglise, dans la communion des saints, intercède pour le bien du malade. Et le malade, à son tour, par la grâce de ce sacrement, contribue à la sanctification de lÉglise et au bien de tous les hommes pour lesquels lÉglise souffre et soffre, par le Christ, à Dieu le Père.
1523 Une préparation au dernier passage. Si le sacrement de lOnction des malades est accordé à tous ceux qui souffrent de maladies et dinfirmités graves, il lest à plus forte raison à ceux qui sont sur le point de sortir de cette vie (In exitu vitæ constituti : Cc. Trente : DS 1698), de sorte quon la aussi appelé sacramentumexeuntium (ibid.). LOnction des malades achève de nous conformer à la mort et à la résurrection du Christ, comme le Baptême avait commencé de le faire. Elle parachève les onctions saintes qui jalonnent toute la vie chrétienne ; celle du Baptême avait scellé en nous la vie nouvelle ; celle de la Confirmation nous avait fortifiés pour le combat de cette vie. Cette dernière onction munit la fin de notre vie terrestre comme dun solide rempart en vue des dernières luttes avant lentrée dans la Maison du Père (ibid. : DS 1694).
. Le Viatique, dernier sacrement du chrétien
1524 A ceux qui vont quitter cette vie, lÉglise offre, en plus de lOnction des malades, lEucharistie comme viatique. Reçue à ce moment de passage vers le Père, la Communion au Corps et au Sang du Christ a une signification et une importance particulières. Elle est semence de vie éternelle et puissance de résurrection, selon les paroles du Seigneur : " Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle et moi, je le ressusciterai au dernier jour " (Jn 6, 54). Sacrement du Christ mort et ressuscité, lEucharistie est ici sacrement du passage de la mort à la vie, de ce monde vers le Père (cf. Jn 13, 1).
1525 Ainsi, comme les sacrements du Baptême, de la Confirmation et de lEucharistie constituent une unité appelée " les sacrements de linitiation chrétienne ", on peut dire que la Pénitence, la Sainte Onction et lEucharistie, en tant que viatique, constituent, quand la vie chrétienne touche à son terme, " les sacrements qui préparent à la Patrie " ou les sacrements qui achèvent la pérégrination.
En bref
1526 " Quelquun parmi vous est-il malade ? Quil appelle les presbytres de lÉglise et quils prient sur lui, après lavoir oint dhuile au nom du Seigneur. La prière de la foi sauvera le patient, et le Seigneur le relèvera. Sil a commis des péchés, ils lui seront remis " (Jc 5, 14-15).
1527 Le sacrement de lOnction des malades a pour but de conférer une grâce spéciale au chrétien qui éprouve les difficultés inhérentes à létat de maladie grave ou à la vieillesse.
1528 Le temps opportun pour recevoir la Sainte Onction est certainement arrivé lorsque le fidèle commence à se trouver en danger de mort pour cause de maladie ou de vieillesse.
1529 Chaque fois quun chrétien tombe gravement malade, il peut recevoir la Sainte Onction, de même lorsquaprès lavoir reçue la maladie saggrave.
1530 Seuls les prêtres (presbytres et évêques) peuvent donner le sacrement de lOnction des malades ; pour le conférer ils emploient de lhuile bénite par lEvêque, ou, au besoin, par le presbytre célébrant lui-même.
1531 Lessentiel de la célébration de ce sacrement consiste en lonction sur le front et les mains du malade (dans le rite romain) ou sur dautres parties du corps (en Orient), onction accompagnée de la prière liturgique du prêtre célébrant qui demande la grâce spéciale de ce sacrement.
1532La grâce spéciale du Sacrement de lOnction des malades a comme effets :
lunion du malade à la Passion du Christ, pour son bien et pour celui de toute lÉglise ;
le réconfort, la paix et le courage pour supporter chrétiennement les souffrances de la maladie ou de la vieillesse ;
le pardon des péchés si le malade na pas pu lobtenir par le sacrement de la Pénitence ;
le rétablissement de la santé, si cela convient au salut spirituel ;
la préparation au passage à la vie éternelle.
Chapitre troisième
Les sacrements du service de la communion
1533 Le Baptême, la Confirmation et lEucharistie sont les sacrements de linitiation chrétienne. Ils fondent la vocation commune de tous les disciples du Christ, vocation à la sainteté et à la mission dévangéliser le monde. Ils confèrent les grâces nécessaires pour la vie selon lEsprit en cette vie de pèlerins en marche vers la patrie.
1534 Deux autres sacrements, lOrdre et le Mariage, sont ordonnés au salut dautrui. Sils contribuent également au salut personnel, cest à travers le service des autres quils le font. Ils confèrent une mission particulière dans lÉglise et servent à lédification du peuple de Dieu.
1535 En ces sacrements, ceux qui ont été déjà consacrés par le Baptême et la Confirmation (cf. LG 10) pour le sacerdoce commun de tous les fidèles, peuvent recevoir des consécrations particulières. Ceux qui reçoivent le sacrement de lOrdre sont consacrés pour être, au nom du Christ, " par la parole et la grâce de Dieu les pasteurs de lÉglise " (LG 11). De leur côté, " les époux chrétiens, pour accomplir dignement les devoirs de leur état, sont fortifiés et comme consacrés par un sacrement spécial " (GS 48, 2).
Article 6
Le sacrement de lOrdre
1536 LOrdre est le sacrement grâce auquel la mission confiée par le Christ à ses Apôtres continue à être exercée dans lÉglise jusquà la fin des temps : il est donc le sacrement du ministère apostolique. Il comporte trois degrés : lépiscopat, le presbytérat et le diaconat.
[Sur linstitution et la mission du ministère apostolique par le Christ v. N. 871 s. Ici, il nest question que de la voie sacramentelle par laquelle est transmis ce ministère]
I. Pourquoi ce nom de sacrement de lordre ?
1537 Le mot Ordre, dans lantiquité romaine, désignait des corps constitués au sens civil, surtout le corps de ceux qui gouvernent. Ordinatio désigne lintégration dans un ordo. Dans lÉglise, il y a des corps constitués que la Tradition, non sans fondements dans lÉcriture Sainte (cf. He 5, 6 ; 7, 11 ; Ps 110, 4), appelle dès les temps anciens du nom de taxeis (en grec), dordines : ainsi la liturgie parle de lordo episcoporum, de lordo presbyterorum, de lordo diaconorum. Dautres groupes, reçoivent aussi ce nom dordo : les catéchumènes, les vierges, les époux, les veuves…
1538 Lintégration dans un de ces corps de lÉglise se faisait par un rite appelé ordinatio, acte religieux et liturgique, qui était une consécration, une bénédiction ou un sacrement. Aujourdhui le mot ordinatio est réservé à lacte sacramentel qui intègre dans lordre des évêques, des presbytres et des diacres et qui va au delà dune simple élection,désignation, délégation ou institution par la communauté, car elle confère un don du Saint-Esprit permettant dexercer un " pouvoir sacré " (sacra potestas : cf. LG 10) qui ne peut venir que du Christ lui-même, par son Église. Lordination est aussi appelée consecratio car elle est une mise à part et une investiture par le Christ lui-même, pour son Église. Limposition des mains de lévêque, avec la prière consécratoire, constituent le signe visible de cette consécration.
II. Le sacrement de lOrdre dans léconomie du salut
Le sacerdoce de lAncienne Alliance
1539 Le peuple élu fut constitué par Dieu comme " un royaume de prêtres et une nation consacrée " (Ex 19, 6 ; cf. Is 61, 6). Mais au-dedans du peuple dIsraël, Dieu choisit lune des douze tribus, celle de Lévi, mise à part pour le service liturgique (cf. Nb 1, 48-53) ; Dieu lui-même est sa part dhéritage (cf. Jos 13, 33). Un rite propre a consacré les origines du sacerdoce de lAncienne Alliance (cf. Ex 29, 1-30 ; Lv 8). Les prêtres y sont " établis pour intervenir en faveur des hommes dans leur relations avec Dieu, afin doffrir dons et sacrifices pour les péchés " (cf. He 5, 1)
1540 Institué pour annoncer la parole de Dieu (cf. Ml 2, 7-9) et pour rétablir la communion avec Dieu par les sacrifices et la prière, ce sacerdoce reste pourtant impuissant à opérer le salut, ayant besoin de répéter sans cesse les sacrifices, et ne pouvant aboutir à une sanctification définitive (cf. He 5, 3 ; 7, 27 ; 10, 1-4), que seul devait opérer le sacrifice du Christ.
1541 La liturgie de lÉglise voit cependant dans le sacerdoce dAaron et le service des lévites, tout comme dans linstitution des soixante-dix " Anciens " (cf. Nb 11, 24-25), des préfigurations du ministère ordonné de la Nouvelle Alliance. Ainsi, dans le rite latin, lÉglise prie dans la préface consécratoire de lordination des évêques :
Dieu et Père de Jésus Christ notre Seigneur, (…) tout au long de lancienne Alliance tu commençais à donner forme à ton Église ; dès lorigine, tu as destiné le peuple issu dAbraham à devenir un peuple saint ; tu as institué des chefs et des prêtres et toujours pourvu au service de ton sanctuaire … (Pontificale Romanum. De Ordinatione Episcopi, presbyterorum et diaconorum 47 ; ed. typica altera, Polyglotte Vaticane 1990 p. 24)
1542Lors de lordination des prêtres, lÉglise prie :
" Seigneur, Père très saint, … déjà dans lAncienne Alliance, et comme pour annoncer les sacrements à venir, tu avais mis à la tête du peuple des grands prêtres chargés de le conduire, mais tu as aussi choisi dautres hommes que tu as associés à leur service et qui les ont secondés dans leur tâche. Cest ainsi que tu as communiqué à soixante-dix hommes, pleins de sagesse, lesprit que tu avais donné à Moïse, et tu as fait participer les fils dAaron à la consécration que leur père avait reçue " (ibid n. 159 p. 91-92).
1543 Et dans la prière consécratoire pour lordination des diacres, lÉglise confesse :
" Père très saint … , pour lédification de ce temple nouveau (lÉglise), tu as établi des ministres des trois ordres différents, les évêques, les prêtres et les diacres, chargés, les uns et les autres, de te servir, comme autrefois, dans lAncienne Alliance, pour le service de ta demeure, tu avais mis à part les fils de la tribu de Lévi et tu étais leur héritage " (ibid n. 207).
Lunique sacerdoce du Christ
1544 Toutes les préfigurations du sacerdoce de lAncienne Alliance trouvent leur accomplissement dans le Christ Jésus " unique médiateur entre Dieu et les hommes " (1 Tm 2, 5). Melchisédech, " prêtre du Dieu Très Haut " (Gn 14, 18), est considéré par la Tradition chrétienne comme une préfiguration du sacerdoce du Christ, unique " Grand prêtre selon lordre de Melchisédech " (He 5, 10 ; 6, 20), " saint, innocent, immaculé " (He 7, 26), qui, " par une oblation unique a rendu parfaits pour toujours ceux quil sanctifie " (He 10, 14), cest-à-dire par lunique sacrifice de sa Croix.
1545 Le sacrifice rédempteur du Christ est unique, accompli une fois pour toutes. Et pourtant, il est rendu présent dans le sacrifice eucharistique de lÉglise. Il en est de même de lunique sacerdoce du Christ : il est rendu présent par le sacerdoce ministériel sans que soit diminuée lunicité du sacerdoce du Christ : " Aussi le Christ est-Il le seul vrai prêtre, les autres nétant que ses ministres " (S. Thomas dA., Hebr. 7, 4).
Deux participations à lunique sacerdoce du Christ
1546 Le Christ, grand prêtre et unique médiateur, a fait de lÉglise " un Royaume de prêtres pour son Dieu et Père " (Ap 1, 6 ; cf. Ap 5, 9-10 ; 1 P 2, 5. 9). Toute la communauté des croyants est, comme telle, sacerdotale. Les fidèles exercent leur sacerdoce baptismal à travers leur participation, chacun selon sa vocation propre, à la mission du Christ, Prêtre, Prophète et Roi. Cest par les sacrements du Baptême et de la Confirmation que les fidèles sont " consacrés pour être … un sacerdoce saint " (LG 10).
1547 Le sacerdoce ministériel ou hiérarchique des évêques et des prêtres, et le sacerdoce commun de tous les fidèles, bien que " lun et lautre, chacun selon son mode propre, participent de lunique sacerdoce du Christ " (LG 10), diffèrent cependant essentiellement, tout en étant " ordonnés lun à lautre " (LG 10). En quel sens ? Alors que le sacerdoce commun des fidèles se réalise dans le déploiement de la grâce baptismale, vie de foi, despérance et de charité, vie selon lEsprit, le sacerdoce ministériel est au service du sacerdoce commun, il est relatif au déploiement de la grâce baptismale de tous les chrétiens. Il est un des moyens par lesquels le Christ ne cesse de construire et de conduire son Église. Cest pour cela quil est transmis par un sacrement propre, le sacrement de lOrdre.
En la personne du Christ-Tête (In persona Christi Capitis)…
1548 Dans le service ecclésial du ministre ordonné, cest le Christ lui-même qui est présent à son Église en tant que Tête de son corps, Pasteur de son troupeau, grand prêtre du sacrifice rédempteur, Maître de la Vérité. Cest ce que lÉglise exprime en disant que le prêtre, en vertu du sacrement de lOrdre, agit in persona Christi Capitis (cf. LG 10 ; 28 ; SC 33 ; CD 11 ; PO 2 ; 6) :
Cest le même Prêtre, le Christ Jésus, dont en vérité le ministre tient le rôle. Si, en vérité, celui-ci est assimilé au Souverain Prêtre, à cause de la consécration sacerdotale quil a reçue, il jouit du pouvoir dagir par la puissance du Christ lui-même quil représente (virtuteac persona ipsius Christi) (Pie XII, enc. " Mediator Dei ").
Le Christ est la source de tout le sacerdoce : car le prêtre de lancienne loi était figure du Christ et le prêtre de la nouvelle agit en la personne du Christ (S. Thomas dA., s. th. 3, 22 , 4).
1549 Par le ministère ordonné, spécialement des évêques et des prêtres, la présence du Christ comme chef de lÉglise, est rendue visible au milieu de la communauté des croyants (cf. LG 21). Selon la belle expression de S. Ignace dAntioche, lévêque est typos tou Patros, il est comme limage vivante de Dieu le Père (Trall. 3, 1 ; cf. Magn. 6, 1).
1550 Cette présence du Christ dans le ministre ne doit pas être comprise comme si celui-ci était prémuni contre toutes les faiblesses humaines, lesprit de domination, les erreurs, voire le péché. La force de lEsprit Saint ne garantit pas de la même manière tous les actes des ministres. Tandis que dans les sacrements cette garantie est donnée, de sorte que même le péché du ministre ne peut empêcher le fruit de grâce, il existe beaucoup dautres actes où lempreinte humaine du ministre laisse des traces qui ne sont pas toujours le signe de la fidélité à lEvangile, et qui peuvent nuire par conséquent à la fécondité apostolique de lÉglise.
1551 Ce sacerdoce est ministériel. " Cette charge, confiée par le Seigneur aux pasteurs de son peuple, est un véritable service " (LG 24). Il est entièrement référé au Christ et aux hommes. Il dépend entièrement du Christ et de son sacerdoce unique, et il a été institué en faveur des hommes et de la communauté de lÉglise. Le sacrement de lOrdre communique " un pouvoir sacré ", qui nest autre que celui du Christ. Lexercice de cette autorité doit donc se mesurer daprès le modèle du Christ qui par amour sest fait le dernier et le serviteur de tous (cf. Mc 10, 43-45 ; 1 P 5, 3). " Le Seigneur a dit clairement que le soin apporté à son troupeau était une preuve damour pour Lui " (S. Jean Chrysostome, sac. 2, 4 : PG 48, 635 D ; cf. Jn 21, 15-17).
" Au nom de toute lÉglise "
1552 Le sacerdoce ministériel na pas seulement pour tâche de représenter le Christ Tête de lÉglise face à lassemblée des fidèles, il agit aussi au nom de toute lÉglise lorsquil présente à Dieu la prière de lÉglise (cf. SC 33) et surtout lorsquil offre le sacrifice eucharistique (cf. LG 10).
1553 " Au nom de toute lÉglise ", cela ne veut pas dire que les prêtres soient les délégués de la communauté. La prière et loffrande de lÉglise sont inséparables de la prière et de loffrande du Christ, son Chef. Cest toujours le culte du Christ dans et par son Église. Cest toute lÉglise, corps du Christ, qui prie et qui soffre, " per ipsum et cum ipso et in ipso ", dans lunité du Saint-Esprit, à Dieu le Père. Tout le corps, " caput et membra ", prie et soffre, et cest pourquoi ceux qui, dans le corps, en sont spécialement les ministres, sont appelés ministres non seulement du Christ, mais aussi de lÉglise. Cest parce que le sacerdoce ministériel représente le Christ quil peut représenter lÉglise.
III. Les trois degrés du sacrement de lordre
1554 " Le ministère ecclésiastique, institué par Dieu, est exercé dans la diversité des ordres par ceux que déjà depuis lantiquité on appelle évêques, prêtres, diacres " (LG 28). La doctrine catholique, exprimée dans la liturgie, le magistère et la pratique constante de lÉglise, reconnaît quil existe deux degrés de participation ministérielle au sacerdoce du Christ : lépiscopat et le presbytérat. Le diaconat est destiné à les aider et à les servir. Cest pourquoi le terme sacerdos désigne, dans lusage actuel, les évêques et les prêtres, mais non pas les diacres. Néanmoins, la doctrine catholique enseigne que les degrés de participation sacerdotale (épiscopat et presbytérat) et le degré de service (diaconat) sont tous les trois conférés par un acte sacramentel appelé " ordination ", cest-à-dire par le sacrement de lOrdre :
Que tous révèrent les diacres comme Jésus-Christ, comme aussi lévêque, qui est limage du Père, et les presbytres comme le sénat de Dieu et comme lassemblée des apôtres : sans eux on ne peut parler dÉglise (S. Ignace dAntioche, Trall. 3, 1).
Lordination épiscopale plénitude du sacrement de lOrdre
1555 " Parmi les différents ministères qui sexercent dans lÉglise depuis les premiers temps, la première place, au témoignage de la Tradition, appartient à la fonction de ceux qui, établis dans lépiscopat, dont la ligne se continue depuis les origines, sont les sarments par lesquels se transmet la semence apostolique " (LG 20).
1556 Pour remplir leur haute mission, " les apôtres furent enrichis par le Christ dune effusion spéciale de lEsprit Saint descendant sur eux ; eux-mêmes, par limposition des mains, transmirent à leurs collaborateurs le don spirituel qui sest communiqué jusquà nous à travers la consécration épiscopale " (LG 21).
1557 Le deuxième Concile du Vatican " enseigne que, par la consécration épiscopale, est conférée la plénitude du sacrement de lOrdre, que la coutume liturgique de lÉglise et la voix des saints Pères désignent en effet sous le nom de sacerdoce suprême, de réalité totale (summa) du ministère sacré " (Ibid.).
1558 " La consécration épiscopale, en même temps que la charge de sanctifier, confère aussi des charges denseigner et de gouverner … En effet, … par limposition des mains et par les paroles de la consécration, la grâce de lEsprit Saint est donnée et le caractère sacré imprimé, de telle sorte que les évêques, dune façon éminente et visible, tiennent la place du Christ lui-même, Maître, Pasteur et Pontife et jouent son rôle (in Eius persona agant) " (ibid.). " Aussi, par lEsprit Saint qui leur a été donné, les évêques ont-ils été constitués de vrais et authentiques maîtres de la foi, pontifes et pasteurs " (CD 2).
1559 " Cest en vertu de la consécration sacramentelle et par la communion hiérarchique avec le chef du collège et ses membres que quelquun est fait membre du corps épiscopal " (LG 22). Le caractère et la nature collégiale de lordre épiscopal se manifestent entre autres dans lantique pratique de lÉglise qui veut que pour la consécration dun nouvel évêque plusieurs évêques participent au sacre (cf. ibid). Pour lordination légitime dun Evêque, une intervention spéciale de lEvêque de Rome est requise aujourdhui, en raison de sa qualité de lien suprême visible de la communion des Églises particulières dans lÉglise une et de garant de leur liberté.
1560 Chaque évêque a, comme vicaire du Christ, la charge pastorale de lÉglise particulière qui lui a été confiée, mais en même temps il porte collégialement avec tous ses frères dans lépiscopat la sollicitude pour toutes les Églises : " Si chaque évêque nest pasteur propre que de la portion du troupeau confiée à ses soins, sa qualité de légitime successeur des Apôtres par institution divine le rend solidairement responsable de la mission apostolique de lÉglise " (Pie XII, enc. " Fidei donum " ; cf. LG 23 ; CD 4 ; 36 ; 37 ; AG 5 ; 6 ; 38).
1561 Tout ce quon vient de dire explique pourquoi lEucharistie célébrée par lévêque a une signification toute spéciale comme expression de lÉglise réunie autour de lautel sous la présidence de celui qui représente visiblement le Christ, Bon Pasteur et Tête de son Église (cf. SC 41 ; LG 26).
Lordination des presbytres coopérateurs des évêques
1562 " Le Christ, que le Père a consacré et envoyé dans le monde, a, par les apôtres, fait leurs successeurs, cest-à-dire les évêques, participants de sa consécration et de sa mission. A leur tour, les évêques ont légitimement transmis, à divers membres de lÉglise, et suivant des degrés divers, la charge de leur ministère " (LG 28). " Leur fonction ministérielle a été transmise aux prêtres à un degré subordonné : ceux-ci sont établis dans lOrdre du presbytérat pour être les coopérateurs de lOrdreépiscopal dans laccomplissement de la mission apostolique confiée par le Christ " (PO 2).
1563 " La fonction des prêtres, en tant quelle est unie à lOrdre épiscopal, participe à lautorité par laquelle le Christ lui-même construit, sanctifie et gouverne son Corps. Cest pourquoi le sacerdoce des prêtres, sil suppose les sacrements de linitiation chrétienne, est cependant conféré au moyen du sacrement particulier qui, par lonction du Saint-Esprit, les marque dun caractère spécial, et les configure ainsi au Christ Prêtre pour les rendre capables dagir au nom du Christ Tête en personne " (PO 2).
1564 " Tout en nayant pas charge suprême du pontificat et tout en dépendant des évêques dans lexercice de leur pouvoir, les prêtres leur sont cependant unis dans la dignité sacerdotale ; et par la vertu du sacrement de lOrdre, à limage du Christ prêtre suprême et éternel (cf. He 5, 1-10 ; 7, 24 ; 9, 11-28) ils sont consacrés pour prêcher lEvangile, pour être les pasteurs des fidèles et pour célébrer le culte divin en vrais prêtres du Nouveau Testament " (LG 28).
1565 En vertu du sacrement de lOrdre les prêtres participent aux dimensions universelles de la mission confiée par le Christ aux Apôtres. Le don spirituel quils ont reçu dans lordination les prépare, non pas à une mission limitée et restreinte, " mais à une mission de salut dampleur universelle, jusquaux extrémités de la terre "(PO 10), " prêts au fond du cur à prêcher lEvangile en quelque lieu que ce soit " (OT 20).
1566 " Cest dans le culte ou synaxeeucharistique que sexerce par excellence leur charge sacrée : là, tenant la place du Christ et proclamant son mystère, ils joignent les demandes des fidèles au sacrifice de leur chef, rendant présent et appliquant dans le sacrifice de la messe, jusquà ce que le Seigneur vienne, lunique sacrifice du Nouveau Testament, celui du Christ soffrant une fois pour toutes à son Père en victime immaculée " (LG 28). De ce sacrifice unique, tout leur ministère sacerdotal tire sa force (cf. PO 2).
1567 " Coopérateurs avisés de lordre épiscopal dont ils sont laide et linstrument, appelés à servir le peuple de Dieu, les prêtres constituent, avec leur évêque, un seul presbyterium aux fonctions diverses. En chaque lieu où se trouve une communauté de fidèles, ils rendent dune certaine façon présent lévêque auquel ils sont associés dun cur confiant et généreux, assumant pour leur part ses charges et sa sollicitude, et les mettant en uvre dans leur souci quotidien des fidèles " (LG 28). Les prêtres ne peuvent exercer leur ministère quen dépendance de lévêque et en communion avec lui. La promesse dobéissance quils font à lévêque au moment de lordination et le baiser de paix de lévêque à la fin de la liturgie de lordination signifient que lévêque les considère comme ses collaborateurs, ses fils, ses frères et ses amis, et quen retour ils lui doivent amour et obéissance.
1568 " Du fait de leur ordination, qui les a fait entrer dans lordre du presbytérat, les prêtres sont tous intimement liés entre eux par la fraternité sacramentelle ; mais, du fait de leur affectation au service dun diocèse en dépendance de lévêque local, ils forment tout spécialement à ce niveau un presbyterium unique " (PO 8). Lunité du presbyterium trouve une expression liturgique dans lusage qui veut que les presbytres imposent à leur tour les mains, après lévêque, pendant le rite de lordination.
Lordination des diacres " en vue du service "
1569 " Au degré inférieur de la hiérarchie, se trouvent les diacres auxquels on a imposé les mains non pas en vue du sacerdoce, mais en vue du service " (LG 29 ; cf. CD 15). Pour lordination au diaconat, seul lévêque impose les mains, signifiant ainsi que le diacre est spécialement rattaché à lévêque dans les tâches de sa " diaconie " (cf. S. Hippolyte, trad. ap. 8).
1570 Les diacres participent dune façon spéciale à la mission et à la grâce du Christ (cf. LG 41 ; AA 16). Le sacrement de lOrdre les marque dune empreinte (" caractère ") que nul ne peut faire disparaître et qui les configure au Christ qui sest fait le " diacre ", cest-à-dire le serviteur de tous (cf. Mc 10, 45 ; Lc 22, 27 ; S. Polycarpe, ep. 5, 2). Il appartient entre autres aux diacres dassister lévêque et les prêtres dans la célébration des divins mystères, surtout de lEucharistie, de la distribuer, dassister au mariage et de le bénir, de proclamer lEvangile et de prêcher, de présider aux funérailles et de se consacrer aux divers services de la charité (cf. LG 29 ; SC 35, § 4 ; AG 16).
1571 Depuis le deuxième Concile du Vatican, lÉglise latine a rétabli le diaconat " en tant que degré propre et permanent de la hiérarchie " (LG 29), alors que les Églises dOrient lavaient toujours maintenu. Ce diaconat permanent, qui peut être conféré à des hommes mariés, constitue un enrichissement important pour la mission de lÉglise. En effet, il est approprié et utile que des hommes qui accomplissent dans lÉglise un ministère vraiment diaconal, soit dans la vie liturgique et pastorale, soit dans les uvres sociales et caritatives " soient fortifiés par limposition des mains transmise depuis les apôtres et plus étroitement unis à lautel, pour quils sacquittent de leur ministère plus efficacement, au moyen de la grâce sacramentelle du diaconat " (AG 16).
IV. La célébration de ce sacrement
1572 La célébration de lordination dun évêque, de prêtres ou de diacres, de par son importance pour la vie de lÉglise particulière, réclame le concours du plus grand nombre possible de fidèles. Elle aura lieu de préférence le dimanche et à la cathédrale, avec une solennité adaptée à la circonstance. Les trois ordinations, de lévêque, du prêtre et du diacre, suivent le même mouvement. Leur place est au sein de la liturgie eucharistique.
1573 Le rite essentiel du sacrement de lOrdre est constitué, pour les trois degrés, de limposition des mains par lévêque sur la tête de lordinand ainsi que de la prière consécratoire spécifique qui demande à Dieu leffusion de lEsprit Saint et de ses dons appropriés au ministère pour lequel le candidat est ordonné (cf. Pie XII, const. ap. " Sacramentum Ordinis " : DS 3858).
1574 Comme dans tous les sacrements, des rites annexes entourent la célébration. Variant fortement dans les différentes traditions liturgiques, ils ont en commun dexprimer les multiples aspects de la grâce sacramentelle. Ainsi, les rites initiaux, dans le rite latin, la présentation et lélection de lordinand, lallocution de lévêque, linterrogatoire de lordinand, les litanies des saints attestent que le choix du candidat sest fait conformément à lusage de lÉglise et préparent lacte solennel de la consécration, après laquelle plusieurs rites viennent exprimer et achever dune manière symbolique le mystère qui sest accompli : pour lévêque et le prêtre lonction du saint chrême, signe de lonction spéciale du Saint-Esprit qui rend fécond leur ministère ; remise du livre des Évangiles, de lanneau, de la mitre et de la crosse à lévêque en signe de sa mission apostolique dannonce de la Parole de Dieu, de sa fidélité à lÉglise, épouse du Christ, de sa charge de pasteur du troupeau du Seigneur ; remise au prêtre de la patène et du calice, " loffrande du peuple saint " quil est appelé à présenter à Dieu ; remise du livre des Évangiles au diacre qui vient de recevoir mission dannoncer lEvangile du Christ.
V. Qui peut conférer ce sacrement ?
1575 Cest le Christ qui a choisi les Apôtres et leur a donné part à sa mission et à son autorité. Élevé à la droite du Père, il nabandonne pas son troupeau, mais le garde par les Apôtres sous sa constante protection et le dirige encore par ces mêmes pasteurs qui continuent aujourdhui son uvre (cf. MR, Préface des Apôtres). Cest donc le Christ " qui donne " aux uns dêtre apôtres, aux autres, pasteurs (cf. Ep 4, 11). Il continue dagir par les évêques (cf. LG 21).
1576 Puisque le sacrement de lOrdre est le sacrement du ministère apostolique, il revient aux évêques en tant que successeurs des Apôtres, de transmettre " le don spirituel " (LG 21), " la semence apostolique " (LG 20). Les évêques validement ordonnés, cest-à-dire qui sont dans la ligne de la succession apostolique, confèrent validement les trois degrés du sacrement de lOrdre (cf. DS 794 et 802 ; CIC, can. 1012 ; CCEO, can. 744 ; 747).
VI. Qui peut recevoir ce sacrement ?
1577 " Seul un homme (vir) baptisé reçoit validement lordination sacrée " (CIC, can. 1024). Le Seigneur Jésus a choisi des hommes (viri) pour former le collège des douze apôtres (cf. Mc 3, 14-19 ; Lc 6, 12-16), et les apôtres ont fait de même lorsquils ont choisi les collaborateurs (cf. 1 Tm 3, 1-13 ; 2 Tm 1, 6 ; Tt 1, 5-9) qui leur succèderaient dans leur tâche (S. Clément de Rome, Cor. 42, 4 ; 44, 3). Le collège des évêques, avec qui les prêtres sont unis dans le sacerdoce, rend présent et actualise jusquau retour du Christ le collège des douze. LÉglise se reconnaît liée par ce choix du Seigneur lui-même. Cest pourquoi lordination des femmes nest pas possible (cf. MD 26-27 ; CDF, décl. " Inter insigniores ").
1578 Nul na un droit à recevoir le sacrement de lOrdre. En effet, nul ne sarroge à soi-même cette charge. On y est appelé par Dieu (cf. He 5, 4). Celui qui croit reconnaître les signes de lappel de Dieu au ministère ordonné, doit soumettre humblement son désir à lautorité de lÉglise à laquelle revient la responsabilité et le droit dappeler quelquun à recevoir les ordres. Comme toute grâce, ce sacrement ne peut être reçu que comme un don immérité.
1579 Tous les ministres ordonnés de lÉglise latine, à lexception des diacres permanents, sont normalement choisis parmi les hommes croyants qui vivent en célibataires et qui ont la volonté de garder le célibat " en vue du Royaume des cieux " (Mt 19, 12). Appelés à se consacrer sans partage au Seigneur et à " ses affaires " (cf. 1 Co 7, 32), ils se donnent tout entier à Dieu et aux hommes. Le célibat est un signe de cette vie nouvelle au service de laquelle le ministre de lÉglise est consacré ; accepté dun cur joyeux, il annonce de façon rayonnante le Règne de Dieu (cf. PO 16).
1580 Dans les Églises Orientales, depuis des siècles, une discipline différente est en vigueur : alors que les évêques sont choisis uniquement parmi les célibataires, des hommes mariés peuvent être ordonnés diacres et prêtres. Cette pratique est depuis longtemps considérée comme légitime ; ces prêtres exercent un ministère fructueux au sein de leurs communautés (cf. PO 16). Dailleurs, le célibat des prêtres est très en honneur dans les Églises Orientales, et nombreux sont les prêtres qui lont choisi librement, pour le Royaume de Dieu. En Orient comme en Occident, celui qui a reçu le sacrement de lOrdre ne peut plus se marier.
VII. Les effets du sacrement de lOrdre
Le caractère indélébile
1581 Ce sacrement configure au Christ par une grâce spéciale de lEsprit Saint, en vue de servir dinstrument du Christ pour son Église. Par lordination lon est habilité à agir comme représentant du Christ, Tête de lÉglise, dans sa triple fonction de prêtre, prophète et roi.
1582 Comme dans le cas du Baptême et de la Confirmation, cette participation à la fonction du Christ est accordée une fois pour toutes. Le sacrement de lOrdre confère, lui aussi, un caractère spirituel indélébile et il ne peut pas être réitéré ni être conféré temporairement (cf. Cc. Trente : DS 1767 ; LG 21 ; 28 ; 29 ; PO 2).
1583 Un sujet validement ordonné peut, certes, pour de graves motifs, être déchargé des obligations et des fonctions liées à lordination ou être interdit de les exercer (cf. CIC, can. 290-293 ; 1336, § 1, 3°. 5° ; 1338, § 2), mais il ne peut plus redevenir laïc au sens strict (cf. Cc. Trente : DS 1774) car le caractère imprimé par lordination lest pour toujours. La vocation et la mission reçues au jour de son ordination le marquent dune façon permanente.
1584 Puisque en fin de compte cest le Christ qui agit et opère le salut à travers le ministre ordonné, lindignité de celui-ci nempêche pas le Christ dagir (cf. Cc. Trente : DS 1612 ; DS 1154). S. Augustin le dit avec force :
Quant au ministre orgueilleux, il est à ranger avec le diable. Le don du Christ nen est pas pour autant profané, ce qui sécoule à travers lui garde sa pureté, ce qui passe par lui reste limpide et vient jusquà la terre fertile. … La vertu spirituelle du sacrement est en effet pareille à la lumière : ceux qui doivent être éclairés la reçoivent dans sa pureté et, si elle traverse des êtres souillés, elle ne se souille pas (Augustin, ev. Jo. 5, 15).
La grâce du Saint-Esprit
1585 La grâce du Saint-Esprit propre à ce sacrement est celle dune configuration au Christ Prêtre, Maître et Pasteur dont lordonné est constitué le ministre.
1586 Pour lévêque, cest dabord une grâce de force (" LEsprit qui fait chefs " : Prière de consécration de lévêque du rite latin Pontificale Romanum. De Ordinatione Episcopi, presbyterorum et diaconorum, 47) : celle de guider et de défendre avec force et prudence son Église comme un père et un pasteur, avec un amour gratuit pour tous et une prédilection pour les pauvres, les malades et les nécessiteux (cf. CD 13 et 16). Cette grâce le pousse à annoncer lEvangile à tous, à être le modèle de son troupeau, à le précéder sur le chemin de la sanctification en sidentifiant dans lEucharistie avec le Christ Prêtre et Victime, sans craindre de donner sa vie pour ses brebis :
Accorde, Père qui connais les curs, à ton serviteur que tu as choisi pour lépiscopat, quil fasse paître ton saint troupeau et quil exerce à ton égard le souverain sacerdoce sans reproche, en te servant nuit et jour ; quil rende sans cesse ton visage propice et quil offre les dons de ta sainte Église ; quil ait en vertu de lesprit du souverain sacerdoce le pouvoir de remettre les péchés suivant ton commandement, quil distribue les charges suivant ton ordre et quil délie de tout lien en vertu du pouvoir que tu as donné aux apôtres ; quil te plaise par sa douceur et son cur pur, en toffrant un parfum agréable, par ton Enfant Jésus-Christ … (S. Hippolyte, trad. ap. 3).
1587 Le don spirituel que confère lordination presbytérale est exprimé par cette prière propre au rite byzantin. Lévêque, en imposant la main, dit entre autres :
Seigneur, remplis du don du Saint-Esprit celui que tu as daigné élever au degré du sacerdoce afin quil soit digne de se tenir sans reproche devant ton autel, dannoncer lEvangile de ton Royaume, daccomplir le ministère de ta parole de vérité, de toffrir des dons et des sacrifices spirituels, de renouveler ton peuple par le bain de la régénération ; de sorte que lui-même aille à la rencontre de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ, ton Fils unique, au jour de son second avènement, et quil reçoive de ton immense bonté la récompense dune fidèle administration de son ordre (LiturgiaByzantina. 2 oratio chirotoniae presbyteralis, Euchologion, [Roma 1873] p. 136).
1588 Quant aux diacres, " la grâce sacramentelle leur donne la force nécessaire de servir le peuple de Dieu dans la diaconie de la liturgie, de la parole et de la charité, en communion avec lévêque et son presbyterium " (LG 29).
1589 Devant la grandeur de la grâce et de la charge sacerdotales, les saints docteurs ont ressenti lurgent appel à la conversion afin de correspondre par toute leur vie à Celui dont le sacrement les constitue les ministres. Ainsi, S. Grégoire de Nazianze, tout jeune prêtre, sécrie :
Il faut commencer par se purifier avant de purifier les autres ; il faut être instruit pour pouvoir instruire ; il faut devenir lumière pour éclairer, sapprocher de Dieu pour en rapprocher les autres, être sanctifié pour sanctifier, conduire par la main et conseiller avec intelligence (Or. 2, 71 : PG 35, 480B ; Or. 2, 74 : PG 46, 481B ; Or. 2, 73 : PG 35, 481A). Je sais de qui nous sommes les ministres, à quel niveau nous nous trouvons et quel est celui vers lequel nous nous dirigeons. Je connais la hauteur de Dieu et la faiblesse de lhomme, mais aussi sa force (ibid., 74). [Qui est donc le prêtre ? Il est] le défenseur de la vérité, il se dresse avec les anges, il glorifie avec les archanges, il fait monter sur lautel den haut les victimes des sacrifices, il partage le sacerdoce du Christ, il remodèle la créature, il rétablit [en elle] limage [de Dieu], il la recrée pour le monde den haut, et, pour dire ce quil y a de plus grand, il est divinisé et il divinise (ibid., 73).
Et le saint Curé dArs : " Cest le prêtre qui continue luvre de rédemption sur la terre " … " Si lon comprenait bien le prêtre sur la terre, on mourrait non de frayeur, mais damour " … " Le Sacerdoce, cest lamour du cur de Jésus " (Nodet, Jean-Marie Vianney 100).
En bref
1590 S. Paul dit à son disciple Timothée : " Je tinvite à raviver le don que Dieu a déposé en toi par limposition de mes mains " (2 Tm 1, 6), et " celui qui aspire à la charge dévêque, désire une noble fonction " (1 Tm 3, 1). A Tite, il disait : " Si je tai laissé en Crète, cest pour y achever lorganisation, et pour établir dans chaque ville des presbytres, conformément à mes instructions " (Tt 1, 5).
1591 Toute lÉglise est un peuple sacerdotal. Grâce au Baptême, tous les fidèles participent au sacerdoce du Christ. Cette participation sappelle " sacerdoce commun des fidèles ". Sur sa base et à son service existe une autre participation à la mission du Christ ; celle du ministère conféré par le sacrement de lOrdre, dont la tâche est de servir au nom et en la personne du Christ-Tête au milieu de la communauté.
1592 Le sacerdoce ministériel diffère essentiellement du sacerdoce commun des fidèles parce quil confère un pouvoir sacré pour le service des fidèles. Les ministres ordonnés exercent leur service auprès du peuple de Dieu par lenseignement (munus docendi), le culte divin (munus liturgicum) et par le gouvernement pastoral (munus regendi)
1593 Depuis les origines, le ministère ordonné a été conféré et exercé à trois degrés : celui des Évêques, celui des presbytres et celui des diacres. Les ministères conférés par lordination sont irremplaçables pour la structure organique de lÉglise : Sans lEvêque, les presbytres et les diacres, on ne peut parler dÉglise (cf. S. Ignace dAntioche, Trall. 3,1).
1594 LEvêque reçoit la plénitude du sacrement de lOrdre qui linsère dans le Collège épiscopal et fait de lui le chef visible de lÉglise particulière qui lui est confiée. Les Évêques, en tant que successeurs des Apôtres et membres du Collège, ont part à la responsabilité apostolique et à la mission de toute lÉglise sous lautorité du Pape, successeur de S. Pierre.
1595 Les presbytres sont unis aux évêques dans la dignité sacerdotale et en même temps dépendent deux dans lexercice de leur fonctions pastorales ; ils sont appelés à être les coopérateurs avisés des Évêques ; ils forment autour de leur Evêque le " presbyterium " qui porte avec lui la responsabilité de lÉglise particulière. Ils reçoivent de lévêque la charge dune communauté paroissiale ou dune fonction ecclésiale déterminée.
1596 Les diacres sont des ministres ordonnés pour les tâches de service de lÉglise ; ils ne reçoivent pas le sacerdoce ministériel, mais lordination leur confère des fonctions importantes dans le ministère de la Parole, du culte divin, du gouvernement pastoral et du service de la charité, tâches quils doivent accomplir sous lautorité pastorale de leur Evêque.
1597 Le sacrement de lOrdre est conféré par limposition des mains suivie dune prière consécratoire solennelle qui demande à Dieu pour lordinand les grâces du Saint Esprit requises pour son ministère. Lordination imprime un caractère sacramentel indélébile.
1598 LÉglise confère le sacrement de lOrdre seulement à des hommes (viris) baptisés, dont les aptitudes pour lexercice du ministère ont été dûment reconnues. Cest à lautorité de lÉglise que revient la responsabilité et le droit dappeler quelquun à recevoir les ordres.
1599 Dans lÉglise latine, le sacrement de lOrdre pour le presbytérat nest conféré normalement quà des candidats qui sont prêts à embrasser librement le célibat et qui manifestent publiquement leur volonté de le garder pour lamour du Royaume de Dieu et du service des hommes.
1600 Il revient aux Évêques de conférer le sacrement de lOrdre dans les trois degrés.
Article 7
Le sacrement du Mariage
1601 " Lalliance matrimoniale, par laquelle un homme et une femme constituent entre eux une communauté de toute la vie, ordonnée par son caractère naturel au bien des conjoints ainsi quà la génération et à léducation des enfants, a été élevée entre baptisés par le Christ Seigneur à la dignité de sacrement " (CIC, can. 1055, § 1).
I. Le Mariage dans le dessein de Dieu
1602 LÉcriture Sainte souvre sur la création de lhomme et de la femme à limage et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1, 26-27) et sachève sur la vision des " noces de lAgneau " (Ap 19, 7. 9). Dun bout à lautre lÉcriture parle du mariage et de son " mystère ", de son institution et du sens que Dieu lui a donné, de son origine et de sa fin, de ses réalisations diverses tout au long de lhistoire du salut, de ses difficultés issues du péché et de son renouvellement " dans le Seigneur " (1 Co 7, 39), dans lAlliance nouvelle du Christ et de lÉglise (cf. Ep 5, 31-32).
Le mariage dans lordre de la création
1603 " La communauté profonde de vie et damour que forme le couple a été fondée et dotée de ses lois propres par le Créateur. Dieu lui-même est lauteur du mariage " (GS 48, § 1). La vocation au mariage est inscrite dans la nature même de lhomme et de la femme, tels quils sont issus de la main du Créateur. Le mariage nest pas une institution purement humaine, malgré les variations nombreuses quil a pu subir au cours des siècles, dans les différentes cultures, structures sociales et attitudes spirituelles. Ces diversités ne doivent pas faire oublier les traits communs et permanents. Bien que la dignité de cette institution ne transparaisse pas partout avec la même clarté (cf. GS 47, § 2), il existe cependant dans toutes les cultures un certain sens pour la grandeur de lunion matrimoniale. " Car le bien-être de la personne et de la société est étroitement lié à la prospérité de la communauté conjugale et familiale " (GS 47, § 1).
1604 Dieu qui a créé lhomme par amour, la aussi appelé à lamour, vocation fondamentale et innée de tout être humain. Car lhomme est créé à limage et à la ressemblance du Dieu (cf. Gn 1, 27) qui est lui-même Amour (cf. 1 Jn 4, 8. 16). Dieu layant créé homme et femme, leur amour mutuel devient une image de lamour absolu et indéfectible dont Dieu aime lhomme. Il est bon, très bon, aux yeux du Créateur (cf. Gn 1, 31). Et cet amour que Dieu bénit est destiné à être fécond et à se réaliser dans luvre commune de la garde de la création : " Et Dieu les bénit et il leur dit : Soyez féconds, multipliez-vous, remplissez la terre et soumettez-la " (Gn 1, 28).
1605 Que lhomme et la femme soient créés lun pour lautre, lÉcriture Sainte laffirme : " Il nest pas bon que lhomme soit seul " (Gn 2, 18). La femme, " chair de sa chair " (cf. Gn 2, 23), son égale, toute proche de lui, lui est donnée par Dieu comme un " secours " (cf. Gn 2, 18), représentant ainsi le " Dieu en qui est notre secours " (cf. Ps 121, 2). " Cest pour cela que lhomme quittera son père et sa mère et sattachera à sa femme, et les deux deviennent une seule chair " (Gn 2, 24). Que cela signifie une unité indéfectible de leur deux vies, le Seigneur lui-même le montre en rappelant quel a été, " à lorigine ", le dessein du Créateur (cf. Mt 19, 4) : " Ainsi, ils ne sont plus deux, mais une seule chair " (Mt 19, 6).
Le mariage sous le régime du péché
1606 Tout homme fait lexpérience du mal, autour de lui et en lui-même. Cette expérience se fait aussi sentir dans les relations entre lhomme et la femme. De tout temps, leur union a été menacée par la discorde, lesprit de domination, linfidélité, la jalousie et par des conflits qui peuvent aller jusquà la haine et la rupture. Ce désordre peut se manifester de façon plus ou moins aiguë, et il peut être plus ou moins surmonté, selon les cultures, les époques, les individus, mais il semble bien avoir un caractère universel.
1607 Selon la foi, ce désordre que nous constatons douloureusement, ne vient pas de la naturede lhomme et de la femme, ni de la nature de leurs relations, mais du péché. Rupture avec Dieu, le premier péché a comme première conséquence la rupture de la communion originelle de lhomme et de la femme. Leurs relations sont distordues par des griefs réciproques (cf. Gn 3, 12) ; leur attrait mutuel, don propre du créateur (cf. Gn 2, 22), se change en rapports de domination et de convoitise (cf. Gn 3, 16 b) ; la belle vocation de lhomme et de la femme dêtre féconds, de se multiplier et de soumettre la terre (cf. Gn 1, 28) est grevée des peines de lenfantement et du gagne-pain (cf. Gn 3, 16-19).
1608 Pourtant, lordre de la création subsiste, même sil est gravement perturbé. Pour guérir les blessures du péché, lhomme et la femme ont besoin de laide de la grâce que Dieu, dans sa miséricorde infinie, ne leur a jamais refusée (cf. Gn 3, 21). Sans cette aide, lhomme et la femme ne peuvent parvenir à réaliser lunion de leurs vies en vue de laquelle Dieu les a créés " au commencement ".
Le mariage sous la pédagogie de la Loi
1609 Dans sa miséricorde, Dieu na pas abandonné lhomme pécheur. Les peines qui suivent le péché, les douleurs de lenfantement (cf. Gn 3, 16), le travail " à la sueur de ton front " (Gn 3, 19), constituent aussi des remèdes qui limitent les méfaits du péché. Après la chute, le mariage aide à vaincre le repliement sur soi-même, légoïsme, la quête du propre plaisir, et à souvrir à lautre, à laide mutuelle, au don de soi.
1610 La conscience morale concernant lunité et lindissolubilité du mariage sest développée sous la pédagogie de la Loi ancienne. La polygamie des patriarches et des rois nest pas encore explicitement critiquée. Cependant, la Loi donnée à Moïse vise à protéger la femme contre larbitraire dune domination par lhomme, même si elle porte aussi, selon la parole du Seigneur, les traces de " la dureté du cur " de lhomme en raison de laquelle Moïse a permis la répudiation de la femme (cf. Mt 19, 8 ; Dt 24, 1).
1611 En voyant lAlliance de Dieu avec Israël sous limage dun amour conjugal exclusif et fidèle (cf. Os 1-3 ; Is 54 ; 62 ; Jr 2-3 ; 31 ; Ez 16 ; 23), les prophètes ont préparé la conscience du Peuple élu à une intelligence approfondie de lunicité et de lindissolubilité du mariage (cf. Ml 2, 13-17). Les livres de Ruth et de Tobie donnent des témoignages émouvants du sens élevé du mariage, de la fidélité et de la tendresse des époux. La Tradition a toujours vu dans le Cantique des Cantiques une expression unique de lamour humain en tant quil est reflet de lamour de Dieu, amour " fort comme la mort " que " les torrents deau ne peuvent éteindre " (Ct 8, 6-7).
Le mariage dans le Seigneur
1612 Lalliance nuptiale entre Dieu et son peuple Israël avait préparé lalliance nouvelle et éternelle dans laquelle le Fils de Dieu, en sincarnant et en donnant sa vie, sest uni dune certaine façon toute lhumanité sauvée par lui (cf. GS 22), préparant ainsi " les noces de lAgneau " (Ap 19, 7. 9).
1613 Au seuil de sa vie publique, Jésus opère son premier signe à la demande de sa Mère lors dune fête de mariage (cf. Jn 2, 1-11). LÉglise accorde une grande importance à la présence de Jésus aux noces de Cana. Elle y voit la confirmation de la bonté du mariage et lannonce que désormais le mariage sera un signe efficace de la présence du Christ.
1614 Dans sa prédication, Jésus a enseigné sans équivoque le sens originel de lunion de lhomme et de la femme, telle que le Créateur la voulue au commencement : la permission, donnée par Moïse, de répudier sa femme, était une concession à la dureté du cur (cf. Mt 19, 8) ; lunion matrimoniale de lhomme et de la femme est indissoluble : Dieu lui-même la conclue : " Que lhomme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni " (Mt 19, 6).
1615 Cette insistance sans équivoque sur lindissolubilité du lien matrimonial a pu laisser perplexe et apparaître comme une exigence irréalisable (cf. Mt 19, 10). Pourtant Jésus na pas chargé les époux dun fardeau impossible à porter et trop lourd (cf. Mt 11, 29-30), plus pesant que la Loi de Moïse. En venant rétablir lordre initial de la création perturbé par le péché, il donne lui-même la force et la grâce pour vivre le mariage dans la dimension nouvelle du Règne de Dieu. Cest en suivant le Christ, en renonçant à eux-mêmes, en prenant leurs croix sur eux (cf. Mc 8, 34) que les époux pourront " comprendre " (cf. Mt 19, 11) le sens originel du mariage et le vivre avec laide du Christ. Cette grâce du Mariage chrétien est un fruit de la Croix du Christ, source de toute vie chrétienne.
1616 Cest ce que lApôtre Paul fait saisir en disant : " Maris, aimez vos femmes, comme le Christ a aimé lÉglise ; il sest livré pour elle, afin de la sanctifier " (Ep 5, 25-26), en ajoutant aussitôt : " Voici donc que lhomme quittera son père et sa mère pour sattacher à sa femme, et les deux ne feront quune seule chair : ce mystère est de grande portée ; je veux dire quil sapplique au Christ et à lÉglise " (Ep 5, 31-32).
1617 Toute la vie chrétienne porte la marque de lamour sponsal du Christ et de lÉglise. Déjà le Baptême, entrée dans le peuple de Dieu, est un mystère nuptial : il est, pour ainsi dire, le bain de noces (cf. Ep 5, 26-27) qui précède le repas de noces, lEucharistie. Le Mariage chrétien devient à son tour signe efficace, sacrement de lalliance du Christ et de lÉglise. Puisquil en signifie et communique la grâce, le mariage entre baptisés est un vrai sacrement de la Nouvelle Alliance (cf. DS 1800 ; CIC, can. 1055, § 2).
La virginité pour le Royaume
1618 Le Christ est le centre de toute vie chrétienne. Le lien avec Lui prend la première place devant tous les autres liens, familiaux ou sociaux (cf. Lc 14, 26 ; Mc 10, 28-31). Dès le début de lÉglise, il y a eu des hommes et des femmes qui ont renoncé au grand bien du mariage pour suivre lAgneau partout où il va (cf. Ap 14, 4), pour se soucier des choses du Seigneur, pour chercher à Lui plaire (cf. 1 Co 7, 32), pour aller au devant de lEpoux qui vient (cf. Mt 25, 6). Le Christ lui-même a invité certains à le suivre en ce mode de vie dont Il demeure le modèle :
Il y a des eunuques qui le sont de naissance, dès le sein de leur mère ; il y a aussi des eunuques qui le sont devenus par la main des hommes ; et il y en a qui se sont faits eunuques eux-mêmes à cause du Royaume des cieux. Que celui qui peut comprendre, comprenne (Mt 19, 12).
1619 La virginité pour le Royaume des Cieux est un déploiement de la grâce baptismale, un signe puissant de la prééminence du lien au Christ, de lattente ardente de son retour, un signe qui rappelle aussi que le mariage est une réalité de léon présent qui passe (cf. Mc 12, 25 ; 1 Co 7, 31).
1620 Les deux, le sacrement du Mariage et la virginité pour le Royaume de Dieu, viennent du Seigneur lui-même. Cest Lui qui leur donne sens et leur accorde la grâce indispensable pour les vivre conformément à sa volonté (cf. Mt 19, 3-12). Lestime de la virginité pour le Royaume (cf. LG 42 ; PC 12 ; OT 10) et le sens chrétien du Mariage sont inséparables et se favorisent mutuellement :
Dénigrer le mariage, cest amoindrir du même coup la gloire de la virginité ; en faire léloge, cest rehausser ladmiration qui est due à la virginité … Car enfin, ce qui ne paraît un bien que par comparaison avec un mal ne peut être vraiment un bien, mais ce qui est mieux encore que des biens incontestés est le bien par excellence (S. Jean Chrysostome, virg. 10, 1 : PG 48, 540A) ; cf. FC 16).
II. La célébration du mariage
1621 Dans le rite latin, la célébration du mariage entre deux fidèles catholiques a normalement lieu au cours de la Sainte Messe, en raison du lien de tous les sacrements avec le Mystère Pascal du Christ (cf. SC 61). Dans lEucharistie se réalise le mémorial de la Nouvelle Alliance, en laquelle le Christ sest uni pour toujours à lÉglise, son épouse bien-aimée pour laquelle il sest livré (cf. LG 6). Il est donc convenable que les époux scellent leur consentement à se donner lun à lautre par loffrande de leurs propres vies, en lunissant à loffrande du Christ pour son Église, rendue présente dans le sacrifice eucharistique, et en recevant lEucharistie, afin que, communiant au même Corps et au même Sang du Christ, ils " ne forment quun corps " dans le Christ (cf. 1 Co 10, 17).
1622 " En tant que geste sacramentel de sanctification, la célébration liturgique du mariage … doit être par elle-même valide, digne et fructueuse " (FC 67). Il convient donc que les futurs époux se disposent à la célébration de leur mariage en recevant le sacrement de pénitence.
1623 Selon la tradition latine, ce sont les époux qui, comme ministres de la grâce du Christ, se confèrent mutuellement le sacrement du Mariage en exprimant devant lÉglise leur consentement. Dans la tradition des Eglises orientales, les prêtres ou évêques qui officient sont les témoins du consentement mutuel échangé par les époux (cf. CCEO, can. 817), mais leur bénédiction est nécessaire aussi à la validité du sacrement (cf. CCEO, can. 828).
1624 Les diverses liturgies sont riches en prières de bénédiction et dépiclèse demandant à Dieu sa grâce et la bénédiction sur le nouveau couple, spécialement sur lépouse. Dans lépiclèse de ce sacrement les époux reçoivent lEsprit Saint comme Communion damour du Christ et de lÉglise (cf. Ep 5, 32). Cest Lui le sceau de leur alliance, la source toujours offerte de leur amour, la force où se renouvellera leur fidélité.
III. Le consentement matrimonial
1625 Les protagonistes de lalliance matrimoniale sont un homme et une femme baptisés, libres de contracter le mariage et qui expriment librement leur consentement. " Etre libre " veut dire :
ne pas subir de contrainte ;
ne pas être empêché par une loi naturelle ou ecclésiastique.
1626 LÉglise considère léchange des consentements entre les époux comme lélément indispensable " qui fait le mariage " (CIC, can. 1057, § 1). Si le consentement manque, il ny a pas de mariage.
1627 Le consentement consiste en un " acte humain par lequel les époux se donnent et se reçoivent mutuellement " (GS 48, § 1 ; cf. CIC, can. 1057, § 2) : " Je te prends comme ma femme " " Je te prends comme mon mari " (OcM 45). Ce consentement qui lie les époux entre eux, trouve son accomplissement en ce que les deux " deviennent une seule chair " (cf. Gn 2, 24 ; Mc 10, 8 ; Ep 5, 31).
1628 Le consentement doit être un acte de la volonté de chacun des contractants, libre de violence ou de crainte grave externe (cf. CIC, can. 1103). Aucun pouvoir humain ne peut se substituer à ce consentement (CIC, can. 1057, § 1). Si cette liberté manque, le mariage est invalide.
1629 Pour cette raison (ou pour dautres raisons qui rendent nul et non avenu le mariage : cf. CIC, can. 1095-1107), lÉglise peut, après examen de la situation par le tribunal ecclésiastique compétent, déclarer " la nullité du mariage ", cest-à-dire que le mariage na jamais existé. En ce cas, les contractants sont libres de se marier, quitte à se tenir aux obligations naturelles dune union antérieure (cf. CIC, can. 1071).
1630 Le prêtre (ou le diacre) qui assiste à la célébration du mariage, accueille le consentement des époux au nom de lÉglise et donne la bénédiction de lÉglise. La présence du ministre de lÉglise (et aussi des témoins) exprime visiblement que le mariage est une réalité ecclésiale.
1631 Cest pour cette raison que lÉglise demande normalement pour ses fidèles la forme ecclésiastique de la conclusion du mariage (cf. Cc. Trente : DS 1813-1816 ; CIC, can. 1108). Plusieurs raisons concourent à expliquer cette détermination :
Le mariage sacramentel est un acte liturgique. Il est dès lors convenable quil soit célébré dans la liturgie publique de lÉglise.
Le mariage introduit dans un ordo ecclésial, il crée des droits et des devoirs dans lÉglise, entre les époux et envers les enfants.
Puisque le mariage est un état de vie dans lÉglise, il faut quil y ait certitude sur le mariage (doù lobligation davoir des témoins).
Le caractère public du consentement protège le " Oui " une fois donné et aide à y rester fidèle.
1632 Pour que le " Oui " des époux soit un acte libre et responsable, et pour que lalliance matrimoniale ait des assises humaines et chrétiennes solides et durables, la préparation au mariage est de première importance :
Lexemple et lenseignement donnés par les parents et par les familles restent le chemin privilégié de cette préparation.
Le rôle des pasteurs et de la communauté chrétienne comme " famille de Dieu " est indispensable pour la transmission des valeurs humaines et chrétiennes du mariage et de la famille (cf. CIC, can. 1063), et ceci dautant plus quà notre époque beaucoup de jeunes connaissent lexpérience des foyers brisés qui nassurent plus suffisamment cette initiation :
Il faut instruire à temps les jeunes, et de manière appropriée, de préférence au sein de la famille, sur la dignité de lamour conjugal, sa fonction, son exercice : ainsi formés à la chasteté, ils pourront, le moment venu, sengager dans le mariage après des fiançailles vécues dans la dignité (GS 49, § 3).
Les mariages mixtes et la disparité de culte
1633 Dans de nombreux pays, la situation du mariage mixte (entre catholique et baptisé non-catholique) se présente de façon assez fréquente. Elle demande une attention particulière des conjoints et des pasteurs. Le cas des mariages avec disparité de culte (entre catholique et non-baptisé) une circonspection plus grande encore.
1634 La différence de confession entre les conjoints ne constitue pas un obstacle insurmontable pour le mariage, lorsquils parviennent à mettre en commun ce que chacun deux a reçu dans sa communauté, et à apprendre lun de lautre la façon dont chacun vit sa fidélité au Christ. Mais les difficultés des mariages mixtes ne doivent pas non plus être sous-estimées. Elles sont dues au fait que la séparation des chrétiens nest pas encore surmontée. Les époux risquent de ressentir le drame de la désunion des chrétiens au sein même de leur foyer. La disparité de culte peut encore aggraver ces difficultés. Des divergences concernant la foi, la conception même du mariage, mais aussi des mentalités religieuses différentes, peuvent constituer une source de tensions dans le mariage, principalement à propos de léducation des enfants. Une tentation peut se présenter alors : lindifférence religieuse.
1635 Daprès le droit en vigueur dans lÉglise latine, un mariage mixte a besoin, pour sa licéité, de la permission expresse de lautorité ecclésiastique (cf. CIC, can. 1124). En cas de disparité de culte une dispenseexpresse de lempêchement est requise pour la validité du mariage (cf. CIC, can. 1086). Cette permission ou cette dispense supposent que les deux parties connaissent et nexcluent pas les fins et les propriétés essentielles du mariage et aussi que la partie catholique confirme ses engagements, portés aussi à la connaissance explicite de la partie non catholique, de conserver sa foi et dassurer le baptême et léducation des enfants dans lÉglise catholique (cf. CIC, can. 1125).
1636 Dans beaucoup de régions, grâce au dialogue cuménique, les communautés chrétiennes concernées ont pu mettre sur pied une pastorale commune pour les mariages mixtes. Sa tâche est daider ces couples à vivre leur situation particulière à la lumière de la foi. Elle doit aussi les aider à surmonter les tensions entre les obligations des conjoints lun envers lautre et envers leurs communautés ecclésiales. Elle doit encourager lépanouissement de ce qui leur est commun dans la foi, et le respect de ce qui les sépare.
1637 Dans les mariages avec disparité de culte lépoux catholique a une tâche particulière : " Car le mari non croyant se trouve sanctifié par sa femme, et la femme non croyante se trouve sanctifiée par le mari croyant " (1 Co 7, 14). Cest une grande joie pour le conjoint chrétien et pour lÉglise si cette " sanctification " conduit à la conversion libre de lautre conjoint à la foi chrétienne (cf. 1 Co 7, 16). Lamour conjugal sincère, la pratique humble et patiente des vertus familiales et la prière persévérante peuvent préparer le conjoint non croyant à accueillir la grâce de la conversion.
IV. Les effets du sacrement du Mariage
1638 " Du mariage valide naît entre les conjoints un lien de par sa nature perpétuel et exclusif ; en outre, dans le mariage chrétien, les conjoints sont fortifiés et comme consacrés par un sacrement spécial pour les devoirs et la dignité de leur état " (CIC, can. 1134).
Le lien matrimonial
1639 Le consentement par lequel les époux se donnent et saccueillent mutuellement, est scellé par Dieu lui-même (cf. Mc 10, 9). De leur alliance " une institution, que la loi divine confirme, naît ainsi, au regard même de la société " (GS 48, § 1). Lalliance des époux est intégrée dans lalliance de Dieu avec les hommes : " Lauthentique amour conjugal est assumé dans lamour divin " (GS 48, § 2).
1640 Le lien matrimonial est donc établi par Dieu lui-même, de sorte que le mariage conclu et consommé entre baptisés ne peut jamais être dissout. Ce lien qui résulte de lacte humain libre des époux et de la consommation du mariage, est une réalité désormais irrévocable et donne origine à une alliance garantie par la fidélité de Dieu. Il nest pas au pouvoir de lÉglise de se prononcer contre cette disposition de la sagesse divine (cf. CIC, can. 1141).
La grâce du sacrement du Mariage
1641 " En leur état de vie et dans leur ordre, [les époux chrétiens] ont dans le peuple de Dieu leurs dons propres " (LG 11). Cette grâce propre du sacrement du Mariage est destinée à perfectionner lamour des conjoints, à fortifier leur unité indissoluble. Par cette grâce " ils saident mutuellement à se sanctifier dans la vie conjugale, dans laccueil et léducation des enfants " (LG 11 ; cf. LG 41).
1642 Le Christ est la source de cette grâce. " De même que Dieu prit autrefois linitiative dune alliance damour et de fidélité avec son peuple, ainsi, maintenant, le Sauveur des hommes, Epoux de lÉglise, vient à la rencontre des époux chrétiens par le sacrement du Mariage " (GS 48, § 2). Il reste avec eux, il leur donne la force de le suivre en prenant leur croix sur eux, de se relever après leurs chutes, de se pardonner mutuellement, de porter les uns les fardeaux des autres (cf. Ga 6, 2), dêtre " soumis les uns aux autres dans la crainte du Christ " (Ep 5, 21) et de saimer dun amour surnaturel, délicat et fécond. Dans les joies de leur amour et de leur vie familiale il leur donne, dès ici-bas, un avant-goût du festin des noces de lAgneau :
Où vais-je puiser la force de décrire de manière satisfaisante le bonheur du mariage que lÉglise ménage, que confirme loffrande, que scelle la bénédiction ; les anges le proclament, le Père céleste le ratifie… Quel couple que celui de deux chrétiens, unis par une seule espérance, un seul désir, une seule discipline, le même service ! Tous deux enfants dun même Père, serviteurs dun même Maître ; rien ne les sépare, ni dans lesprit ni dans la chair ; au contraire, ils sont vraiment deux en une seule chair. Là où la chair est une, un aussi est lesprit (Tertullien, ux. 2, 9 ; cf. FC 13).
V. Les biens et les exigences de lamour conjugal
1643 " Lamour conjugal comporte une totalité où entrent toutes les composantes de la personne appel du corps et de linstinct, force du sentiment et de laffectivité, aspiration de lesprit et de la volonté ; il vise une unité profondément personnelle, celle qui, au-delà de lunion en une seule chair, conduit à ne faire quun cur et quune âme ; il exige lindissolubilité et lafidélité dans la donation réciproque définitive ; et il souvre sur la fécondité. Il sagit bien des caractéristiques normales de tout amour conjugal naturel, mais avec une signification nouvelle qui, non seulement les purifie et les consolide, mais les élève au point den faire lexpression de valeurs proprement chrétiennes " (FC 13).
Lunité et lindissolubilité du mariage
1644 Lamour des époux exige, par sa nature même, lunité et lindissolubilité de leur communauté de personnes qui englobe toute leur vie : " ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair " (Mt 19, 6 ; cf. Gn 2, 24). " Ils sont appelés à grandir sans cesse dans leur communion à travers la fidélité quotidienne à la promesse du don mutuel total que comporte le mariage " (FC 19). Cette communion humaine est confirmée, purifiée et parachevée par la communion en Jésus-Christ donnée par le sacrement de Mariage. Elle sapprofondit par la vie de la foi commune et par lEucharistie reçue en commun.
1645 " Légale dignité personnelle quil faut reconnaître à la femme et à lhomme dans lamour plénier quils se portent lun à lautre fait clairement apparaître lunité du mariage, confirmée par le Seigneur " (GS 49, § 2). La polygamie est contraire à cette égale dignité et à lamour conjugal qui est unique et exclusif (cf. FC 19).
La fidélité de lamour conjugal
1646 Lamour conjugal exige des époux, de par sa nature même, une fidélité inviolable. Ceci est la conséquence du don deux-mêmes que se font lun à lautre les époux. Lamour veut être définitif. Il ne peut être " jusquà nouvel ordre ". " Cette union intime, don réciproque de deux personnes, non moins que le bien des enfants, exigent lentière fidélité des époux et requièrent leur indissoluble unité " (GS 48, § 1).
1647 Le motif le plus profond se trouve dans la fidélité de Dieu à son alliance, du Christ à son Église. Par le sacrement de mariage les époux sont habilités à représenter cette fidélité et à en témoigner. Par le sacrement, lindissolubilité du mariage reçoit un sens nouveau et plus profond.
1648 Il peut paraître difficile, voire impossible, de se lier pour la vie à un être humain. Il est dautant plus important dannoncer la bonne nouvelle que Dieu nous aime dun amour définitif et irrévocable, que les époux ont part à cet amour, quil les porte et les soutient, et que par leur fidélité ils peuvent être les témoins de lamour fidèle de Dieu. Les époux qui, avec la grâce de Dieu, donnent ce témoignage, souvent dans des conditions bien difficiles, méritent la gratitude et le soutien de la communauté ecclésiale (cf. FC 20).
1649 Il existe cependant des situations où la cohabitation matrimoniale devient pratiquement impossible pour des raisons très diverses. En de tels cas, lÉglise admet la séparation physique des époux et la fin de la cohabitation. Les époux ne cessent pas dêtre mari et femme devant Dieu ; ils ne sont pas libres de contracter une nouvelle union. En cette situation difficile, la solution la meilleure serait, si possible, la réconciliation. La communauté chrétienne est appelée à aider ces personnes à vivre chrétiennement leur situation, dans la fidélité au lien de leur mariage qui reste indissoluble (cf. FC 83 ; CIC, can. 1151-1155).
1650 Nombreux sont aujourdhui, dans bien des pays, les catholiques qui ont recours au divorce selon les lois civiles et qui contractent civilement une nouvelle union. LÉglise maintient, par fidélité à la parole de Jésus Christ (" Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre, commet un adultère à légard de la première ; et si une femme répudie son mari et en épouse un autre, elle commet un adultère " : Mc 10, 11-12), quelle ne peut reconnaître comme valide une nouvelle union, si le premier mariage létait. Si les divorcés sont remariés civilement, ils se trouvent dans une situation qui contrevient objectivement à la loi de Dieu. Dès lors ils ne peuvent pas accéder à la communion eucharistique, aussi longtemps que persiste cette situation. Pour la même raison ils ne peuvent pas exercer certaines responsabilités ecclésiales. La réconciliation par le sacrement de pénitence ne peut être accordée quà ceux qui se sont repentis davoir violé le signe de lAlliance et de la fidélité au Christ, et se sont engagés à vivre dans une continence complète.
1651 A légard des chrétiens qui vivent en cette situation et qui souvent gardent la foi et désirent élever chrétiennement leurs enfants, les prêtres et toute la communauté doivent faire preuve dune sollicitude attentive, afin quils ne se considèrent pas comme séparés de lÉglise, à la vie de laquelle ils peuvent et doivent participer en tant que baptisés :
On les invitera à écouter la Parole de Dieu, à assister au Sacrifice de la messe, à persévérer dans la prière, à apporter leur contribution aux uvres de charité et aux initiatives de la communauté en faveur de la justice, à élever leurs enfants dans la foi chrétienne, à cultiver lesprit de pénitence et à en accomplir les actes, afin dimplorer, jour après jour, la grâce de Dieu (FC 84).
Louverture à la fécondité
1652 " Cest par sa nature même que linstitution du mariage et lamour conjugal sont ordonnés à la procréation et à léducation qui, tel un sommet, en constituent le couronnement " (GS 48, § 1) :
Les enfants sont le don le plus excellent du mariage et ils contribuent grandement au bien des parents eux-mêmes. Dieu lui-même qui a dit : " Il nest pas bon que lhomme soit seul " (Gn 2, 18) et qui " dès lorigine a fait lêtre humain homme et femme " (Mt 19, 4), a voulu lui donner une participation spéciale dans son uvre créatrice ; aussi a-t-il béni lhomme et la femme, disant : " Soyez féconds et multipliez-vous " (Gn 1, 28). Dès lors, un amour conjugal vrai et bien compris, comme toute la structure de la vie familiale qui en découle, tendent, sans sous-estimer pour autant les autres fins du mariage, à rendre les époux disponibles pour coopérer courageusement à lamour du Créateur et du Sauveur qui, par eux, veut sans cesse agrandir et enrichir sa propre famille (GS 50, § 1).
1653 La fécondité de lamour conjugal sétend aux fruits de la vie morale, spirituelle et surnaturelle que les parents transmettent à leurs enfants par léducation. Les parents sont les principaux et premiers éducateurs de leurs enfants (cf. GE 3). En ce sens, la tâche fondamentale du mariage et de la famille est dêtre au service de la vie (cf. FC 28).
1654 Les époux auxquels Dieu na pas donné davoir des enfants, peuvent néanmoins avoir une vie conjugale pleine de sens, humainement et chrétiennement. Leur mariage peut rayonner dune fécondité de charité, daccueil et de sacrifice.
VI. LÉglise domestique
1655 Le Christ a voulu naître et grandir au sein de la Sainte Famille de Joseph et de Marie. LÉglise nest autre que la " famille de Dieu ". Dès ses origines, le noyau de lÉglise était souvent constitué par ceux qui, " avec toute leur maison ", étaient devenus croyants (cf. Ac 18, 8). Lorsquils se convertissaient, ils désiraient aussi que " toute leur maison " soit sauvée (cf. Ac 16, 31 et 11, 14). Ces familles devenues croyantes étaient des îlots de vie chrétienne dans un monde incroyant.
1656 De nos jours, dans un monde souvent étranger et même hostile à la foi, les familles croyantes sont de première importance, comme foyers de foi vivante et rayonnante. Cest pour cela que le IIe Concile du Vatican appelle la famille, avec une vielle expression, " Ecclesia domestica " (LG 11 ; cf. FC 21). Cest au sein de la famille que les parents sont " par la parole et par lexemple … pour leurs enfants les premiers hérauts de la foi, au service de la vocation propre de chacun et tout spécialement de la vocation sacrée " (LG 11).
1657 Cest ici que sexerce de façon privilégiée le sacerdoce baptismal du père de famille, de la mère, des enfants, de tous les membres de la famille, " par la réception des sacrements, la prière et laction de grâce, le témoignage dune vie sainte, et par leur renoncement et leur charité effective " (LG 10). Le foyer est ainsi la première école de vie chrétienne et " une école denrichissement humain " (GS 52, § 1). Cest ici que lon apprend lendurance et la joie du travail, lamour fraternel, le pardon généreux, même réitéré, et surtout le culte divin par la prière et loffrande de sa vie.
1658 Il faut encore faire mémoire de certaines personnes qui sont, à cause des conditions concrètes dans lesquelles elles doivent vivre et souvent sans lavoir voulu, particulièrement proches du cur de Jésus et qui méritent donc affection et sollicitude empressée de lÉglise et notamment des pasteurs : le grand nombre de personnescélibataires. Beaucoup dentre elles restent sans famille humaine, souvent à cause des conditions de pauvreté. Il y en a qui vivent leur situation dans lesprit des Béatitudes, servant Dieu et le prochain de façon exemplaire. A elles toutes il faut ouvrir les portes des foyers, " Églises domestiques ", et de la grande famille quest lÉglise. " Personne nest sans famille en ce monde : lÉglise est la maison et la famille de tous, en particulier de ceux qui peinent et ploient sous le fardeau (Mt 11, 28) " (FC 85).
En bref
1659 S. Paul dit : " Maris, aimez vos femmes, comme le Christ a aimé lÉglise… Ce mystère est de grande portée ; je veux dire quil sapplique au Christ et à lÉglise " (Ep 5, 25. 32).
1660 Lalliance matrimoniale, par laquelle un homme et une femme constituent entre eux une intime communauté de vie et damour, a été fondée et dotée de ses lois propres par le Créateur. De par sa nature elle est ordonnée au bien des conjoints ainsi quà la génération et à léducation des enfants. Elle a été élevée entre baptisés par le Christ Seigneur à la dignité de sacrement (cf. GS 48, § 1 ; CIC, can. 1055, § 1).
1661 Le sacrement du mariage signifie lunion du Christ et de lÉglise. Il donne aux époux la grâce de saimer de lamour dont le Christ a aimé son Église ; la grâce du sacrement perfectionne ainsi lamour humain des époux, affermit leur unité indissoluble et les sanctifie sur le chemin de la vie éternelle (cf. Cc. Trente : DS 1799).
1662 Le mariage se fonde sur le consentement des contractants, cest à dire sur la volonté de se donner mutuellement et définitivement dans le but de vivre une alliance damour fidèle et fécond.
1663 Puisque le mariage établit les conjoints dans un état public de vie dans lÉglise, il convient que sa célébration soit publique, dans le cadre dune célébration liturgique, devant le prêtre (ou le témoin qualifié de lÉglise), les témoins et lassemblée des fidèles.
1664 Lunité, lindissolubilité et louverture à la fécondité sont essentielles au mariage. La polygamie est incompatible avec lunité du mariage ; le divorce sépare ce que Dieu a uni ; le refus de la fécondité détourne la vie conjugale de son " don le plus excellent ", lenfant (GS 50, § 1).
1665 Le remariage des divorcés du vivant du conjoint légitime contrevient au Dessein et à la Loi de Dieu enseignés par le Christ. Ils ne sont pas séparés de lÉglise, mais ils ne peuvent accéder à la communion eucharistique. Ils mèneront leur vie chrétienne notamment en éduquant leurs enfants dans la foi.
1666 Le foyer chrétien est le lieu où les enfants reçoivent la première annonce de la foi. Voila pourquoi la maison familiale est appelée à bon droit " lÉglise domestique ", communauté de grâce et de prière, école des vertus humaines et de la charité chrétienne.
Chapitre quatrième
Les autres célébrations liturgiques
Article 1
Les sacramentaux
1667 " La sainte Mère Église a institué des sacramentaux, qui sont des signes sacrés par lesquels, selon une certaine imitation des sacrements, des effets surtout spirituels sont signifiés et sont obtenus par la prière de lÉglise. Par eux, les hommes sont disposés à recevoir leffet principal des sacrements, et les diverses circonstances de la vie sont sanctifiées " (SC 60 ; cf. CIC, can. 1166 ; CCEO, can. 867)
Les traits caractéristiques des sacramentaux
1668 Ils sont institués par lÉglise en vue de la sanctification de certains ministères de lÉglise, de certains états de vie, de circonstances très variées de la vie chrétienne, ainsi que de lusage des choses utiles à lhomme. Selon les décisions pastorales des évêques, ils peuvent aussi répondre aux besoins, à la culture et à lhistoire propres au peuple chrétien dune région ou dune époque. Ils comportent toujours une prière, souvent accompagnée dun signe déterminé, comme limposition de la main, le signe de la croix, laspersion deau bénite (qui rappelle le Baptême).
1669 Ils relèvent du sacerdoce baptismal : tout baptisé est appelé à être une " bénédiction " (cf. Gn 12, 2) et à bénir (cf. Lc 6, 28 ; Rm 12, 14 ; 1 P 3, 9). Cest pourquoi des laïcs peuvent présider certaines bénédictions (cf. SC 79 ; CIC, can. 1168) ; plus une bénédiction concerne la vie ecclésiale et sacramentelle, plus sa présidence est réservée au ministère ordonné (évêques, prêtres ou diacres ; cf. De Benedictionibus, Praenotanda generalia 16 et 18, ed. typica 1984 p. 13-15).
1670 Les sacramentaux ne confèrent pas la grâce de lEsprit saint à la manière des sacrements, mais par la prière de lÉglise ils préparent à recevoir la grâce et disposent à y coopérer. " Chez les fidèles bien disposés, presque tous les événements de la vie sont sanctifiés par la grâce divine qui découle du Mystère pascal de la Passion, de la Mort et de la Résurrection du Christ, car cest de lui que tous les sacrements et sacramentaux tirent leur vertu ; et il nest à peu près aucun usage honorable des choses matérielles qui ne puisse être dirigé vers cette fin : la sanctification de lhomme et la louange de Dieu " (SC 61).
Les formes variées des sacramentaux
1671 Parmi les sacramentaux figurent dabord les bénédictions (de personnes, de la table, dobjets, de lieux). Toute bénédiction est louange de Dieu et prière pour obtenir ses dons. Dans le Christ, les chrétiens sont bénis par Dieu le Père " de toutes sortes de bénédictions spirituelles " (Ep 1, 3). Cest pourquoi lÉglise donne la bénédiction en invoquant le nom de Jésus et en faisant habituellement le signe saint de la Croix du Christ.
1672 Certaines bénédictions ont une portée durable : elles ont pour effet de consacrer des personnes à Dieu et de réserver à lusage liturgique des objets et des lieux. Parmi celles qui sont destinées à des personnes à ne pas confondre avec lordination sacramentelle figurent la bénédiction de labbé ou de labbesse dun monastère, la consécration des vierges et des veuves, le rite de la profession religieuse et les bénédictions pour certains ministères dÉglise (lecteurs, acolytes, catéchistes, etc.). Comme exemple de celles qui concernent des objets, on peut signaler la dédicace ou la bénédiction dune église ou dun autel, la bénédiction des saintes huiles, des vases et des vêtements sacrés, des cloches, etc.
1673 Quand lÉglise demande publiquement et avec autorité, au nom de Jésus-Christ, quune personne ou un objet soit protégé contre lemprise du Malin et soustrait à son empire, on parle dexorcisme. Jésus la pratiqué (cf. Mc 1, 25-26), cest de lui que lÉglise tient le pouvoir et la charge dexorciser (cf. Mc 3, 15 ; 6, 7. 13 ; 16,17). Sous une forme simple, lexorcisme est pratiqué lors de la célébration du Baptême. Lexorcisme solennel, appelé " grand exorcisme ", ne peut être pratiqué que par un prêtre et avec la permission de lévêque. Il faut y procéder avec prudence, en observant strictement les règles établies par lÉglise. Lexorcisme vise à expulser les démons ou à libérer de lemprise démoniaque et cela par lautorité spirituelle que Jésus a confié à son Église. Très différent est le cas des maladies, surtout psychiques, dont le soin relève de la science médicale. Il est important, donc, de sassurer, avant de célébrer lexorcisme, quil sagit dune présence du Malin, et non pas dune maladie. (cf. CIC, can. 1172).
La religiosité populaire
1674 Hors de la Liturgie sacramentelle et des sacramentaux, la catéchèse doit tenir compte des formes de la piété des fidèles et de la religiosité populaire. Le sens religieux du peuple chrétien a , de tout temps, trouvé son expression dans des formes variées de piété qui entourent la vie sacramentelle de lÉglise, tels que la vénération des reliques, les visites aux sanctuaires, les pèlerinages, les processions, le chemin de croix, les danses religieuses, le rosaire, les médailles, etc. (cf. Cc. Nicée II : DS 601 ; 603 ; Cc. Trente : DS 1822).
1675 Ces expressions prolongent la vie liturgique de lÉglise, mais ne la remplacent pas : " Ils doivent être réglés en tenant compte des temps liturgiques et de façon à sharmoniser avec la liturgie, à en découler dune certaine manière et à y introduire le peuple, parce que la liturgie, de sa nature, leur est de loin supérieure " (SC 13).
1676 Un discernement pastoral est nécessaire pour soutenir et appuyer la religiosité populaire et, le cas échéant, pour purifier et rectifier le sens religieux qui sous-tend ces dévotions et pour les faire progresser dans la connaissance du Mystère au Christ (cf. CT 54). Leur exercice est soumis au soin et au jugement des évêques et aux normes générales de lÉglise (cf. CT 54).
La religiosité populaire, pour lessentiel, est un ensemble de valeurs qui, avec sagesse chrétienne, répond aux grandes interrogations de lexistence. Le bon sens populaire catholique est fait de capacité de synthèse pour lexistence. Cest ainsi quil fait aller ensemble, de façon créative, le divin et lhumain, le Christ et Marie, lesprit et le corps, la communion et linstitution, la personne et la communauté, la foi et la patrie, lintelligence et le sentiment. Cette sagesse est un humanisme chrétien qui affirme radicalement la dignité de tout être comme fils de Dieu, instaure une fraternité fondamentale, apprend à rencontrer la nature comme à comprendre le travail, et donne des raisons de vivre dans la joie et la bonne humeur, même aux milieu des duretés de lexistence. Cette sagesse est aussi pour le peuple un principe de discernement, un instinct évangélique qui lui fait percevoir spontanément quand lEvangile est le premier servi dans lÉglise, ou quand il est vidé de son contenu et asphyxié par dautres intérêts (Document de Puebla ; cf. EN 48).
En bref
1677 On appelle sacramentaux les signes sacrés instituées par lÉglise dont le but est de préparer les hommes à recevoir le fruit des sacrements et de sanctifier les différentes circonstances de la vie.
1678 Parmi les sacramentaux, les bénédictions occupent une place importante. Elles comportent à la fois la louange de Dieu pour ses uvres et ses dons, et lintercession de lÉglise afin que les hommes puissent faire usage des dons de Dieu selon lesprit de lEvangile.
1679 En plus de la Liturgie, la vie chrétienne se nourrit des formes variées de piété populaire, enracinées dans les différentes cultures. Tout en veillant à les éclairer par la lumière de la foi, lÉglise favorise les formes de religiosité populaire qui expriment un instinct évangélique et une sagesse humaine et qui enrichissent la vie chrétienne.
Article 2
Les funérailles chrétiennes
1680 Tous les sacrements, et principalement ceux de linitiation chrétienne, avaient pour but la dernière Pâque de lenfant de Dieu, celle qui, par la mort, le fait entrer dans la Vie du Royaume. Alors saccomplit ce quil confessait dans la foi et dans lespérance : " Jattends la Résurrection des morts et la Vie du monde à venir " (Symbole de Nicée-Constantinople).
. La dernière Pâque du Chrétien
1681 Le sens chrétien de la mort est révélé dans la lumière du Mystère pascal de la mort et de la résurrection du Christ, en qui repose notre unique espérance. Le chrétien qui meurt dans le Christ Jésus " quitte ce corps pour aller demeurer auprès du Seigneur " (2 Co 5, 8).
1682 Le jour de la mort inaugure pour le chrétien, au terme de sa vie sacramentelle, lachèvement de sa nouvelle naissance commencée au Baptême, la " ressemblance " définitive à " limage du Fils " conférée par lOnction de lEsprit Saint et la participation au Festin du Royaume qui était anticipée dans lEucharistie, même si dultimes purifications lui sont encore nécessaires pour revêtir la robe nuptiale.
1683 LÉglise qui, comme Mère, a porté sacramentellement en son sein le chrétien durant son pèlerinage terrestre, laccompagne au terme de son cheminement pour le remettre " entre les mains du Père ". Elle offre au Père, dans le Christ, lenfant de sa grâce, et elle dépose en terre, dans lespérance, le germe du corps qui ressuscitera dans la gloire (cf. 1 Co 15, 42-44). Cette offrande est pleinement célébrée par le Sacrifice eucharistique ; les bénédictions qui précèdent et qui suivent sont des sacramentaux.
II. La célébration des funérailles
1684 Les funérailles chrétiennes sont une célébration liturgique de lEglise. Par celle-ci, le ministère de lÉglise a en vue dans ce cas aussi bien dexprimer la communion efficace avec le défunt que dy faire participer la communauté rassemblée pour les obsèques et de lui annoncer la vie éternelle.
1685 Les différents rites des funérailles expriment le caractère Pascal de la mort chrétienne et répondent aux situations et aux traditions de chaque région, même en ce qui concerne la couleur liturgique (cf. SC 81).
1686 LOrdo exsequiarum (OEx) de la liturgie romaine propose trois types de célébration des funérailles, correspondant aux trois lieux de son déroulement (la maison, léglise, le cimetière), et selon limportance quy attachent la famille, les coutumes locales, la culture et la piété populaire. Ce déroulement est dailleurs commun à toutes les traditions liturgiques et il comprend quatre moments principaux :
1687 Laccueil de la communauté. Une salutation de foi ouvre la célébration. Les proches du défunt sont accueillis par une parole de " consolation " (au sens du Nouveau Testament : la force de lEsprit Saint dans lespérance ; cf. 1 Th 4, 18). La communauté priante qui se rassemble attend aussi " les paroles de la vie éternelle ". La mort dun membre de la communauté (ou le jour anniversaire, le septième ou le trentième jour) est un événement qui doit faire dépasser les perspectives de " ce monde-ci " et attirer les fidèles dans les véritables perspectives de la foi au Christ ressuscité.
1688 La Liturgiede la Parole, lors de funérailles, exige une préparation dautant plus attentive que lassemblée alors présente peut comprendre des fidèles peu assidus à la liturgie et des amis du défunt qui ne sont pas chrétiens. Lhomélie, en particulier, doit " éviter le genre littéraire de léloge funèbre " (OEx 41) et illuminer le mystère de la mort chrétienne dans la lumière du Christ ressuscité.
1689 Le Sacrifice eucharistique. Lorsque la célébration a lieu dans léglise, lEucharistie est le cur de la réalité Pascale de la mort chrétienne (cf. OEx 1). Cest alors que lÉglise exprime sa communion efficace avec le défunt : offrant au Père, dans lEsprit Saint, le sacrifice de la mort et de la résurrection du Christ, elle lui demande que son enfant soit purifié de ses péchés et de ses conséquences et quil soit admis à la plénitude Pascale de la table du Royaume (cf. OEx 57). Cest par lEucharistie ainsi célébrée que la communauté des fidèles, spécialement la famille du défunt, apprend à vivre en communion avec celui qui " sest endormi dans le Seigneur ", en communiant au Corps du Christ dont il est membre vivant et en priant ensuite pour lui et avec lui.
1690 Ladieu (" à-Dieu ") au défunt est sa " recommandation à Dieu " par lÉglise. Cest " le dernier adieu par lequel la communauté chrétienne salue un de ses membres avant que le corps de celui-ci ne soit porté à sa tombe " (OEx 10). La tradition byzantine lexprime par le baiser dadieu au défunt :
Par ce salut final " on chante pour son départ de cette vie et pour sa séparation, mais aussi parce quil y a une communion et une réunion. En effet, morts nous ne sommes nullement séparés les uns des autres, car tous nous parcourons le même chemin et nous nous retrouverons dans le même lieu. Nous ne serons jamais séparés, car nous vivons pour le Christ, et maintenant nous sommes unis au Christ, allant vers lui… nous serons tous ensemble dans le Christ " (Saint Syméon de Thessalonique, De ordine sepulturae, 367 : PG 155, 685B).